De 2014 à 2019, des travaux de rénovation ont été menés sans précaution particulière au Palais de justice de Cayenne en Guyane, alors que des agents, des avocats et des magistrats y poursuivaient leurs activités dans le bruit des marteau-piqueurs et les poussières des gravats.
En mars la Socotec a trouvé de l’amiante dans les revêtements dégradés des murs. Cette découverte a suscité la colère du personnel. Une trentaine de fonctionnaires et de magistrats ont exercé un droit de retrait.
Fermeture du tribunal
Le CHSCT a constaté que l’administration était incapable de garantir une absence de risque amiante. Il a légitimé le droit de retrait et s’est prononcé pour une délocalisation du tribunal.
Le 5 avril, le ministère de la Justice, en accord avec les autorités judiciaires locales, a décidé de fermer le tribunal et a ordonné des analyses plus complètes.
Magistrats, greffiers, avocats et fonctionnaires ont continué leurs activités dans des conditions très dégradées sur quatre sites différents.Des audiences se sont tenues dans le réfectoire d’une caserne ; trois juges pour enfants se sont partagé un seul bureau ; quatre juges d’instruction se sont fait héberger par la police et la gendarmerie ; le recours au télétravail s’est étendu.
« En deux mois, 60% à 70% des affaires sont tombées ou ont été renvoyées », a dit le président du tribunal.
Les demandes de l’expert
Le 10 mai, un expert judiciaire a rendu ses conclusions. Les mesures n’ont pas révélé de fibres d’amiante dans l’air. Il serait légalement possible de réoccuper le bâtiment. Mais il préconise par précaution un nettoyage des sols, des meubles et des dossiers. Son rapport révèle d’énormes carences : Le Dossier technique amiante (DTA), non remis à jour depuis 2006, est obsolète. Il n’y a eu aucun repérage de matériaux amiantés avant les travaux. Des ouvriers « ont été exposés aux fibres d’amiante » ; des personnels et des occupants du palais de justice sont « susceptibles de l’avoir été ».
L’expert a demandé une fiche individuelle d’exposition et un suivi médical pour tous les ouvriers des entreprises intervenantes et pour les personnels du Palais de justice « exposés ou susceptibles de l’avoir été », y compris après la retraite.
Danger grave et imminent
Après plusieurs mois de chaos, une solution semblait avoir été trouvée avec l’installation d’une partie du tribunal dans les locaux de l’ancienne école de gestion de la Chambre de commerce et d’industrie et d’une partie dans un immeuble en centre-ville. Mais, à quelques semaines de la rentrée, les syndicats ont été informés d’une réouverture partielle du tribunal de grande instance (TGI) dès le 1er septembre pendant les travaux de désamiantage et de réhabilitation, au mépris des engagements pris. Estimant que cette décision créait une situation de danger grave et imminent, ils ont alerté la maire et le préfet.