Une série de mesures concernant les délais de traitement des dossiers, la suppression du collège des 3 médecins, la levée de la prescription des dossiers, l’officialisation du barème constituent d’indéniables avancées. Il n’empêche que la situation des victimes et des personnes exposées reste trop souvent insupportable.

Maladies reconnues : des progrès, mais on est encore loin du compte...

Les derniers chiffres complets disponibles sont ceux de 1996. Ils montrent une nette progression avec 1607 maladies liées à l’amiante reconnues dont 170 asbestoses (10%), 1115 atteintes pleurales bénignes (70%), et 320 cancers (20%).

Parmi les cancers on compte 180 mésothéliomes et 140 cancers broncho-pulmonaires dont 55 au titre du tableau 30 et 85 au titre du 30 bis.

En 1994, les CPAM avaient reconnu 84 mésothéliomes et 33 cancers broncho-pulmonaires.

Si l’on admet que les 750 mésothéliomes et 1200 cancers broncho-pulmonaires recensés par l’Inserm en 1996 se répartissent proportionnellement aux grandes catégories d’actifs, on doit attendre pour les salariés relevant du Régime général environ 450 mésothéliomes et 700 cancers broncho-pulmonaires. On est donc encore loin du compte, et surtout l’insuffisance de la prise en compte des cancers du poumon est criante. Il est essentiel de renforcer l’information sur la déclaration et les possibilités de réouverture des dossiers jusqu’à la fin de l’année 2001.

Il subsiste aussi des disparités régionales inacceptables. Une enquête de M. Goldberg (INSERM) montre qu’une victime d’un mésothéliome a 13 fois moins de chance d’être reconnue à Montpellier qu’à Nantes !...

Le montant des indemnisations demeure dramatiquement insuffisant

Rien n’a avancé sur le niveau des indemnisations, qui sont bien loin de réparer l’ensemble des préjudices.

Les taux d’IPP inférieurs à 50% continuent à être divisés par 2 pour donner des taux de rente vraiment dérisoires, ce qui est particulièrement insupportable quand les intéressés ont été licenciés ou reclassés avec une perte de salaire importante.

Rappelons que l’IPP est censée au moins réparer la "perte de capacité de gain".

La question de la réparation intégrale des maladies professionnelles (et des AT) reste donc au centre du débat et de la bataille judiciaire conduite actuellement par les adhérents de l’Andeva et leurs avocats.

La réactualisation du barème d’indemnisation est à l’étude : nous demandons que soient pris en compte d’une part la douleur et le retentissement sur la vie quotidienne, d’autre part le préjudice professionnel.

Des inégalités subsistent entre divers régimes

La réglementation a évolué pour les marins, avec le décret du 28 juin 99, mais elle demeure insuffisante : les taux d"IPP inférieurs à 10% ne sont pas indemnisés ; aucune possibilité n’est ouverte (si ce n’est la CIVI) pour une indemnisation des préjudices complémentaires puisque la faute inexcusable n’existe pas ; enfin le cumul de la rente MP n’est pas possible avec une pension de retraite anticipée.

La situation dans la fonction publique est pire et rien n’a encore bougé, ou presque : un projet de loi "relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations" comporte un article ouvrant droit à l’indemnisation des fonctionnaires retraités, victimes de maladies professionnelles.

Restera à déterminer les conditions de cette indemnisation, reste surtout à réformer complètement le système de reconnaissance et d’indemnisation des maladies professionnelles dans la fonction publique, qui est incohérent et très injuste.

Toutes les victimes ne sont pas indemnisées

La question des victimes "para professionnelles" (familles des salariés, contaminées par la poussière rapportée sur les vêtements) et des victimes "environnementales" reste entière. Les actions judiciaires se multiplient et devront forcer le passage à une indemnisation correcte de toutes les victimes de l’amiante.

Les pratiques de certaines caisses bafouent toujours les droits des victimes

Il est étonnant de continuer à constater la mauvaise volonté des caisses à appliquer l’esprit des textes (décret du 27 avril, circulaire CNAM sur la reconnaissance des mésothéliomes).

La vague massive de rejets de dossiers par des CPAM en juillet 1999 en est une belle illustration (voir article ci-contre).

On constate quotidiennement que de nombreux dossiers continuent à traîner, à être refusés malgré l’évidence de l’exposition et du diagnostic.

Un seul exemple : plus de 4 mois en Seine et Marne pour reconnaître un mésothéliome chez un salarié d’Everite déjà reconnu pour des plaques pleurales et qui venait de gagner en faute inexcusable devant le TASS !


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva N°6 (février 2000)