UN IMPORTANT ARRET DU CONSEIL D’ETAT

La responsabilité des pouvoirs publics dans le drame de l’amiante est enfin reconnue

Cela ne diminue en rien celle des industriels qui ont multiplié les pressions sur l’Etat pour
retarder l’interdiction et prolonger l’utilisation d’un matériau qu’ils savaient cancérogène.

Le 3 mars 2004, statuant en section du contentieux, le conseil d’Etat a rejeté le pourvoi formé par le ministère de l’Emploi et de la Solidarité contre la décision de la cour administrative d’appel de Marseille.
Cette dernière avait, le 18 octobre 2001, confirmé la responsabilité de l’Etat français dans la contamination par l’amiante de quatre victimes.

Cet arrêt confirme qu’il y a eu de graves carences de l’Etat

Les attendus de cette décision sont sévères pour les Pouvoirs publics. Ils confirment la carence fautive de l’Etat :
- Il a tardé à légiférer pour protéger les salariés, compte tenu des connaissances scientifiques sur la dangerosité de l’amiante.
- Il ne s’est pas donné les moyens d’évaluer les risques par des études et recherches ;
- Il ne s’est pas donné les moyens de vérifier que les mesures décidées étaient réellement appliquées.

Le gouvernement doit en tirer toutes les conséquences

Dans un communiqué de presse commun, l’Andeva, le Comité anti-amiante Jussieu et l’association des accidentés de la vie (Fnath) se sont félicités de cette décision.
Les carences de l’Etat en matière de prévention des risques professionnels et de protection de la santé publique avaient déjà été mises en évidence dans deux rapports :
- celui de la Cour des comptes sur la gestion du risque accidents du travail et maladies professionnelles (février 2002) ;
- celui de l’Igas sur la prévention sanitaire en milieu de travail (février 2003).
Les trois associations ont demandé au Premier ministre, au ministre des Affaires sociales ainsi qu’à celui de la Santé, d’en tirer toutes les conséquences : la situation est inquiétante. Il y a urgence.
C’est une réforme d’ampleur du système de prévention des risques professionnels qui est à l’ordre du jour.

Pas question de blanchir les industriels responsables

Les avocats des employeurs essaieront d’utiliser ce jugement pour blanchir leurs clients. Ceux d’Eternit ont déjà commencé…Mais le Conseil d’Etat a pris soin de rappeler que les chefs d’entreprise ont l’obligation générale d’assurer la sécurité et la protection de leurs salariés.
La responsabilité de l’Etat n’enlève rien à celle des industriels de l’amiante qui ont milité pour retarder l’interdiction de l’amiante et prolonger l’utilisation d’un matériau qu’ils savaient cancérogène.
Elle ne diminue pas non plus celle des employeurs qui n’ont pas respecté leurs obligations de résultat en matière de sécurité et qui ont exposé leurs salariés sans les informer ni les protéger.


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva N°13 (juin 2006)