Le 12 septembre, le bureau de l’Andeva a rencontré la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) par visioconférence. Cette réunion avait été soigneusement préparée par le groupe de travail « Maladies professionnnelles » de l’Andeva.
Les participants : trois membres de la Cnam (Laurent Bailly, le Dr Philippe Petit et Benjamin Servant) ainsi que huit membres du bureau de l’Andeva : Jacques Faugeron (président, Addeva 44), Lydie Jablonsky (Adevartois), Christiane De Felice (Adevimap), Jean-Paul Sayer (Adeva Vosges), Serge Moulinneuf (Adeva Centre), Huguette Mercier (trésorière, Adeva Rouen métropole), Alain Bobbio (secrétaire national, Addeva 93) et Jean-François Borde (Caper Bourgogne).
Hélène Boulot (directrice de l’Andeva, Vincennes) et Carine Toutain (juriste, Vincennes) étaient également présentes. Voici une synthèse des problèmes signalés par les associations affiliées à l’Andeva.
Les associations locales constatent une nette dégradation des conditions d’instruction des dossiers par les caisses primaires.
Les dégâts du « tout numérique»
La généralisation du « tout numérique» met en difficulté des assurés âgés, peu familiers de l’informatique. Cela pose un problème d’accès aux droits.
L’assuré reçoit un « code de déblocage pour se connecter et remplir son dossier. En théorie, s’il ne se connecte pas pendant 15 jours, les caisses doivent lui envoyer un questionnaire d’exposition sur papier. Mais beaucoup ne le font pas.
Même pour des personnes maîtrisant l’informatique, il y a des dysfonctionnements : le logiciel ne permet pas de remplir un questionnaire pour chaque employeur ! Au cours de la saisie, il y a régulièrement des coupures, avec perte de toutes les données saisies.
Dès lors qu’une boîte Ameli a été ouverte (souvent par les enfants ou petits- enfants de l’assuré), les réponses de la CPAM sont envoyées sur cette boîte. Il n’y a plus d’envoi de courrier papier. S’il ne consulte pas régulièrement la boîte Ameli, il ne sera pas informé de la prise en charge ou du refus et ne pourra pas contester la décision dans les délais.
Il y a donc un élargissement de la fracture sociale entre ceux qui maitrisent le numérique et ceux qui ne le maîtrisent pas, voire n’y ont pas accès. On fabrique une société à deux vitesses avec des exclus qui n’auront pas accès à leurs droits.
L’Andeva demande le retour aux dossiers papier pour toutes les maladies professionnelles en parallèle avec la numérisation des dossiers. L’outil numérique ne doit pas être « à la place de » mais « en plus ». Compte tenu de la sous-déclaration massive des maladies professionnelles, c’est une urgente nécessité.
Une déshumanisation des rapports avec les caisses
Avec la plateforme téléphonique « 3646 », les assurés sont mis en relation avec des personnes qui ne sont pas en mesure de les renseigner.
L’expérience montre qu’elles en sont souvent incapables, car elles n’ont que très peu d’informations sur leur écran. La réponse devient alors : « On se renseigne, et on vous rappellera plus tard ».
Il y a un problème de formation manifeste, quand des assurés reçoivent des réponses telles que :
- « Pourquoi voulez-vous déclarer une maladie ? Vous n’êtes pas salarié, vous êtes retraité... »
- « Pourquoi voulez-vous déclarer une maladie ? Votre mari est mort, Vous n’êtes pas la victime... »
- « Pourquoi demander un suivi médical ? Vous n’êtes pas malade... »
Le même dossier est traité par des personnes différentes. Nous demandons que l’Andeva (ou l’association locale) obtienne un contact avec un référent du service Risques professionnels pour chaque caisse primaire afin d’obtenir des réponses précises sur des dossiers en cours (ligne directe et mail direct).
Des pièces du dossier inaccessibles
Si une personne s’est connectée au site « risques professionnels » et a rempli son questionnaire, elle pourra récupérer une copie des pièces de son dossier.
Pour les autres, ce sera quasiment impossible, même en faisant valoir l’article du Code de Sécurité sociale qui le prévoit.
N’y aurait-il donc pas d’autre solution que de saisir la CADA1 ou le Défenseur des Droits pour obliger les caisses primaires à remplir leurs obligations vis-à-vis de leurs assurés ? Il y a un non-respect du contradictoire dans ces dossiers.
Il est également très difficile d’obtenir l’avis rendu par un Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP). Cet avis, systématiquement réclamé par le Fiva, est une pièce essentielle, et particulièrement lorsqu’il fait grief à l’assuré.
Il devrait être envoyé d’office à l’assuré sans qu’il ait besoin d’en faire la demande.
Plus largement les caisses doivent envoyer une copie du dossier de maladie professionnelle, si l’assuré en fait la demande pour faire valoir ses droits en cas de refus ou pour améliorer la connaissance des maladies professionnelles en cas d’avis positif.
Une réforme défavorable balancée sans consultation
Nous savons qu’une réforme du barème AT-MP est à l’étude, notamment pour les maladies respiratoires.
Nous avons de bonnes raisons de craindre qu’elle ne soit défavorable.
L’Andeva n’a été ni informée ni consultée.
En tant qu’association nationale de défense des victimes, elle demande à l’être dans les meilleurs délais .
1) La Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) est une autorité administrative indépendante chargée de veiller au respect de la liberté d’accès aux documents administratifs.
Toute personne qui se voit refuser l’accès à un document administratif ou n’obtient pas de réponse dans un délai d’un mois, peut saisir la CADA.
Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°69 (octobre 2022)