Ce que prévoit le projet du gouvernement

Martine Aubry a rendu public le projet qui devait être soumis à l’Assemblée Nationale au moment du vote de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. Nous ne connaissons pas encore le texte exact qui sera adopté. Voici, sous réserve de modifications, une première analyse du projet.

L’exposé des motifs, le projet de loi constate que " L’indemnisation forfaitaire des victimes de l’amiante au titre des maladies professionnelles est inférieure à celle qui peut être accordée par d’autres voies » (CIVI, actions en faute inexcusable de l’employeur devant le TASS, Tribunal de Grande Instance) « [...] certaines victimes de l’amiante ne disposent pas d’une couverture sociale contre le risque de maladie professionnelle" (artisans, victimes environnementales). Il indique que " la création du fonds d’indemnisation (..) répond au double objectif d’assurer l’indemnisation intégrale et de simplifier les procédures "


Le fonds d’indemnisation

C’est un établissement public national sous la tutelle des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget.


Comment est-il financé ?

Le fonds est financé par une contribution de l’État et par une contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale (c’est-à-dire par les cotisations des employeurs).

Le montant est fixé chaque année par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget. Pour la première année, le montant annoncé serait de 2 milliards (75% pour la branche AT-MP et 25% pour l’État).


Qui peut être indemnisé ?

Toutes les victimes de l’amiante : professionnelles et environnementales, et leurs ayants droit (régime général, fonctionnaires, marins, militaires, commerçants, artisans, non salariés).

Celles qui ouvrent un dossier (pour avoir une indemnisation), mais aussi celles dont la maladie a déjà été reconnue en maladie professionnelle (pour avoir un complément d’indemnisation).


Que faire pour être indemnisé ?

La victime ou ses ayants droit doit justifier de son exposition à l’amiante et de l’atteinte à son état de santé.

Elle n’a pas à prouver la responsabilité de quiconque, employeur ou industriel.


Quel est le rôle du Fonds d’indemnisation ?

Il instruit le dossier par tous les moyens qu’il juge nécessaires (enquêtes, expertises).

Il doit faire une offre d’indemnisation dans les 9 mois qui suivent la demande.

Il peut faire cette offre même si l’état de santé de la victime n’est pas consolidé.

Cette offre peut être réévaluée à la hausse en cas d’aggravation.


Comment l’indemnisation est-elle calculée ?

Le projet annonce une " réparation intégrale des préjudices corporels ".


Quelles actions en justice contre les employeurs ?

Le projet indique que " l’acceptation de l’offre vaut désistement des actions juridictionnelles en indemnisation en cours et rend irrecevable toute autre action juridictionnelle future en réparation du même préjudice " .

- Le fonds se substitue aux CIVI (Commissions d’indemnisations des victimes d’infraction) qui seront désormais interdites aux victimes de l’amiante ".
Les demandes d’indemnisation en cours d’instruction devant les CIVI à la date d’entrée en vigueur
de cette loi seront transmises au fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante. Quant aux procédures en appel ou en cassation concernant une décision de CIVI antérieure du vote de la loi, elles suivront leur cours.
- L’engagement d’une action en faute inexcusable de l’employeur devant le TASS (Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale) pour les victimes professionnelles, ou devant le TGI (Tribunal de Grande Instance) pour les victimes environnementales reste possible mais à condition de refuser l’offre du fonds d’indemnisation. Si la victime accepte cette offre, cela clôt les procédures en cours et interdit toute nouvelle procédure à venir. En cas d’échec d’une procédure en faute inexcusable, la victime pourra-t-elle s’adresser au fonds  d’indemnisation ? Le projet est ambigu sur ce point important.
- Les victimes de l’amiante conservent la possibilité d’engager des actions au pénal.


Quel recours contre les décisions du Fonds ?

Le demandeur dispose du droit d’action en justice contre le fonds d’indemnisation si sa demande d’indemnisation est rejetée, si aucune offre ne lui a été présentée dans les 9 mois ou s’il n’a pas accepté l’offre qui lui a été faite.


Le Fonds peut-il se retourner contre un employeur ?

Oui. Le projet précise que " le fonds est subrogé, à due concurrence des sommes versées, dans les droits que possède le demandeur contre la personne ou l’organisme responsable du dommage ". Cette possibilité existe. Reste à savoir si elle sera utilisée ...


Article paru dans le bulletin de l’Andeva N°7 (octobre 2000)