Les écoles élémentaire et maternelle de Saint Ouen sont toutes deux situées rue Bachelet. La première abrite 400 enfants, la seconde 222. Il s’agit d’un bâtiment construit dans les années soixante, et qui - à l’époque - était considéré comme une solution temporaire. Toute la structure est littéralement infestée d’amiante.
« Les plombiers ne savaient pas qu’ils perçaient une cloison en amiante-ciment. »
L’amiante ? On en trouve du sol au plafond sous forme de dalles, colles, cloisons, faux plafonds, etc.
La démolition de ces bâtiments est annoncée depuis des années mais la pression démographique, très forte dans cette circonscription, en repousse continuellement la mise en oeuvre, malgré le triste état dans lequel l’école se trouve aujourd’hui.
En juin 2016, suite à plusieurs incidents graves, quelques parents d’élèves élus font une visite approfondie des lieux. Ils ne connaissent alors pas grand-chose à l’amiante. Ils prennent des photos et demandent une expertise indépendante.
Des mesures d’empoussièrement sont réalisées, quelques travaux entrepris sans qu’ils puissent savoir exactement lesquels, car ils n’ont pas accès aux documents officiels, et notamment au Dossier technique amiante, le DTA.
L’affaire rebondit fin octobre 2017. Suite à une fuite d’eau (cela faisait plus de 15 jours qu’il n’y avait plus d’eau dans les étages), une entreprise de Gennevilliers vient effectuer des réparations. Les plombiers percent deux trappes d’environ trente centimètre de côté à travers des cloisons en amiante-ciment pour atteindre les tuyauteries. Personne ne les a informés qu’ils intervenaient sur un bâtiment amianté ! Ce matin-là, les services techniques de la mairie qui auraient dû venir sur le site pour accompagner l’intervention ne sont pas joignables au téléphone.
Alertée par le bruit et la poussière, une enseignante informe les plombiers de la nature du matériau qu’ils ont percé. Ils stoppent aussitôt le chantier.
Une responsable des parents d’élèves, très attentive à ces questions, arrive juste à temps pour les voir quitter les lieux vers 13 heures 30.
à la fin de la pause du midi, les enseignants refusent de remonter en classe. Les enfants vont devoir passer l’après-midi dehors.
Argument-massue pour rassurer les parents : « Il n’y avait pas d’odeur d’amiante » (!)
La directrice générale, le directeur des services techniques et la mairie s’efforcent de rassurer : « Cela ne sentait pas l’amiante ». Cet argument ahurissant peine à convaincre les réfractaires.
L’inspecteur de circonscription de l’éducation nationale, dépêché sur place après avoir été alerté par le directeur et en accord avec sa hiérarchie, demande également aux enseignants de regagner leur classe.
Ils s’y opposent, tout comme les parents d’élèves qui refusent de voir leur enfants traverser des zones amiantées.
En fin de journée, de guerre lasse, la mairie annonce que l’école restera fermée le lendemain pour raisons techniques. Les enfants rentrent donc chez eux, sans leurs manteaux, ni leurs cartables, restés dans l’établissement.
Certains parents d’élèves contactent alors l’Addeva 93 dont ils ont trouvé les coordonnées sur Internet pour obtenir de l’aide, des infos et des idées.
L’Addeva leur conseille, d’une part de se constituer en association de parents d’élèves afin de pouvoir obtenir l’accès aux documents, notamment le DTA qui leur est encore refusé, d’autre part d’informer les professeurs et les agents de service afin de les mobiliser sur ce thème.
Une première réunion se tient le 23 octobre 2017 et réunit Henri Boumandil de l’Addeva 93, Didier Faure – le « Monsieur réglementation » du groupe prévention de l’Andeva – ainsi que sept parents d’élèves.
Un responsable dépêché par la mairie vient présenter des résultats aux parents d’élèves. Ils sont issus d’un dossier technique amiante, réalisé... en avril 2014. Un document obsolète, puisque le DTA doit être remis à jour tous les trois ans.
Moins naifs qu’on ne l’espérait en haut-lieu, les parents décident de « retenir » l’infortuné messager. Ils ne le libéreront qu’à condition qu’on leur présente des résultats d’analyses et de mesures récentes.
Le premier adjoint directeur général de la mairie est alors mandaté en catastrophe pour les apporter. Le diagnostic 2017 communiqué ce jour révèle à la fois une dégradation avancée de l’amiante en place et une dégradation structurelle importante des bâtiments. Le rapport insiste sur la nécessité de mener des analyses complémentaires plus poussées.
Au dernières nouvelles, les parents d’élèves ont demandé que soit organisée une grande réunion avec la présence de l’ARS, de Veritas, de l’APAVE et bien sûr de l’Addeva 93. Ce n’est pas encore gagné, car la mairie qui se dit favorable à l’idée ne semble pas pressée de l’organiser.
Des problèmes aussi sérieux devraient également concerner les représentants de la municipalité, du département, du rectorat et de l’inspection du travail.