MALADIES PROFESSIONNELLES : une réparation intégrale pour toutes les victimes de l’amiante

L’ANDEVA avait déjà exprimé ses revendications pour améliorer la réparation des maladies professionnelles dans la plate-forme élaborée avec la FNATH (distribuée lors de l’assemblée générale de février 1997). Nous avons présenté ce document au professeur Got (chargé d’une mission amiante par le gouvernement), puis précisé sous la forme de 17 fiches de propositions détaillées. En voici l’essentiel.

1 ) Informer les salariés et les malades, former les médecins

La sous déclaration commence par l’absence d’information des intéressés. La méconnaissance de ces questions par les médecins en est une cause.
Nous demandons que des guides soient distribués par les organismes sociaux et qu’une campagne d’information soit conduite auprès des médecins.
Le point de départ du délai de prescription doit être la date de constatation médicale évoquant l’origine professionnelle de la maladie.

2 ) Raccourcir les délais, limiter la durée d’instruction des dossiers

Un délai maximum de 4 mois devrait être imposé aux caisses qui ne pourraient plus s’en affranchir par la « lettre de contestation préalable ». Sans difficultés particulières clairement exprimées à la victime, la reconnaissance serait acquise au bout de 4 mois.
Les délais de contestation des décisions des caisses doivent être allongés pour permettre aux victimes et aux ayants droit d’obtenir les renseignements qui leur permettent de réagir, et éviter qu’ils ne soient pris de court.

3 ) Faciliter la preuve de l’exposition

C’est l’obstacle le plus important, d’autant qu’il s’agit de maladies à très long temps de latence et que de très nombreuses entreprises ont disparu.
Nous demandons la création d’un observatoire des situations d’exposition à l’amiante (sites, métiers, matériaux, matrices, emplois-exposition...) auquel puisssent se référer les CPAM.
Pour les pathologies spécifiques, le mésothéliome en particulier, il faut que les malades ayant exercé un métier exposé aient automatiquement une présomption d’exposition.

4 ) Assouplir les critères médicaux

L’attitude restrictive des experts, notamment des collèges des 3 médecins est un obstacle majeur à la reconnaissance en maladie professionnnelle.
Il faut sortir de ce système d’expertise pour raccourcir les délais d’instruction et retrouver une caractérisation médicale « normale ».

Deux points sont à souligner :
- pour les cancers, en cas de diagnostic anatomopathologique difficile, le doute doit bénéficier à la victime.
- les épaississements pleuraux unilatéraux devraient être pris en charge. C’est un fréquent motif de refus en cas de pathologie pleurale bénigne. Il faut modifier le tableau 30.

5 ) Abroger toutes les dispositions spéciales relatives aux pneumoconioses

- le délai d’exposition de 5 ans,
- l’attribution restrictive des prestations
- les expertises obligatoires par un médecin agréé en pneumoconioses ou un collège de trois médecins.

6 ) Uniformiser les régimes spéciaux : fonctionnaires, marins, militaires.

Les victimes professionnelles de ces régimes, fort nombreuses, doivent être reconnues et indemnisées selon les mêmes principes que les salariés du régime général (prise en charge des maladies se déclarant après la retraite, taux d’IPP appliqués sans seuils, cumul pour les veuves...)

7 ) Indemniser correctement les victimes.

Le barème qui existe n’est pas suffisant et il n’est pas officiel.
Il faut le réactualiser et l’imposer aux caisses. Il devra prendre en compte le réel préjudice fonctionnel subi par la victime en y intégrant :

- la douleur
- le retentissement du handicap sur l’activité quotidienne ( insuffisance ventilatoire à l’effort ).
- le retentissement sur l’emploi : les victimes de maladies professionnelles licenciées pour inaptitude médicale doivent être indemnisées à hauteur de leur salaire jusqu’à ce qu’elles retrouvent une insertion professionnelle.

Le taux d’IPP doit réparer la perte réelle de capacité de gain (perte d’emploi, déclassement).
De même,les indemnisations que perçoivent les enfants de victimes décédées sont dérisoires et doivent être considérablement revalorisées.

En fait, c’est la réparation intégrale de l’ensemble des préjudices subis que revendique l’Andeva pour les victimes de l’amiante au titre du régime AT-MP, et toutes les autres.

L’insuffisance de la réparation des maladies professionnelles vient d’être soulignée par plusieurs rapports officiels. S’agissant des maladies liées à l’amiante, compte tenu des responsabilités considérables des industriels et des organismes de prévention, des mesures exceptionnelles doivent être prises pour accorder aux victimes une indemnisation décente.
A la suite du rapport GOT, le gouvernement annoncera des mesures. Sans doute nous paraîtront-elles insuffisantes, mais nous avons bon espoir que disparaissent les dispositions spéciales aux pneumoconioses, très injustes.
Pour les difficultés de reconnaissance, d’ordre médical ou administratif, nous continuerons à montrer à travers la défense des dossiers des adhérents de l’Andeva, les insuffisances inacceptables de ce système.
Mais la bataille la plus importante sera celle du niveau des indemnisations et de la réparation des préjudices socioprofessionnels et extrapatrimonaux.

