Les premières indemnisations « Fiva » ont été perçues par les victimes de l’amiante. C’est à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle.

Une bonne nouvelle car sept ans de lutte et 3000 procédures judiciaires ont enfin permis d’ouvrir la voie d’une indemnisation rapide et intégrale pour toutes les victimes de cette catastrophe sanitaire, sans qu’elles soient obligées pour cela de se lancer dans une action judiciaire. C’est un progrès considérable.

Jusqu’ici, pour obtenir réparation de tous les préjudices, il fallait engager une action en faute inexcusable de l’employeur devant le tribunal des Affaires de Sécurité sociale. Ces actions judiciaires ont été le ciment de la construction de notre association. Elles étaient et restent encore un formidable moyen de démontrer la responsabilité des employeurs et de faire pression sur les pouvoirs publics. Il ne faut cependant pas oublier qu’elles sont inaccessibles pour de nombreuses victimes, soit parce qu’elles relèvent de régimes spéciaux de sécurité sociale, soit parce qu’elles ont été contaminées dans un cadre environnemental, soit parce qu’elles ne sont pas en mesure de démontrer que l’employeur a commis une faute, ou que la maladie leur a ôté les forces nécessaires pour s’engager dans une longue bataille judiciaire.

Mais ces premières indemnisations Fiva constituent aussi une mauvaise nouvelle, car les montants versés sont inférieurs à ce que les victimes étaient en droit d’attendre : à peine la moitié de ce que nous avons obtenu, en moyenne, devant les tribunaux.

C’est le résultat de la stratégie du gouvernement Rafarin qui a appelé le Medef à la rescousse au Conseil d’administration du Fonds pour avoir une majorité à sa main et voter un barème d’indemnisation à la baisse.

Le rapport d’activité du Fiva remis au parlement atteste de cette logique : « Le conseil, (.) doit en permanence rechercher la conciliation entre une juste réparation et le souci d’un financement durable » . Pour l’Andeva, cette politique est inacceptable. La réparation intégrale des préjudices des victimes de l’amiante, décidée par le législateur il y a quatre ans, ne reposait pas sur un compromis entre une estimation de leurs préjudices et ce qu’acceptent de payer les industriels. Ce n’est pas aux représentants des pollueurs de dicter le montant des indemnisations qu’ils devront verser.

Notre association, ses représentants au Fiva et ses avocats travaillent donc depuis plusieurs mois pour être en mesure d’aider les victimes qui contesteront la faiblesse de ces indemnisations en Cour d’Appel. Quant aux chefs d’entreprises ils doivent savoir que la création du Fiva ne mettra pas un point final aux actions en faute inexcusable de l’employeur.

La bataille pour une indemnisation juste et équitable n’est donc pas terminée.

Force est de constater le manque de considération de ce gouvernement à l’ égard des victimes de l’amiante. Ainsi qu’a-t-il fait pour faire appliquer la réglementation sur le suivi médical post-professionnel, au point mort depuis 10 ans ; pour débloquer les procédures pénales et permettre que les responsables soient traduits en justice ; pour relever l’allocation de cessation anticipée d’activité, à laquelle certains sont contraints de renoncer faute d’un revenu décent ; pour tirer les leçons de cette catastrophe et améliorer la prévention des risques professionnels ; enfin pour mettre en place la réparation intégrale pour tous les risques du travail ? Pourtant, plusieurs rapports officiels publiés récemment lui recommandent d’agir dans ces domaines.

Face à ce manque de volonté politique, la coopération et l’unité d’action entre l’Andeva, la Fnath et les organisations syndicales devra s’intensifier pour contraindre les pouvoirs publics à prendre en compte les revendications des victimes du travail.

Le président FrançoisDESRIAUX


Article paru dans le bulletin de l’ANDEVA N°11 (septembre 2003)