En mai 2010, la Cour de cassation a reconnu, pour la première fois en France, l’existence d’un préjudice d’anxiété
Ce préjudice est subi par des salariés non malades ayant été exposés à l’amiante et vivant de ce fait dans la crainte d’avoir une pathologie grave.
Ce fut une avancée considérable pour la prévention des risques professionnels.
Toutefois, jusqu’à l’an dernier, la Haute Cour réservait la reconnaissance de ce préjudice aux salariés ayant travaillé en tant que salariés d’un établissement inscrit sur une liste ouvrant droit à la « pré-retraite amiante » (Acaata).
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L’Andeva et ses avocats avaient maintes fois critiqué cette jurisprudence restrictive
Elle excluait en effet des salariés fortement exposés à l’amiante dans des établissements « hors liste ».
Elle excluait a fortiori tous les salariés qui avaient été exposés à d’autres produits dangereux susceptibles de mettre leur santé et leur vie en danger...
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L’an dernier, la Cour de cassation a rendu deux arrêts qui corrigent cette double injustice.
- Le 5 avril 2019, l’assemblée plénière de toutes les chambres a jugé « [qu’] un salarié exposé à l’amiante et ayant de ce fait un risque élevé de développer une maladie grave peut demander la réparation du préjudice d’anxiété», même s’il n’a pas travaillé sur un site reconnu «amianté».»
- Le 11 septembre 2019, l’assemblée plénière de la Chambre sociale a étendu cette reconnaissance aux salariés exposés à d’autres produits que l’amiante : « Tout salarié qui justifie d’une exposition à une substance nocive ou toxique générant un risque élevé de développer une pathologie grave peut agir contre son employeur pour manquement à son obligation de sécurité ».
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Ce revirement de jurisprudence est le résultat d’un long combat.
Avec une longue bataille judiciaire menée par des avocats tenaces et compétents ainsi qu’une mobilisation unitaire qui a rassemblé des organisations syndicales CFDT et CGT et des associations (Andeva, Cavam, Fnath).
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Quelles conséquences pratiques aura ce revirement de jurisprudence ?
1) Pour les personnes qui bénéficient (ou pouraient bénéficier) de l’Acaata
La situation ne change pas :
Elles doivent prouver qu’elles ont travaillé dans un établissement inscrit par arrêté sur les listes officielles pour faire reconnaître leur préjudice d’anxiété.
Le délai de prescription débute à la date de parution de cet arrêté (considérée comme la date de connaissance du danger).
2) Pour les expositions à l’amiante dans des établissements « hors liste » et pour les produits autres que l’amiante
Il faudra apporter :
- la preuve d’une exposition à une substance nocive ou toxique (amiante ou autres) présentant un risque élevé de maladie grave,
- la preuve d’un manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité qui lui incombe,
3) la preuve d’un préjudice personnellement subi par le demandeur.
Dans le cadre du droit commun, l’employeur pourra tenter de démontrer qu’il a rempli ses obligations de sécurité.
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Ce nouveau contexte pose des questions :
- Qu’est-ce qu’une substance « nocive ou toxique présentant un risque élevé de maladie grave ? »
- Quelle sera la durée du délai de prescription ?
- Comment dater la connaissance du danger (point de départ de ce délai) pour les établissements hors liste ?
- Sera-t-il mis fin à l’injustice dont sont victimes les dockers, pénalisés par une jurisprudence spécifique antérieure à 2019 ?
Les associations seront confrontées à de nouveaux défis :
Il faudra constituer des dossiers solides où l’exposition, la faute de l’employeur et le préjudice personnel seront bien documentés.
Un premier test important sera l’arrêt que rendra la cour d’appel de Douai le 29 janvier 2021 pour les dossiers de chacun des 727 mineurs lorrains des HBL.2
Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°64 (novembre 2020)