La douleur est une donnée subjective que l’on ne peut évaluer que d’une façon indirecte. C’est pour cela que certains médecins conseils et certains experts n’en tiennent pas compte. Ils ont tort, car c’est un symptôme majeur en médecine.


 

Les douleurs dues aux maladies de l’amiante

 pleuroscopie (intro-duction d’un fibroscope entre les deux feuillets de la plèvre) ,
- thoracotomie exploratrice (ouverture chirurgicale de la cage thoracique pour aller explorer la plèvre),
- décortication pulmonaire (ablation de la plèvre devenue une gangue fibreuse, pour libérer le poumon),
- lobectomie (ablation d’un lobe pulmonaire) ou pneumectomie (ablation d’un poumon) dans le traitement chirurgical d’un cancer du poumon.

Docteur Lucien Privet


 

Le barème de la Sécurité sociale

L’indemnisation des douleurs thoraciques est traitée dans le barème maladies professionnelles , au paragraphe 6.8.2 intitulé «  Syndrome douloureux thoracique », avec la mention notamment des « fibroses pleurales » et des « séquelles post-opératoires ».

Il prévoit un taux d’IPP (incapacité permanente partielle) de 1 à 5 % quand il est isolé.

Quand il est associé à une déficience fonctionnelle respiratoire, il prévoit une majoration de 1,2 du taux attribué pour la déficience.

En fait, le barème ne prend pas en compte suffisamment l’importance de la douleur et, dans la mesure où il reste indicatif, il ne faut pas hésiter à revendiquer plus, en motivant bien sûr la demande.

Pour avoir un ordre d’idée, des taux d’IPP de l’ordre de 10 à 15 % ne sont pas extravagants quand les phénomènes douloureux sont importants.
Pour finir, dans le cas du cancer du poumon en rémission complète où le taux d’IPP plancher prévu par le barème maladies professionnelles (paragraphe 6.6.1) est de 67 %, l’existence de douleurs post-opératoires doit donner lieu à une majoration du taux de base.


 

Comment évaluer la douleur ?

Des échelles d’évaluation de la douleur ont été mises au point, surtout pour évaluer l’efficacité des traitements antalgiques. La plus utilisée, et aussi la plus fiable, est l’échelle visuelle analogique (EVA).

Il s’agit d’une réglette avec d’un côté une ligne sur laquelle le patient place le curseur selon l’intensité de la douleur qu’il ressent, de « pas de douleur » à « douleur insupportable » et de l’autre côté une graduation permettant de donner une note correspondante (0 à 100).


 

Comment peut-on prouver qu’on a mal ?

Il y a différents moyens d’évaluer la douleur.

Situer son intensité sur une échelle de zéro à dix

Dans la pratique, le médecin demande à la victime de chiffrer l’intensité de la douleur qu’elle ressent sur une échelle de 0 à 10 (voir page suivante), après l’avoir interrogée sur ses caractéristiques : localisation et trajet, caractère permanent ou non, circonstances où elle est augmentée ou diminuée, description (décharge électrique, brûlure …) etc …

Les différentes classes de médicaments

En fait, la preuve indirecte mais tangible que la victime a mal, c’est qu’elle prend des médicaments contre la douleur.

Sans entrer dans le détail des mécanismes de la douleur, on distingue deux types de douleurs :

1. les douleurs liées à la mise en jeu des récepteurs de la douleur dont est truffé l’organisme

2. les douleurs liées au dysfonctionnement des circuits et des centres nerveux de la douleur (douleurs neuropathiques).

En fait, la distinction n’est pas toujours facile en réalité et c’est un peu en tâtonnant que les médecins prescrivent soit des antalgiques classiques, que l’Organisation mondiale de la santé a classé en 3 paliers (voir encadré ci-dessous) soit des médicaments à visée neuropathique comme Neurontin (générique : gabapentine), Lyrica (générique : prégabaline) …

Quelles preuves apporter au dossier ?

Pour prouver la prise médicamenteuse, nous recommandons de verser au dossier un certificat médical attestant de la prescription et trois ordonnances espacées dans le temps.

En fait, l’idéal serait que la victime, qui souhaite faire indemniser les douleurs qu’elle ressent, consulte dans un Centre anti-douleur et produise des écrits de spécialistes (la liste des Centres anti-douleur est disponible sur internet).

L.P.


 

Médicaments antalgiques : Les trois palliers de l’OMS

L’Organisation mondiale de la santé a défini trois niveaux dans les anti-douleurs :

Palier 1 : paracétamol, aspirine, anti-inflammatoires non stéroïdiens.

Palier 2 : (morphiniques mineurs) : codéine, tramadol,
dextropropoxyphène (bientôt interdit).

Palier 3 : (morphiniques majeurs) : morphine, hydromorphe,
fentanyl, oxycodone

(* Nous ne citons que les génériques, les noms commerciaux étant trop nombreux.)


 

Un caillou dans sa chaussure

Sur sa plèvre pariétale, au niveau du diaphragme, une victime de l’amiante a une énorme plaque pleurale calcifiée de 6 centimètres de long, une sorte de gros caillou qui lui fait mal.

Au TCI, l’expert nie l’existence de ces douleurs.

Le médecin qui défend la victime le prend à partie : « A-t-il déjà marché avec un caillou dans sa chaussure ? Qu’il dise quelle impression cela fait ! »



 

Indemniser la douleur

Si la caisse primaire ne tient pas compte de la douleur, il faut contester sa décision

L’existence des lésions liées aux différentes maladies liées à l’amiante est incontestable puisqu’elles sont mises en évidence au scanner. Leurs répercussions sur le fonctionnement du poumon sont également incontestables puisqu’elles sont évaluées par les explorations fonctionnelles respiratoires.

Par contre apporter la preuve de l’existence de douleurs liées à ces maladies est plus délicat. Cela entraine une sous-estimation du phénomène et par là-même une sous-estimation dans l’indemnisation.

Si le taux d’incapacité donné par la caisse primaire ne tient pas compte de la douleur, il faut le contester devant le tribunal du contentieux de l’incapacité (TCI) et demander qu’il soit relevé.

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Article paru dans le bulletin de l’Andeva n°34 (janvier 2011)