Comme les défenseurs du tabac, l’Institut du chrysotile canadien assure la promotion mondiale d’un
matériau dont il connaît le pouvoir cancérogène.
Avec la même énergie, la même mauvaise foi et des méthodes similaires de propagande et de corruption...

 


P comme… Propagande

- Chrysotile : un ami qui vous veut du bien

L’Institut de Chrysotile s’évertue à convaincre l’opinion publique et les décideurs que l’amiante chrysotile n’est pas si dangereux que ça. Son discours s’adapte au public. Devant les organismes internationaux, ils nuancent en disant que la toxicité du chrysotile est moins marquée que celle des amphiboles et sèment le doute en expliquant qu’il existe une controverse.
Lors de conférences destinées à promouvoir le commerce de l’amiante canadien dans des pays en voie de développement, les mensonges se font plus grossiers. Il y aurait deux sortes d’amiante : la mauvaise (les amphiboles) et la bonne (le chrysotile), décrit comme inoffensif, voire bénéfique.
Devant l’accumulation de preuves épidémiologiques sur la cancérogénicité de toutes les variétés d’amiante, les canadiens soutiennent que c’est la présence de « contaminants » (sic !) parmi les fibres canadiennes qui pourrait être à l’origine des cancers (dont ils ne peuvent plus nier l’existence). Thèse raillée impitoyablement par le professeur Egilman dans un article publié en 2003 dans le Journal américain de médecine industrielle.

- La fiction de « l’usage sécuritaire » 

L’Institut du Chrysotile prétend que les canadiens ont appris à contrôler les risques du chrysotile et peuvent faire bénéficier le reste de la planète de ce savoir. Mais il se garde bien de définir ce qu’il entend par « usage sécuritaire », et quelles mesures concrètes cela recouvrirait pour les producteurs et pour les utilisateurs.
Il omet aussi de dire que le Québec se situe au quatrième rang mondial pour la mortalité par mésothéliome.
Il présente l’amiante-ciment comme un matériau sans risques pour la santé humaine, les fibres restant encapsulées dans le ciment.
En fait la dégradation du matériau libère des fibres en quantité, et les risques, sont confirmés par les études épidémiologiques et par les recommandations de l’OMS, qui préconise des substituts à l’amiante-ciment.
Comme le rappelle le Journal de l’association médicale Canadienne dans
un article paru en octobre 2008, « Prétendre, pour le Canada, que l’Inde, la Thaïlande et l’Indonésie peuvent réussir à gérer l’amiante en toute sécurité lorsque les pays industrialisés ont échoué, c’est fantasmer ».

- Les pressions sur les
pays en développement

Après l’interdiction de l’amiante en Europe, le Canada et les autres pays producteurs se retournèrent vers l’Amérique du Sud et l’Asie. L’Institut du Chrysotile y poursuivit sa propagande mensongère.
Le Canada a l’image d’un pays respectueux des droits de l’homme. Mais certaines méthodes utilisées sont sordides.
En avril 2001, Denis Hamel – alors directeur de l’Institut de l’amiante – intervient auprès du ministre du travail brésilien pour demander des sanctions contre Fernanda Giannasi, courageuse inspectrice du travail, trop zélée à son goût dans la protection des travailleurs contre l’amiante. A cette époque, elle reçoit des menaces de mort et doit vivre plusieurs mois sous protection policière.
A la veille de l’interdiction de l’amiante au Chili, l’Institut fait pression sur Michelle Bachelet, ministre du travail, aujourd’hui présidente de la République...
L’Institut intervient auprès de la Thaïlande pour la décourager d’étiqueter l’amiante comme produit dangereux.
Après le tsunami meurtrier de 2004 en Asie, l’Institut s’oppose à un plan d’aide au nettoyage des débris contaminés par l’amiante. Attirer l’attention sur les dangers de l’amiante aurait été inopportun...

 


C comme… Corruption

- La corruption des études scientifiques

Financé par l’Etat et les industriels canadiens de l’amiante l’Institut du Chrysotile dépense des dizaines de millions de dollars dans le seul but de prolonger le commerce international de l’amiante.
Aujourd’hui l’Institut recrute des scientifiques miteux aux qualifications douteuses pour innocenter cet amiante.
Bernstein, « expert » favori de l’Institut du Chrysotile, n’est ni médecin ni épidémiologiste.
Auteur de petites expériences sur les rats et de discours sur la biopersistance, il est moins bavard quand l’avocat d’une victime l’interroge sur le financement de ses études... (voir p. 40).
Bridle, que l’Institut présente comme « la plus grande autorité mondiale dans la science de l’amiante », fut quarante ans marchand d’amiante, au Royaume-Uni.
Il n’a aucun des diplômes qu’il invoque et n’a jamais publié un article scientifique.
Il a été condamné en Angleterre pour entorse à la législation sur l’amiante et fausses qualifications.

- La corruption des organismes internationaux

L’Association Internationale de l’Amiante obtient que la directive européenne amiante de 83 soit atténuée.
Le Comité permanent amiante et l’Institut de l’Amiante canadien se vantent d’avoir bloqué l’interdiction de l’amiante par la communauté européenne au début des années 90.
Les industriels canadiens influencèrent longtemps le Bureau International du Travail (BIT) et placèrent leurs « experts » auprès de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), obtenant ainsi une position tiède sur l’amiante. Ces deux organismes sont sortis du piège et recommandent aujourd’hui le remplacement de l’amiante et son interdiction.
Mais l’Institut du Chrysotile n’a pas renoncé : en février 2007 des « experts » comme Bernstein et McDonald écrivent au nouveau directeur général de l’OMS, pour lui demander de réévaluer la position de l’OMS et d’innocenter l’amiante chrysotile, au nom de la « santé des travailleurs » (sic).

- La corruption du gouvernement canadien
des organismes internationaux

Les relations incestueuses entre les industriels de l’amiante canadien et le gouvernement canadien font qu’il est parfois difficile de distinguer l’auteur et l’instigateur.
L’Institut du Chrysotile a téléguidé les interventions du gouvernement canadien auprès de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) pour tenter d’empêcher l’interdiction de l’amiante en France. Ce fut un échec.
Il intervint avec succès auprès de l’ONU, en 2004, 2006 et 2008, pour saboter la convention de Rotterdam, bloquant l’inscription de l’amiante chrysotile sur la liste des produits dangereux. Les pays producteurs d’amiante obtinrent ainsi un feu vert de la Convention pour exporter des produits à haut risque, sans informer les utilisateurs du danger.


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°29 (avril 2009)