Monsieur You, un ancien des chantiers navals de la Pallice, est mort de l’amiante. Madame Dubois, sa fille, est allée à Amiens, avec son mari et quatre membres de l’Addeva 17, pour demander à la cour nationale de l’incapacité (la Cnitaat) le relèvement du taux d’IPP attribué du vivant de son père. L’audience fut éprouvante. Jacques Sourie témoigne.

« La maladie de Monsieur You a été reconnue en 2005 par la CPAM de Charente maritime : « plaques pleurales sans retentissement respiratoire (tableau 30 B) ». Elle a fixé le taux d’incapacité permanente partielle (IPP) à 5% : un taux très sous-estimé, au vu de sa situation médicale. Il était atteint de plaques pleurales calcifiées très étendues formant une gangue autour du poumon. Il avait aussi des épaississements diffus de la plèvre viscérale, avec des répercussions importantes sur le poumon.

Il contesta ce taux de 5%. La CPAM lui proposa de le porter à 20%.
Mais on était encore bien en dessous du barème Sécurité Sociale !
La gravité de son état était confirmée par ses explorations fonctionnelles respiratoires (EFR). Sa capacité pulmonaire totale (CPT) était réduite à 31% de la valeur théorique et son volume expiratoire maximal par seconde (VEMS) à 46%. Or le barème précise qu’une CPT de 31% (insuffisance respiratoire chronique sévère) doit déterminer un taux d’IPP de 100% !
Après son décès, sa fille a continué la contestation des 20% devant la Cour nationale de l’incapacité.

A l’audience, l’avocat de la CPAM était absent. Le médecin expert ignora la CPT (essentielle pour fixer le taux d’IPP), et s’attarda sur des pathologies sans lien avec l’amiante et sans incidence sur la CPT.

En l’absence de la Cpam, le Président laissa Madame Dubois choisir entre deux solutions :
- soit la CPAM est condamnée à fixer un taux de 20%.
- soit le taux reste à 5% et la procédure médicale reprend à zéro, avec le risque d’obtenir moins de 20%.

Il lui laissa 10 minutes de réflexion.

J’ai voulu expliquer pourquoi le taux de 20% était trop bas, en reprenant le mémoire du docteur Privet. On m’a coupé la parole...

Madame Dubois a choisi la première solution. Elle a eu le sentiment d’avoir été trahie par la caisse de Charente Maritime, qui ne s’est pas déplacée.

Son père a perdu la vie par la faute d’un employeur qui lui a menti sur les risques. À son décès s’ajoute l’humiliation de ses ayants droit par le parti pris des experts médicaux et le comportement méprisant de la caisse primaire.

Les victimes disent : stop !"

Jacques Sourie
(Addeva 17)

___________________________________________

Article paru dans le bulletin de l’Andeva n°33 (août 2010)