L’association s’est créée en janvier 2007, pour répondre aux demandes des salariés de l’usine Deville sur la cessation anticipée amiante.
Elle a parcouru beaucoup de chemin depuis, dans une région où l’amiante a fait d’énormes ravages.
Claude Huet, son président, nous explique les combats de l’Addeva.
« La création de l’association a permis de rattraper des dossiers anciens de victimes qui n’étaient pas informées de leurs droits »
Comment s’est créée l’association ?
Claude Huet : J’ai été alerté par une déléguée de l’usine Deville, dont les salariés n’avaient pas été informés qu’ils avaient droit à la cessation anticipée d’activité. Nous avons tenu une première réunion à Nouzonville en novembre 2006, avec une centaine de personnes. L’association est née en janvier 2007. Nous avons commencé par aider des victimes et des veuves à déclarer des maladies professionnelles.
Quels ont été les résultats ?
Les chiffres parlent d’eux-mêmes :
En 2005 : zéro décès dû à l’amiante déclaré dans les Ardennes,
En 2006 : un seul décès déclaré,
Depuis janvier 2007 : 38 décès déclarés et reconnus en deux ans et demi !
La création de l’association a permis de rattraper des dossiers anciens (n’étant pas informées de leurs droits, ni la victime ni la famille n’avaient fait de déclaration).
Nous avons fait reconnaître par le système complémentaire (CRRMP) des pathologies dues à l’amiante qui ne figurent dans aucun tableau de maladies professionnelles : deux cancers du larynx (dont un de 1981 reconnu en 2008) et deux cancers de l’estomac (dont un de 1980 reconnu en 2009). D’autres dossiers sont en cours pour des cancers du larynx, du côlon et de l’estomac. Nous montons nos deux premiers dossiers concernant des cancers des ovaires suite aux travaux du Centre International de Recherche sur le cancer (le CIRC)
Vous avez déposé une plainte pénale contre l’entreprise Deville
Oui en février 2007, au lendemain de la création de l’association. Dans cette entreprise de Charleville, qui fabrique des cheminées, il y avait à cette époque trois décès connus dus à l’amiante. Nous en sommes aujourd’hui à quatorze ! 28 personnes se sont portées partie civile aux côtés de l’Addeva. Deux d’entre elles, qui n’étaient pas malades au moment du dépôt de la plainte, sont décédées depuis d’un cancer dû à l’amiante déclaré et reconnu.
L’entreprise Deville n’est pas la seule à avoir contaminé ses salariés. A la création de l’association, je n’avais aucune pathologie. Lors d’une réunion avec des syndicalistes de Citroën, où j’avais travaillé, j’ai été frappé par le nombre de malades de l’amiante. J’ai décidé de passer un scanner. J’ai des plaques et des épaississements pleuraux. Ces deux maladies ont été reconnues il y a un mois. J’ai demandé l’allocation de cessation anticipée amiante et engagé une action en faute inexcusable contre PSA.
Nous conseillons systématiquement aux personnes exposées à l’amiante de passer un scanner et de nous rapporter le CD Rom.
Les médecins ne sont donc pas les seuls à savoir lire les images d’un scanner…
Pour bien défendre les dossiers, il faut acquérir des connaissances médicales : savoir lire les images d’un scanner ou les résultats des explorations fonctionnelles respiratoires. J’ai commencé à me former dans un cadre syndical, avec le docteur Lucien Privet et François Dosso. Puis, j’ai suivi des formations organisées par l’Andeva. Nous devons être capables de contester le compte-rendu d’un radiologue qui « oublie » des plaques pleurales, ou de conseiller à une victime de passer un examen que son médecin n’a pas jugé bon de lui prescrire.
Quelles sont les autres activités de l’ association ?
Nous avons contesté les calculs de la caisse régionale d’assurance maladie qui ne prend pas en compte les RTT et les congés payés pour le calcul de l’allocation de cessation anticipée d’activité.
Nous nous sommes mobilisés contre la fermeture du Tass de Charleville.
L’Addeva a souvent été invitée :
à une réunion du personnel sur la prévention du risque amiante par la SNCF région Nord-Est,
à une réunion d’information par la Mutuelle des cheminots,
à l’assemblée générale des anciens sidérurgistes de la Chières pour parler du suivi médical post-professionnel,
à une réunion du personnel de PSA par le syndicat indépendant de l’automobile. Le premier décès connu chez PSA a été reconnu en juillet 2009. Depuis la réunion, nous avons enregistré plus de 25 personnes de chez PSA pour des maladies dues à l’amiante et à la silice.
Nous étions aux manifestations de l’Andeva à Paris, Douai, Dunkerque, Turin… Le jour de la manifestation nationale à Dunkerque, nous avons publié un faire part dans la rubrique nécrologique du journal local avec les noms des victimes de l’amiante dans les Ardennes….
Votre association n’a que deux ans et demi, et pourtant quel chemin parcouru depuis sa création !
Nous avons aujourd’hui 350 adhérents. Nous traitons des dossiers de personnes habitant la Meuse, la Haute Marne, et même la Belgique.
Nous tenons des permanences le lundi et le jeudi de 14 à 17 heures dans un local prêté par la ville de Charleville-Mézières (une quinzaine de personnes par permanence).
En septembre 2009, nous aurons nos propres locaux, avec un bureau administratif, un bureau d’accueil, une salle d’attente, des toilettes et un coin cafétéria. J’ai longtemps assuré seul le suivi des dossiers en travaillant chez moi. Jean-Michel, vient en renfort pour les permanences et les réunions d’information. Avec ces nouveaux locaux, nous souhaitons former une équipe de bénévoles capables de s’occuper du courrier, de tenir une réunion ou de rédiger un mémoire pour le Tci.
Vos actions sont-elles bien relayées par les médias ?
La presse et la télévision s’en font l’écho. Les journalistes savent que les informations que nous leur donnons sont fiables. Ils comprennent l’importance de notre combat.
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Article paru dans le bulletin de l’Andeva n°30 (septembre 2009)