« Le jugement de la Cour d’appel de Nantes est très important pour moi.
Pierre, mon mari a fait preuve d’un grand courage face à la maladie. Il savait que ses jours étaient comptés. Il a déposé un dossier d’indemnisation au Fiva pour que sa famille puisse être indemnisée rapidement. Mais il voulait que la responsabilité de Latty soit reconnue.

Six mois avant le décès de mon mari, Christian, un collègue très proche de mon mari, est mort d’un mésothéliome.

« J’ai voulu faire reconnaître la faute inexcusable de l’employeur »

Sur son lit d’hôpital, Pierre m’avait dit  : «  Promets-moi que tu iras jusqu’au bout ! »

Je lui ai juré et j’ai tenu parole. Quand le Fiva m’a demandé si je voulais engager une action en faute inexcusable, j’ai accepté.

Nous avons pu réunir un grand nombre d’attestations, car il était très apprécié de ses collègues.

Latty a été condamné par le Tribunal des affaires de la Sécurité sociale de Chartres, puis par la Cour d’appel de Versailles. Ma rente de conjoint a été majorée.

« J’ai été sidérée
par l’incroyable culot de Latty  »

Je pensais que tout était fini. J’ai été sidérée par l’incroyable culot de Latty qui est allé au tribunal administratif pour demander à l’Etat de payer sa faute et même de lui verser 50 000 euros au titre de son «  préjudice moral  » pour avoir terni l’image de la société.

Je sais que l’Etat porte une responsabilité dans l’affaire de l’amiante, mais les premiers responsables sont ceux qui ont fait travailler des gens sans les protéger.

J’ai travaillé chez Latty de 1977 à 1988 comme secrétaire bilingue. Je ne manipulais pas l’amiante, mais je respirais ses poussières comme d’autres employés de bureau qui traversaient régulièrement les ateliers. Je ne suis pas à l’abri...

Ma fille est née en 1981. Inconsciente du danger, je suis venue à l’usine avec le landau pour la présenter aux collègues. Le directeur des fabrications m’a stoppée. Je l’entends encore me dire  : « Aussi longtemps que je vivrai, personne n’entrera avec un bébé dans cette usine  ». Il fut l’un des premiers à mourir d’un mésothéliome.

La Direction connaissait le danger. Elle n’a pas protégé ses salariés. Je n’accepte pas qu’ils invoquent maintenant la responsabilité de l’Etat pour réduire de moitié ce qu’ils doivent aux victimes.

Latty a perdu devant la cour d’appel de Nantes. C’est une victoire, pour moi, pour la mémoire de mon mari et pour tous ceux qui sont ou seront victimes de l’amiante chez Latty ou ailleurs.

J’ai beaucoup apprécié le soutien de l’Adeva Centre et de Frédéric Quinquis, notre avocat.

Quand l’association m’a proposé d’être bénévole, je n’ai pas accepté tout de suite. Les dossiers réveillaient chez moi trop de souvenirs...
Après le décès de Christian Couturier, un responsable de l’Adeva, j’ai été moralement obligée de faire le pas. J’ai trouvé à l’association des gens formidables avec qui j’ai plaisir à travailler.

« L’argent
ne remplacera
jamais une vie »

Huit ans ont passé depuis le décès de mon mari. La douleur de l’absence est aussi vive qu’au premier jour. J’ai été indemnisée, mais - quelle que soit la somme versée - l’argent ne remplacera jamais
une vie.