Suite au travail effectué par les équipes SUD Rail de Saintes et Bordeaux, une plainte pour mise en danger d’autrui a été déposée le 27 novembre 2001, au parquet de Saintes. Le dossier a été transmis aux magistrats spécialisés du pôle de santé publique à Paris.

L’Andeva, la fédération SUD Rail et plusieurs victimes se sont portées partie civile. Jean-Paul Dugoujon de SUD Rail fait le point sur cette procédure.

Pourquoi avez-vous déposé cette plainte  ?

Parce que la direction a manqué à ses obligations de sécurité et mis en danger la vie du personnel qu’elle a exposé à l’amiante.

La SNCF utilisait-elle beaucoup d’amiante ?

Oui, pour l’isolation du matériel roulant. Les agents de la maintenance à Saintes ont été fortement exposés.

Le danger était connu depuis longtemps. Les mesures de prévention ont été insuffisantes, tardives, voire inexistantes.

Où en est l’instruction ?

Un expert indépendant a été missionné par le juge d’instruction pour vérifier si l’établissement industriel de maintenance de matériel (EIMM) de Saintes respectait la réglementation passée et présente.

L’expert a passé en revue, l’évaluation des risques, le dossier médical, les protections individuelles, l’efficacité des déprimogènes, l’existence de douches à côté de la zone de travail, la conformité des locaux, les déchets...
Son rapport confirme les carences de l’entreprise et la légitimité de notre plainte. Il se termine par «  nous considérons que les locaux que nous avons pu visiter ne sont pas conformes à la règlementation en vigueur  ».

Y a-t-il eu des mises en examen ?

Une seule jusqu’à présent  : celle du chef d’établissement de 2001.
A ce jour, ni la responsabilité des directions régionales et nationales de la SNCF ni celle de la médecine du travail n’ont été mises en cause, alors que tout le dossier de l’instruction les implique.

Votre action a-t-elle déjà eu des résultats ?

A Saintes, nous avons obtenu la construction d’un bâtiment dédié au travail sur les matériaux amiantés (seule réalisation conforme dans les ateliers SNCF en France) ainsi qu’un début de prise de conscience dans les autres établissements. Mais il reste beaucoup de chemin à parcourir.

Comment est-il possible d’améliorer la sécurité à la SNCF ?

Tous les travaux sur des matériaux susceptibles de libérer des fibres doivent être faits dans un atelier spécialisé, hermétiquement clos, équipé d’un sas.
Les agents doivent être formés et avoir une habilitation au risque chimique (la réglementation sur les produits cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction s’applique à l’amiante).
Le repérage de l’amiante doit faire l’objet d’une signalisation visible par tous.

Que fait la Direction ?

Pour le choix des mesures de prévention ou le maintien d’amiante dans le matériel roulant, elle a l’habitude de décider seule.

Elle fait appel à des entreprises extérieures pour les travaux de désamiantage, mais sur quels critères ? Nous ne pouvons lui faire confiance.

SUD Rail demande un véritable recensement des personnes exposées. Un questionnaire a été envoyé en 1996 pour qu’elles puissent bénéficier d’un suivi médical renforcé et d’une attestation d’exposition à leur cessation d’activité. Mais le recensement est incomplet et il n’y a pas de document disant où se trouvait l’amiante.

Il reste beaucoup à faire sur les protections individuelles et collectives, l’étiquetage, la traçabilité des expositions, le contrôle des méthodes de travail, la coactivité...

15 ans après, où en est la procédure ?

Une expertise médicale a été ordonnée pour les plaignants de 2001, malades ou décédés de l’amiante. L’instruction s’éternise. Il faut la clôre au plus vite et passer au procès pénal. Sud Rail et les parties civiles vont y travailler avec les cabinets d’avocats de l’Andeva.

Une condamnation de la SNCF serait une sanction des manquements de l’employeur et un encouragement à renforcer la prévention.