Deux ans après le vote de la loi créant le FIVA, pas une seule victime de l’amiante n’a été encore complètement indemnisée par ce Fonds.

Compte tenu de l’espoir qu’avait suscité la perspective d’une réparation automatique, intégrale et surtout rapide par rapport à la lenteur des procédures judiciaires et à la débauche d’énergie qu’elle requiert, cette situation traduit une grande désinvolture de la société à l’égard de ceux qu’elle n’a pas su protéger.

Ce retard porte préjudice à plusieurs centaines de victimes qui n’ont pas d’autres recours que le FIVA pour être indemnisées.

En effet, depuis le 23 octobre 2001, date du décret signant la création officielle du Fonds d’indemnisation, les Commissions d’indemnisation des victimes d’infraction pénales (Civi) ne sont plus accessibles aux victimes de l’amiante. Et celles qui avaient leur dossier pendant devant ces Civi ont vu leur procédure s’arrêter net et leur dossier transmis au Fiva dans une certaine confusion. Depuis, elles n’ont d’autre choix que l’attente...

Au-delà de cette incurie des pouvoirs publics c’est au coeur des enjeux de l’indemnisation intégrale qu’il faut chercher les explications du retard à la mise en place du Fiva. Car derrière les mots, nos interlocuteurs ont une conception très particulière de la réparation.

Ceux qui ne comptent pas le temps des victimes comptent en revanche très bien les Euros... Pour eux, la réparation doit bien être intégrale mais il ne faudrait pas qu’elle coûte plus cher à la collectivité que la réparation forfaitaire. C’est en tout cas l’impression qu’ils nous donnent. Qu’il s’agisse de la Direction du Fonds, des responsables de la Direction de la Sécurité sociale au ministère ou du cabinet du ministre, tous nous resservent le même discours : le Fiva ne peut verser les mêmes indemnisations que celles obtenues ces derniers mois auprès des tribunaux jugées déraisonnables.

Et s’ils s’arc-boutent sur leur position, c’est parce que chacun a bien mesuré que ce qui se décidera pour l’amiante déterminera demain la réforme de la réparation intégrale pour tous les autres risques professionnels.

C’est donc une véritable bataille que nos représentants au sein du Conseil d’administration du Fiva doivent livrer. Une bataille technique, quand il s’agit de démontrer que le barème d’incapacité dela
Sécurité sociale est plus juste que le barème de droit commun, et qu’aucun préjudice ne doit être oublié. Mais aussi une bataille politique pour que les représentants des  organisations syndicales joignent leurs efforts à ceux des associations. Evidemment ce combat prend du temps. Et nous comprenons que cette nouvelle attente soit pénible.

Mais l’enjeu est suffisamment important pour que nous ne cédions pas sur l’essentiel : nous exigeons une réparation de tous les préjudices des victimes d’une catastrophe sans précédent, une réparation juste, une réparation digne. La partie n’est pas gagnée, car au-delà des risques professionnels, c’est à la réparation du dommage corporel que nous nous attaquons. Un domaine où règnent les compagnies d’assurances avec leurs pratiques et celles de leurs experts...

Mais nous aussi nous avons des atouts.

Les arrêts de la Cour de Cassation du 28 février qui ont confirmé la faute inexcusable des employeurs, ont donné lieu à d’autres décisions judiciaires favorables aux victimes.

Cela constitue un encouragement à poursuivre les procédures en indemnisation devant les tribunaux, pour que la Justice soit rendue.

Et puis, il nous reste la mobilisation de tous.

Tant que nous n’obtenons pas satisfaction d’une réparation juste et équitable, nous devons faire entendre notre voix. Par tous les moyens.



Article paru dans le bulletin de l’ANDEVA N°10 (octobre 2002)