 


FACE A L’AMIANTE EN PLACE, DE REELLES MESURES DE PREVENTION


L’amiante est interdit. Mais des millions de tonnes de ce matériau cancérogène resteront encore en place pendant des années, disséminés dans les immeubles industriels et commerciaux, les locaux scolaires, les lieux d’habitation, les équipements les plus divers. Cette présence constitue un risque majeur pour les travailleurs du bâtiment et de la maintenance et entraîne des risques pour les occupants du bâtiment.


La prévention du risque amiante pose des problèmes complexes. Sans détailler ses aspects techniques, rappelons ici quelques propositions.

Améliorer la législation actuelle

En 1966, la législation a imposé le recensement des flocages et calorifugeages, l’obligation dans certains cas d’effectuer des travaux d’assainissement (confinement ou enlèvement d’amiante), des mesures réglementaires strictes pour ces travaux, une réglementation générale de protection de tous les travailleurs exposés (« secteur III » du décret 96-98). Mais ces mesures doivent être complétées et, de plus, leur mise en oeuvre est pour le moment insuffisante.

Instaurer des plans de gestion pour tous les bâtiments contenant de l’amiante

-  Repérage complet de l’amiante .
L’inventaire des flocages, calorifugeages et faux plafonds ne suffit pas. Il doit inclure les matériaux semi-tours (pical, progypsol, etc) qui se délitent facilement et des matériaux durs comme le fibrociment qui peuvent libérer beaucoup de fibres lors de travaux.
-  Amélioration des diagnostics
Toute évaluation doit prendre en compte l’activité humaine, en particulier la présence d’enfants. La valeur limite doit être abaissée à 5 fibres par litre (40 fois la valeur moyenne dans l’air de Paris). Si elle est dépassée, le propriétaire devra faire des travaux.
-  Information écrite des occupants
Sur la présence d’amiante, les risques et les précautions à prendre.

Garantir la sécurité des chantiers de désamiantage

- Accréditation des entreprises de désamiantage par des organismes indépendants des entreprises du bâtiment, validée par des contrôles de chantiers impromptus sous la responsabilité des pouvoirs publics.
- Formation spécifique approfondie pour le personnel de ces chantiers à haut risque. C’est aux pouvoirs publics et non aux industriels du bâtiment que doit en incomber la responsabilité.
- Le retrait de matériaux durs tels que le fibrociment doit être codifié.

Informer et protéger tous les intervenants

Chaque jour des salariés travaillent au contact de l’amiante, sans même connaitre le risque. Ces interventions souvent confiées à des PME sous-traitantes doivent être strictement réglementées :

- Procédures écrites pour la maintenance et le nettoyage courant précisant les procédés de travail, les protections individuelles, le matériel (ex : aspirateurs à filtres absolus).
- Avant tout chantier de rénovation, obligation d’un repérage exhaustif de l’amiante par le propriétaire.
- Formation spécifique amiante pour les ouvriers du bâtiment ; publication d’un guide de la réglementation amiante.

Renforcer les contrôles

Les CRAM et l’inspection du travail doivent avoir des moyens accrus.

 


UN STATUT POUR TOUS LES TRAVAILLEURS EXPOSES A L’AMIANTE

L’ADEVA Cherbourg a fait circuler une pétition qui réclame un véritable statut pour les travailleurs de l’amiante. Elle demande notamment :


- La retraite à 50 ans et plus accompagnée de majoration des années d’exposition par un coefficient bonificateur pour l’obtention de la retraite à taux plein et par l’embauche nombre pour nombre et profession par profession. Ce départ pourrait être effectif dès lors que le nombre d’annuités requises est atteint.
- La réduction du temps de travail à 32 heures sans perte de salaire.
- Des mesures spéciales pour les salariés licenciés avant 50 ans (salaires, radiations ASSEDIC et ANPE).
- Une meilleure indemnisation et une véritable reconnaissance de la maladie professionnelle pour les salariés de l’amiante.
- Une couverture en matière de salaire, de frais scolaires pour les ayants droit lorsque l’un des conjoints décède de l’amiante. Reconnaissance du concubin comme ayant droit.
- L’ouverture de véritables négociations sur le suivi médical (post-professionnel), les quotas des médecins pour les arrêts maladie, les remboursements des soins compte tenu de l’affaiblissement des victimes, des vaccins anti-grippe, etc.
- La prise en compte de revendications spécifiques telles que, par exemple, le cumul des réversions avec les rentes pour les veuves... Cette prise en compte devant se traduire par l’ouverture de négociations sur la base des revendications des organisations représentantes des victimes de l’amiante.

Cette pétition a recueilli 1430 signatures. Elle a été remise en délégation le 15 juin 1998 au député Cazeneuve. Le texte avait été envoyé aux adhérents ainsi qu’aux organisations syndicales. l’UL CGT l’a publiée dans son bulletin. La FSU l’a fait connaître à ses adhérents. Sud PTT a fait parvenir 80 signatures.


Article paru dans le bulletin de l’Andeva N°4 (juillet 1998)