La déconstruction du Comptoir des Minéraux et matières premières est terminée. Les enfants de l’école voisine vont réintégrer leurs classes. L’histoire des maladies et des décès dus à cette usine n’est malheureusement pas terminée.

ENFIN !

Pendant un demi-siècle, à Aulnay-sous-Bois, le Comptoir des minéraux et matières premières a broyé des centaines de tonnes d’amiante en plein quartier résidentiel, à quelques dizaines de mètres d’une école.
La bataille a été engagée par Gérard et Nicole Voide, suite au décès de Pierre Léonard, contaminé en allant à l’école, mort d’un mésothéliome à 49 ans en 1996.
Un collectif d’associations s’est créé avec le collectif des riverains du CMMP, Aulnay-Environnement, les parents d’élèves, Ban Asbestos et l’Addeva 93.
Elles ont recensé 113 victimes professionnelles et environnementales. Plus de 50 décès et une trentaine de mésothéliomes - maladie rare - connus à ce jour !
Les associations réclamaient depuis des années une déconstruction de l’usine sous confinement extérieur, une recherche active des victimes par les pouvoirs publics et un suivi médical pour les anciens salariés et les riverains de volontaires.
La déconstruction est achevée. Pour le reste, le combat continue.


L’usine-poison a disparu

La maîtrise d’oeuvre a été assurée par la SETEC, la maîtrise d’ouvrage par la mairie qui a fait le choix de racheter le terrain.

Un exploitant irresponsable

Les associations se sont heurtées à l’ancien exploitant sur le choix du mode opératoire. Il prétendait que le site avait été dépollué en 1991 et qu’un simple dépoussiérage suffirait. On a retrouvé de l’amiante en quantité dans plusieurs bâtiments et dans le sol, ainsi que du zircon radioactif !
Il proposait de démolir l’usine à l’air libre, à côté de l’école maternelle. Les associations ont obtenu que les élèves déménagent dans des locaux provisoires et que le chantier ait lieu sous confinement extérieur étanche à l’air et à l’eau.

Une dalle sur toute l’étendue du site

Les bâtiments ont disparu. Une couche de terre superficielle de quelques dizaines de centimètres a été retirée sur le site, mais tout l’amiante présent dans le sol n’a pas été enlevé.
A l’origine était prévu un géotextile recouvert d’une couche de terre saine. Les associations ont dit leur crainte qu’il soit dégradé par la végétation et les rongeurs. Elles ont demandé que soit coulée sur tout le site une dalle de béton, qui soit une véritable barrière physique entre le sous-sol et la couche de terre saine. C’est cette solution qui a finalement été retenue.
Malgré l’inconfort des locaux scolaires provisoires, les parents d’élèves ont insisté pour que la réinstallation de l’école ne se fasse qu’après la fin des travaux.

Penser aux générations futures

Les associations ont demandé que la mairie et la préfecture édictent des restrictions d’usage (interdiction de creuser des fondations ou un parking). Le maire s’est engagé. Elles ont aussi demandé que soit érigé sur le site un monument à la mémoire des victimes de l’amiante du CMMP. Elles ressentent aujourd’hui à la fois une légitime fierté du travail accompli et l’amertume de n’avoir pas encore réussi à imposer que le pollueur assume ses responsabilités financières et pénales.


Un dispositif de santé publique peut et doit être mis en place autour du site

Un rapport du Giscop 93 démontre la faisabilité d’une recherche active de personnes ayant été exposées dans et autour de l’usine afin qu’elles puissent bénéficier d’un suivi médical et faire valoir leurs droits.

Le 8 février 2013 a été présenté au siège de l’Agence régionale de Santé d’Ile-de-France (ARS) un rapport du Groupement d’intérêt scientifique Giscop.

Dans un communiqué du 25 février, les docteurs Marc Mathieu, pneumologue à l’hôpital Robert Ballanger, le docteur Maurice Allouch, directeur du Comité de pilotage, les quatre associations, le maire d’Aulnay et son adjointe à la santé ont salué la qualité de cette étude, qui « montre qu’il est possible de retrouver les cohortes de personnes ayant pu être contaminées par les poussières d’amiante dues à l’exploitation de cette usine implantée en plein centre ville durant des décennies. C’est indispensable pour qu’elles puissent bénéficier d’un suivi médical et pour que les malades et les familles de personnes décédées puissent faire valoir leurs droits. »

Ils estiment qu’il est important «  de rendre enfin visible les conséquences de cette véritable catastrophe sanitaire »
Ils insistent sur « la priorité à donner à la recherche des personnes à partir des registres des élèves des 3 écoles voisines de l’usine particulièrement exposées par leur proximité et la circulation des camions transportant l’amiante sur le chemin des écoles ».
« L’étude a évalué la zone de dispersions des poussières d’amiante. Elle a géolocalisé les pathologies recueillies depuis 13 ans par les associations » et souligné « les répercussions de la co-exposition et l’effet multiplicateur de l’amiante, du zircon (radioactif) et de la silice ».

Les auteurs de ce communiqué précisent qu’ils «  demanderont audience à Monsieur Évin et à Madame la Ministre de la Santé afin que soit mis en place dans les plus brefs délais, un dispositif de recherche active et d’accueil pluridisciplinaire capable d’assurer le suivi post-exposition des populations concernées et la recherche des malades, selon les préconisations de l’étude  ».

Ils demandent à l’ARS de mettre en ligne cette étude sur Internet.


Article paru dans le bulletin de l’Andeva n°42 (avril 2013)