180 médecins de 35 pays prennent position :

Le Collegium Ramazzini réaffirme la nécessité d’une interdiction mondiale de l’amiante chrysotile

Dans une déclaration récente, le Collegium évoque la dimension mondiale de l’épidémie sanitaire et prévoit qu’il faudra attendre une décennie pour atteindre le pic des maladies liées à l’amiante dans les pays industrialisés et sans doute plusieurs dans les autres pays. Nous publions des extraits de ce document qu’on peut télécharger sur le Net.

« L’épidémie de pathologies provoquées par l’amiante atteint aujourd’hui une dimension mondiale »

 

Toutes les variétés d’amiante sont cancérogènes

Le Collegium rappelle que « Chaque fibre d’amiante extraite est indestructible et peut donc exposer de façon répétée un grand nombre de personnes au cours d’un cycle d’utilisation qui va de l’extraction à la production, au transport, à l’utilisation, à la réparation et à la destruction. »

« L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a souligné que toutes les formes d’amiante, y compris le chrysotile, sont à l’origine d’un risque accru de cancer du poumon, du larynx et de l’ovaire, de mésothéliome et d’asbestose ». Elle a appelé à l’élimination des matériaux contenant de l’amiante.

Ce point de vue a été confirmé
par le Centre international
de Recherche sur le
Cancer (CIRC) et l’Organisation
internationale du
Travail (OIT).

Deux millions de tonnes par an encore utilisées

Or, malgré des données scientifiques de sa cancérogénicité, « deux millions de tonnes d’amiante chrysotile continuent d’être utilisées chaque année dans le monde ».

Une poignée de pays se sont opposés avec succès à l’inscription de l’amiante chrysotile sur la liste PIC des substances dangereuses de la Convention de Rotterdam qui impose aux pays exportateurs d’obtenir un consentement éclairé préalable des pays importateurs après les avoir informés des dangers.

 

107 000 décès chaque année

Le Collegium Ramazzini estime que « l’exposition professionnelle à l’amiante provoque environ 107.000 décès chaque année dans le monde ». Les estimations peuvent varier mais le fardeau sanitaire des maladies liées à l’amiante est « plus susceptible d’être sous-estimé que surestimé, parce que ces maladies sont sous-diagnostiquées  ».

 

Le rythme des interdictions se ralentit

« Depuis l’Islande, premier pays a avoir introduit une interdiction de tous les types d’amiante en 1983, plus de 50 pays ont pris des mesures d’interdiction  », poursuit le Collegium. Mais le rythme des interdictions s’est ralenti avec des retours en arrière durant la dernière décennie, dus à l’influence corruptrice des lobbyistes de l’industrie.

« Dans 9 des 10 pays les plus peuplés au monde, qui utilisent ou ont utilisé des quantités importantes d’amiante, des mesures d’interdiction restent encore à adopter. La part de la population mondiale protégée par ces mesures d’interdiction reste donc faible. Elle concerne surtout des pays industrialisés. »

 

L’effrayant fardeau sanitaire de l’épidémie

La progression des mésothéliomes ne se ralentit que dans les pays qui ont réduit l’utilisation de l’amiante il y a plusieurs décennies.

« Dans les pays qui continuent à utiliser l’amiante l’épidémie se prolongera inévitablement. Vu la synergie entre amiante et tabac, de nombreux pays en voie de développement, où coexistent un tabagisme élevé et une utilisation de matériaux amiantés devront assumer un lourd fardeau de cancers du poumon. »

« Le pic de maladies liées à l’amiante ne sera probablement pas atteint avant au moins une décennie dans les pays les plus industrialisés et plusieurs décennies dans les autres pays. Il s’agit donc bien d’un problème mondial de santé publique. »

 

Un lourd héritage du passé

« La première priorité est la prévention primaire : interdire l’amiante dans tous les pays où il est encore utilisé.  »

Dans les pays industrialisés, où de grandes quantités d’amiante sont dans des milliers d’écoles, demaisons et de bâtiments commerciaux : « il fautdocumenter et signaler la présence d’amiante dans les bâtiments et les équipements industriels pour éviter l’exposition lors de travaux d’entretien, de réparation et de démolition. »

Il faut aussi légiférer pour protèger les travailleurs du désamiantage ou des déchèteries,leur assurer une formation spécialisée et unsuivi médical.

