Le Bulletin de l’Andeva ouvre ses colonnes aux associations signataires de la lettre au Président de la République. Au-delà de leurs différences toutes veulent défendre l’indépendance de la Justice. remise en cause de l’indépendance de la Justice.

(déclarations recueillies par Léa Veinberg)

 

 


Elsa COHEN (CSF) « Le risque d’une Justice lointaine, sans garantie d’indépendance, une justice inégale et partiale »

Pour Elsa Cohen, secrétaire confédérale, en charge de l’économie et de la consommation :
« Notre Association familiale qui défend les victimes a un champ d’action transversale ; elle intervient dans tous les aspects de la vie quotidienne, éducation, environnement et consommation.

Au delà des aspects techniques, que peut avoir la justice, notre mot d’ordre c’est la proximité.

Or, ce projet de loi de suppression du juge d’instruction ne fait qu’accentuer et amplifier cette dimension d’une justice lointaine et sans garantie d’indépendance, une justice inégale et partiale dont les citoyens risquent de se détourner.

Les mesures les plus urgentes, en matière de justice, seraient davantage de faire en sorte que chaque citoyen puisse avoir accès à une aide juridictionnelle, de promouvoir plus de collégialité. Le projet de réforme de suppression du juge d’instruction ne risque que de semer de la confusion et d’éloigner encore d’avantage les citoyens des institutions. » 

 


Guillaume Denoix de Saint Marc (AfVT) « La tentation est grande pour la sphère politique d’intervenir dans les dossiers de la Justice »

« Avec la disparition du juge d’instruction, la crainte que nous avons, c’est que l’indépendance de la justice ne soit plus évidente. Dans les affaires de terrorisme, l’Etat est très souvent impliqué. La tentation est grande pour la sphère politique d’intervenir dans les dossiers de la justice. Les victimes ont souvent le sentiment que l’on tente de leur cacher des informations, la raison d’État n’est jamais très loin. C’est pour cela qu’il faut un maximum de transparence, et la disparition du juge d’instruction ne peut que renforcer ce sentiment d’influence du politique sur la justice et jeter le discrédit, aux yeux des victimes, sur cette justice. » 

 


Le collectif inter-associatif sur la santé (CISS) « La suppression du juge d’instruction risque de réduire l’indépendance de la Justice et l’accès au droit »

« La suppression du Juge d’Instruction risque de réduire l’indépendance de la justice et l’accès au droit.

Dans le domaine qui est celui du CISS, réduire l’indépendance de la justice pose par exemple problème lorsque des affaires de santé publique mettent en cause des instances de l’État qui ne pourraient être confiées à des procureurs, statutairement sous la hiérarchie du ministre de la Justice. La réduction de l’accès au droit est à envisager du fait que le juge d’instruction est le garant d’une justice pénale gratuite. Il n’est pas dépendant de la notion de coût d’une instruction, par exemple en matière de mesures d’expertise qu’il ordonne, contrairement au procureur tenu de rendre compte à la hiérarchie et donc lié à des critères budgétaires notamment.

Dans le contexte de la révision générale des
politiques publiques (RGPP), on imagine aisément les implications concrètes que cette réforme pourrait avoir sur la qualité de l’instruction, après les fermetures de tribunaux de grande instance ou d’instance. »

 


Jean-Marie BARBIER (APF) « Le projet de réforme de la procédure pénale est inacceptable »

« Pour l’Association des paralysés de France (APF), le projet de réforme de la procédure pénale visant à supprimer le juge d’instruction est inacceptable !
La défense du droit des victimes est primordiale et cette réforme risquerait de pénaliser ces dernières.

Le juge d’instruction, garant de l’indépendance de la justice ne peut être remplacé par le procureur, qui est lui, rattaché directement au ministère de la justice. »

 


Raymond LEOST (FNE) « En matière d’environnement, rares sont les parquets qui mettent en cause de grands groupes industriels »

Pour Raymond Leost, responsable juridique de France nature environnement, « Le maintien du juge d’instruction est indispensable dans les affaires de trafics, de commercialisation de pesticides, de produits chimiques non autorisés. Dans le cas de transport de déchets d’espèce animale et végétaux, de violation de convention de Washington, dans le cas de pollution des milieux naturels particulièrement complexes, ce sont les juges d’instruction qui ont l’indépendance nécessaire pour mener les enquêtes nécessaires. En effet, rassembler les preuves nécessaires, dans les affaires environnementales, souvent extrêmement complexes, demande du temps, et des moyens.

Et, en matière d’environnement, rares sont les parquets qui mettent en cause de grands groupes industriels. C’est pour cela que l’on a besoin d’une instruction indépendante du pouvoir politique. Or, avec la suppression du juge d’instruction, ce qui risque d’arriver, c’est que les dossiers n’avancent plus. »

 


Sandrine ROLLOT (AFPric) « L’indépendance du Juge d’instruction par rapport au pouvoir politique est un principe primordial » dans la Justice »

« Pour l’Agence française des Polyarthritiques et des Rhumatismes inflammatoires chroniques(AFPric), l’indépendance du juge d’instruction par rapport au pouvoir politique est un principe primordial de la justice, qui garantit une instruction à charge et à décharge, même lorsque la responsabilité des pouvoirs publics est mise en cause, ce qui est souvent le cas dans des dossiers de santé publique.

Les patients que je rencontre dans le cadre du service de protection juridique de l’association, hésitent souvent à saisir la justice, même quand ils sont convaincus de leurs bon droit, par crainte des procédures longues, onéreuses et parfois jugées hasardeuses du fait de l’image « du pot de terre contre le pot de fer ».

Ce projet de suppression du juge d’instruction ne fera que renforcer ce manque de confiance dans la justice.

 


Luc SZCZEPANIAK (FGPEP) « Le risque est grand de voir exposées les populations les plus vulnérables »

Pour Luc Szczepaniak, Directeur général de la Fédération Générale des PEP (FGPEP),

« Notre association s’occupe de populations défavorisées et victimes de toutes les formes d’exclusions possibles qu’elles soient dues à la pauvreté ou aux handicaps.
Le risque est grand, avec la disparition du Juge d’Instruction de voir exposées les populations les plus vulnérables.
Déjà, aujourd’hui, dans un contexte de « tout sécuritaire », c’est souvent le cumul des éléments à charge qui est privilégié.
Il n’y a que le juge d’instruction qui puisse prendre en compte la réparation et la prévention dans l’instruction.
Et la collégialité serait
une garantie supplémentaire. »


Article paru dans le bulletin de l’andeva n°32 (mars 2010)