Le 21 janvier 2011 la cour a rendu un arrêt salué aussitôt par des déclarations triomphantes des défenseurs de l’amiante chrysotile canadien qui y ont vu une prise de position contre l’interdiction de l’amiante. La réalité est toute autre.

Les compétences de la Cour Suprême de l’Inde regroupent en gros celles de la Cour de Cassation, du Conseil d’Etat et du Conseil Constitutionnel en France.

Un recours avait été déposé en 2004 pour demander l’interdiction de l’amiante.

A l’appui de sa demande, le requérant soutient que l’absence d’interdiction de l’amiante est contraire à la constitution. Il indique des milliers de travailleurs manipulent de l’amiante sans protection et que les victimes ne bénéficient ni de traitement médical approprié, ni de compensation.

La cour a rejeté sa demande et s’est déclarée incompétente.

Elle a considèré que « la question de l’interdiction de l’amiante est du ressort du pouvoir législatif » et que, de surcroît, « un projet de loi bannissant l’amiante est actuellement en discussion au parlement »

Mais, loin de se désintéresser de la question, elle a adressé des recommandations au pouvoir législatif.

Elle rappelle sa propre jurisprudence de 1995 sur les dangers de l’amiante et cite un attendu du projet de loi présenté au parlement précisant « qu’il y a un besoin urgent d’interdire complètement l’importation et l’utilisation de l’amiante dans le pays »
Elle ajoute que « le gouvernement au-delà du projet de loi en discussion doit prendre des mesures effectives pour prévenir les effets de l’amiante. »

Vu le danger, elle mande et ordonne :

- que le gouvernement s’assure que sa jurisprudence de 1995 soit strictement appliquée,

- que l’Union et les états revoient leurs procédures de protection pour l’exploitation et l’exposition passive à l’amiante et promulguent des normes renforcées dans les 6 mois suivant la publication de l’arrêt,

- que soit mis en place un organisme de contrôle des industriels de l’amiante.

- que la question de la sécurité soit soigneusement examinée et confiée à des experts indépendants avant toute autorisation de nouvelle installation industrielle.

En conclusion

Cet arrêt rejette un recours juridiquement peu étayé, qui tentait de démontrer que la non interdiction de l’amiante était inconstitutionnelle parce que contraire aux libertés publiques. Mais, dans le même temps, il invite le gouvernement à compléter le projet de loi d’interdiction complète de l’amiante par des mesures de prévention supplémentaires. Il fournit ainsi des clés permettant à un recours de prospérer s’il prenait l’envie au gouvernement d’enterrer ce projet de loi. Il doit donc être lu comme une défaite des industriels de l’amiante.

Le jugement de la Cour suprême et le projet de loi sont sur le site
de l’Andeva : andeva.fr


Article paru sur le bulletin de l’Andeva n°35 (avril 2011)