La discussion sur le barème d’indemnisation n’est pas qu’un débat technique. C’est un bras de fer entre les victimes qui demandent la réparation légitime de leurs préjudices, et les experts dupatronat et des assurances qui veulent payer le moins possible.

L’indemnisation accordée en routine par la sécurité sociale est une indemnisation forfaitaire, qui ne prend pratiquement en compte que le préjudice physique.

Pour obtenir davantage,les victimes de l’amiante n’avaient jusqu’ici d’autre choix que d’aller en justice devant le TASS : en cas de succès, la rente est majorée et les préjudices extra-patrimoniaux (notamment la souffrance physique et morale) sont indemnisés.

Plusieurs centaines de victoires judiciaires ont permis à certaines d’entre elles d’avoir des indemnisations plus équitables devant les TASS et les CIVI. En annonçant que le FIVA allait leur accorder une réparation intégrale de tous les préjudices, le législateur indiquait sa volonté de mettre fin à une situation anachronique où les victimes du travail, un siècle après la loi de 1898, étaient moins bien indemnisée que les victimes de la route ou du sang contaminé.

La logique voudrait donc que l’indemnisation par le FIVA prenne en compte les acquis du barème de la sécurité sociale sur l’évaluation et la réparation des séquelles physiques dues à l’amiante, et qu’elle prenne pour référence les meilleures décisions de justice pour l’indemnisation des autres préjudices, tels que le pretium doloris (prix de la douleur), ou le préjudice d’agrément.

Or on assiste à une offensive incroyable pour tirer les indemnisations vers le bas.

Acte 1 :
le barème sécurité sociale est bon à jeter aux chiens. On veut le remplacer par un « barème de droit commun » bricolé sur un genou dans des conditions obscures par des experts des assurances. Au mépris des données scientifiques ils proposent d’indemniser des maladies mortelles avec des taux de 15 à 60% (voir encadré) et des plaques pleurales à 0% sans tenir compte des données de l’épidémiologie sur la perte de capacité respiratoire ni de l’expérience quotidienne des victimes qui savent trop bien ce qu’elles ont perdu.

Acte 2 :  on explique que les juges ont « pété les plombs » en accordant par excès de sentimentalisme une réparation des préjudices extrapatrimoniaux trop favorable aux victimes. La réparation par le FIVA ne saurait donc plus se mesurer à l’aune des décisions de justice.

Nous le disons solennellement : les victimes n’accepteront pas de se laisser gruger par des professionnels de l’arnaque, qu’on a vu à l’oeuvre à Toulouse et ailleurs.


Article extrait du Bulletin de l’ANDEVA N°10 (octobre 2002)