Il y a dix ans, débutait à Turin, le premier procès pénal contre le milliardaire suisse Stephan Schmidheiny, PDG et propriétaire des quatre usines italiennes d’Eternit. Reconnu responsable d’une catastrophe sanitaire et environnementale, il fut condamné à 16 ans de prison en première instance puis à 18 ans de prison par la cour d’appel de Turin, avant d’être relaxé par la Cour de cassation qui jugea les faits prescrits. En 2020, près de 400 victimes casalaises écriront une nouvelle page de ce combat.

Pour les victimes de Casale Monferrato, les audiences auront lieu à Vercelli, la juridiction territoriale désormais compétente.

Comment qualifier ces homicides ?

Pour contourner l’obstacle de la prescription, c’est la qualification d’homicide qui a été retenue et non celle de catastrophe environnementale.
Reste à savoir si les décès de centaines d’ouvriers malades de l’amiante sont le résultat de fautes commises sans intention de donner la mort (omicidio colposo) ou le résultat d’une stratégie industrielle menée en pleine conscience de ses conséquences mortifères prévisibles (omicidio doloso).

Les magistrats du parquet de Vercelli ont retenu cette deuxième incrimination.

Le juge de l’audience préliminaire qui se tiendra le 14 janvier 2020 dira s’il valide cette incrimination.
(dans le système judiciaire italien, l’audience préliminaire a pour objet de vérifier la conformité de l’instruction préalablement aux audiences sur le fond).
L’enjeu est important : si la qualification d’omicidio doloso est retenue, c’est par une Cour d’assises que Schmidheiny sera jugé.

Une formidable soif de justice

Fin 2014, dans le premier procès Eternit, l’échec devant la Cour de cassation avait nourri une déferlante de souffrance et de rage chez les victimes et les familles endeuillées par Eternit. Après ce verdict de la honte, l’usine d’amiante-ciment, qui avait fermé ses portes depuis des décennies, a continué à tuer une cinquantaine de Casalais par an. La poursuite de cette hécatombe a nourri une formidable soif de justice que rien ne saurait arrêter. Avec le soutien de l’Afeva et de ses avocats, des victimes ont trouvé le courage de reprendre le flambeau de ce marathon judiciaire surhumain. Nous serons à leurs côtés.

 

Article paru dans le Bulletin de l'Andeva n°62 (janvier 2020)