Comme nous l’avons vu, le Canada reste aujourd’hui le premier exportateur mondial d’amiante mais n’utilise pratiquement pas l’amiante chez lui, même si, comme tous les pays industrialisé, il a largement consommé l’amiante dans le passé. La politique de « prévention » du gouvernement canadien peut se résumer à deux actions :
- Financer l’Institut de l’Amiante (voir plus loin).
- Intervenir auprès des institutions internationales pour empêcher que les pays adoptent une politique de protection vis-à-vis des risques dus à l’amiante.

Les aspects peu reluisants
de la « diplomatie »
Canadienne :

- Suite à la publication du rapport INSERM en 1997, le parlement canadien avait tenté de discréditer ce rapport en commandant un rapport d’évaluation à l’Académie du Canada. La tentative a échoué : l’épidémiologiste choisi (qui n’était pas canadien… ) a conclu à l’excellente qualité du rapport INSERM.

- Le Canada a engagé une procédure auprès de l’OMC en 1998, pour tenter d’annuler le décret d’interdiction de l’amiante en France (effectif au 1er janvier 1997). L’OMC a rejeté les arguments du Canada, en première instance puis en appel, dans un rapport du 18 septembre 2000.

- Lorsque le Chili a annoncé son intention d’interdire l’amiante, le gouvernement canadien a exercé des pressions, usant de procédés indignes d’un pays comme le Canada. Là encore ces manœuvres ont échoué : la loi d’interdiction de l’amiante a été publiée au Diário Oficial da República do Chile le 13 janvier 2001.

- Récemment le gouvernement canadien est intervenu pour faire pression et empêcher l’affichage d’avis de dangerosité sur les chargements d’amiante à destination de pays d’Asie, dont la Thaïlande et la Corée du Sud.

- En 2004, date de la mise en œuvre de la Convention de Rotterdam, le Canada s’était opposé à la mise sur la liste des produits dangereux, à surveiller, de l’amiante chrysotile, avec succès cette fois. Le gouvernement a récidivé récemment en octobre 2006 (voir plus loin).

- En février 2007, le gouvernement canadien a appuyé et permis une initiative des industriels : l’envoi au nouveau directeur général de l’Organisation Mondiale de la santé (OMS) d’une lettre demandant de réévaluer la position de l’OMS concernant l’amiante chrysotile. Ce que demandent les 9 « scientifiques » signataires (D.M. Bernstein, J.A. Hoskins, C. McDonald, K. Donaldson, D.J. Paustenbach, Gibbs, F. Pooley, M. T. Espinosa Estrepo, R.C. Brown) est une prise de position innocentant l’amiante chrysotile. L’argument, d’un cynisme effarant, est que, « À défaut de reconnaître cette différence [entre amiante amphibole et amiante chrysotile] il est impossible de mettre en œuvre des mesures efficaces de protection de la santé et des travailleurs. (sic) »

- En 2007, le gouvernement canadien est intervenu (sans succès pour le moment) auprès du Sénat Américain pour tenter de bloquer un projet de Loi d’interdiction de l’amiante aux Etats-Unis (l’usage de l’amiante est très restreint aux Etats-Unis mais pas interdit, voir la page « nouvelles internationales »).
Le gouvernement fait donc sienne la position de l’industrie minière de l’amiante ; il a cependant quelques difficultés à justifier cette position et est de plus en plus critiqué au Canada même. On peut cependant lire dans un rapport récent d’une commission parlementaire le discours suivant :
« On a souligné au Sous-comité que l’industrie canadienne du chrysotile déploie de grands efforts pour garantir une livraison sécuritaire de son produit à ses clients de toute la planète. Le chrysotile est ainsi placé dans des sacs hermétiquement fermés sur lesquels figurent des instructions claires quant à la façon d’utiliser le produit de façon sécuritaire. D’autres mesures sont aussi prises à l’étape de la réception du produit pour s’assurer de ne pas compromettre la santé et la sécurité des travailleurs des pays importateurs ».
Traduisons : les sacs sont hermétiquement fermés ; tant que l’amiante voyage du Canada vers les pays consommateurs d’amiante, il n’y a pas de risque. Les parlementaires, tout comme les industriels, se gardent bien de préciser ce qu’il convient de faire pour se protéger, une fois les sacs ouverts !

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Article paru dans le bulletin de l’Andeva n°24 (septembre 2007)