Il n’est pas rare de voir un malade humilié et traité comme un fraudeur sortir en larmes du cabinet d’un expert, avec l’impression d’être passé devant un tribunal.

 


ACCUSÉ, DÉSHABILLEZ-VOUS !

Examens hâtifs, non prise en compte des plaintes exprimées, minimisation systématique des préjudices...

« Je ne savais pas que c’était si important de mesurer la tension pour une maladie du poumon » , lance Mohamed, avec une ironie désabusée, à l’expert qui propose de lui prendre - pour la deuxième fois - la tension en guise d’examen clinique...

Fûmeur malgré lui

« Je lui ai bien dit que je ne fumais pas. Mais sur son compte rendu l’expert judiciaire a marqué : « fumeur ». Il a fallu que nous fassions appel à un deuxième expert pour rétablir la vérité » , explique Michel, un ancien d’Eternit Caronte à Port-de-Bouc.

« Si une victime demande réparation d’un préjudice sexuel, ils refusent en lui demandant d’apporter des preuves, sans tenir aucun compte de son handicap respiratoire ».

Des EFR "presques normales"

Saïd demande un relèvement de son taux d’IPP. Ses EFR montrent une fonction respiratoire très altérée.

L’expert n’en tient pas compte et lui fait passer d’autres EFR.

Avant de venir, Saïd avait pris un broncho-dilatateur (il a montré l’ordonnance).

Résultat : les EFR sont « presque normales »...

"Je faisais de la comédie"

Les mêmes réflexions reviennent chez tous ceux qui sont passés par là : « J’ai eu l’impression de passer devant un tribunal ... »« Quand je leur disais que j’avais des douleurs, ils réagissaient comme si je faisais de la comédie »« Ils me traitaient presque de menteur »...

Certains se permettent des réflexions incroyables : « Pour être vraiment sûr du diagnostic, il faudrait une autopsie » dit un jour l’un d’eux à une victime bien vivante devant lui.

Barème Sécu ? Connais pas...

Il existe un barème de Sécurité sociale opposable aux caisses qui définit des critères pour évaluer l’incapacité. Certains experts semblent ignorer jusqu’à son existence...

Le problème de l’expertise ne se limite pas à l’amiante. Il concerne l’ensemble des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Un jeune intérimaire atrocement brûlé par une irradiation accidentelle à Forbach, vient de se voir refuser pour la troisième fois une tierce personne pour l’assister à domicile.

Interpellée sur les raisons de ce refus inhumain la caisse primaire a répondu qu’elle suivait l’avis des experts...

Il ne s’agit pas d’abus commis par quelques individus isolés. C’est toute une institution qui est à revoir. A commencer par les liens plus que douteux entre l’expertise judiciaire et les sociétés d’assurance.


 

UNE INSTITUTION ENTIEREMENT A REVOIR

L’Andeva a proposé à la CNAM la création d’un groupe de travail sur l’expertise. Elle souhaite y participer. Elle propose :

- de limiter l’expertise aux cas ou elle a une justification médicale ;
- d’imposer aux experts le respect du barème de sécurité sociale  ;
- de limiter leur durée d’exercice à quelques années.
- un pneumologue ou un oncologue pour les maladies de l’amiante.
- de supprimer la notion de « séquelles non indemnisables » ;
- de créer une instance de recours pour les personnes qui s’estiment victimes de comportements ne respectant pas leur dignité ;
- de rembourser intégralement les frais de transport


 

DUNKERQUE :
L’Ardeva demande des comptes à l’expert... Il démissionne  !

On aurait pu l’appeler «  Monsieur Minimum ». Pour cet expert auprès des tribunaux les préjudices, ça n’existait pas... ou si peu. Chaque fois qu’on faisait appel à lui, il accordait des sommes ridicules.

L’association lui a rendu visite, pour lui ouvrir enfin les yeux sur ce qu’endurent les victimes de l’amiante et leurs proches...

Il a dû lire la lettre terrible d’une veuve racontant le calvaire insupportable des derniers mois de son mari.

Il a dû écouter des victimes parler de leurs souffrances physiques et morales, de leur qualité de vie rétrécie, de leur angoisse du lendemain.

Effondré, déstabilisé, il a dit qu’il n’était pas un salaud. Il pensait faire son travail consciencieusement.

Il a dit qu’il en tirerait les conclusions : il abandonne le métier d’expert pour l’amiante...


 

Appel à témoignage

LE GAULT ET MILLAU DE L’EXPERTISE

Un livre blanc fait par les victimes de l’amiante

Nous préparons un livre blanc sur l’expertise fondé sur l’expérience du réseau Andeva.

Il sera coordonné par Carine Toutain et Annie Thébaud-Mony.

Faites parvenir vos témoignages sur ces « passages à l’expert » qui portent atteinte aux droits et à la dignité des victimes de l’amiante.


Articles parus dans le bulletin de l’ANDEVA N°11 (septembre 2003)