 

Des défis coûteux pour les soins et l’indemnisation

Le développement de l’épidémie
impose de relever
des défis coûteux pour
développer des « biomarqueurs
permettant une détection
précoce du mésothéliome
et la mise au point
de traitements efficaces »,

mais aussi pour l’indemnisation
des victimes de
l’amiante et de leurs familles.

L’importance d’une coopération internationale

Les Etats doivent élaborer « des stratégies pour identifier les travailleurs qui ont été ou sont encore exposés à l’amiante, quantifier leurexposition, et les enregistrerpour pouvoir suivre leur état de santé et celui de leur famille. »

Les pays industrialisés doivent partager le capital d’expériences, le savoir- faire technologique et l’expertise scientifique qu’ils ont accumulés avec les pays en transition vers l’interdiction de l’amiante.

Cette collaboration internationale devait être impulsée « par les organisations internationales et la communauté scientifique » et « impliquer les praticiens,les chercheurs, les administrateurs et la société civile ».

 

Une approche de santé globale

« Tous les pays ayant utilisé l’amiante connaissent une épidémie de maladies, dont le développement est fonction soit des quantités utilisées autrefois et de la date d’interdiction (si l’amiante y a été interdit) soit du niveau d’utilisation actuel (si l’amiante n’a pas été interdit).

Etendre les interdictions nationales dans les pays en voie de développement et réduire le fardeau des maladies liées à l’amiante dans les pays industrialisés doivent être aujourd’hui les objectifs à court terme. Ces maladies étant à 100% évitables, atteindre zéro nouveau cas devrait être l’objectif ultime tant pour les pays industrialisés que pour les autres.

La pandémie de maladies liées à l’amiante doit être une priorité internationale urgente pour la santé des travailleurs et la santé publique.  »

http://www.collegiumramazzini.org/


 

Le Collegium Ramazzini

C’est une société scientifique internationale spécialiste des questions liées à la médecine du travail et de l’environnement dans une optique de prévention de promotion de la santé.

Bernardino Ramazzini, le père de la médecine du travail, était un professeur de médecine des universités de Modène et de Padoue à la fin des années 1600 et début des années 1700.

Le Collegium est composé de 180 médecins et de scientifiques de 35 pays, qui se prononcent en toute indépendance par rapport aux intérêts commerciaux.

Depuis 1993, le Collegium a appelé à maintes reprises à une interdiction mondiale de l’extraction, la fabrication et l’utilisation de toutes les variétés d’amiante.

Cette position a été prise sur la base de données scientifiques prouvant que toutes les variétés d’amiante - chrysotile inclus - sont cancérogènes et qu’il n’existe pas de seuil en-dessous duquel il n’y aurait pas risque de cancer.

Il a dénoncé le caractère fallacieux des campagnes de promotion de l’usage « contrôlé » de ce matériau par les industriels de l’amiante.


 

Des alternatives existent

« Dans les pays où l’amiante a été interdit, des matériaux de substitution sûrs et rentables ont été trouvés. Des fibres d’alcool polyvinylique et des fibres de cellulose peuvent remplacer l’amiante dans des plaques en fibresciment (plates et ondulées) utilisées dans les toitures, les murs intérieurs et les plafonds.

Pratiquement toutes les fibres de cellulose et polymères utilisées pour ces plaques ont un diamètre supérieur à 10 microns et ne peuvent être inhalées. »

« Des tuiles en béton léger peuvent être fabriquées en utilisant du ciment, du sable et du gravier ; en y adjoignant éventuellement des fibres végétales disponibles localement telles que le jute, le chanvre, le sisal, les noix de palme, la fibre de coco, le kenaf, et la pâte de bois. Les tuiles d’acier galvanisé ou d’argile peuvent être aussi des matériaux alternatifs.

« On peut remplacer les tuyaux en amiante-ciment par des tuyaux de fonte ou de polyéthylène haute densité. Ces matériaux sont plus sûrs que l’amiante. Mais les personnes qui les manipulent doivent se conformer à de bonnes pratiques en les utilisant. »