Jean Dalla Torre nous a quittés le 10 septembre 2015. Il avait 83 ans. Il fut l’un des fondateurs de l’Andeva. C’est en son nom qu’est déposée en juin 1996 la première plainte pénale, quelques jours avant l’annonce de l’interdiction officielle de l’amiante en France.

C’est une perte immense pour la cause des victimes. Et, pour nombre d’entre nous, c’est avant tout un ami qui s’en va.

Jean avait respiré des fibres d’amiante entre 1958 et 1962 sur les chantiers où il avait été électricien.

32 ans plus tard, en 1994, il est rattrapé par un mésothéliome. On ne lui promet que quelque mois à vivre.

à l’hôpital de Créteil, où il apprécie la compétence et le soutien de l’équipe médicale, il bénéficie d’un traitement expérimental.

Cette année-là il fait la connaissance d’Henri Pezerat et s’engage à ses côtés dans la création de l’Andeva dont il est administrateur. Il sera de tous ses combats.

En 2005, avec son amie, Suzanne Dianoux, dont le mari esr décéde d’un mésothéliome, il participe aux marches des veuves de Dunkerque autour du Palais de Justice.

Jean a vécu vingt-et-un ans avec son mésothéliome. C’est un cas presque unique, porteur d’espoir. En janvier 2014, il évoque, non sans humour, son expérience, dans une interview à deux voix avec Claude Aufort dans le numéro 44 du Bulletin de l’Andeva.

En 2002, Jean est indemnisé par le Fiva. « Ce jour-là, j’ai appris que ma vie valait moins cher que ma maison  » commente-t-il.

Atteint d’une maladie grave, il prend chaque année qui passe comme un bonus.

Membre d’une vingtaine d’associations aussi diverses qu’Amnesty International ou Wikipédia, il a créé «  Lire et Écrire », une association d’alphabétisation. Jusqu’au bout, il a voulu être utile pour les autres.

Passionné d’astronomie, il avait réuni 500 personnes sur un champ dans le Queyras pour observer l’éclipse solaire de 1999.

En juin 2003, au sortir d’un tournoi de scrabble à Saint-Maur-des-Fossés, il trouve une jeune Chinoise sans logis, arrivée en France 6 mois plus tôt. Xu, c’est son nom, ne parle pas un mot de français. Jean et Jacqueline, son épouse, décident de l’héberger pour la nuit. Elle ne quittera plus jamais la maison de ceux qu’elle appelle affectueusement papa et maman et qui l’ont officiellement adoptée en mai 2006. Mariée, elle est à présent mère de deux petits garçons. Tous vivent ensemble dans la grande maison de Saint-Maur.
Jean et Jacqueline n’avaient pas eu d’enfants. Cette petite famille « tombée du ciel  » a été un cadeau de la vie qu’ils n’attendaient plus et qui a enchanté les dernières années de Jean.

Jean nous a quittés sans avoir vu ce procès pénal de l’amiante auquel il aurait tant voulu assister.

Le 9 octobre dernier, un mois après son décès, l’Andeva lui a rendu hommage en dédiant à sa mémoire la manifestation qui s’est terminée devant le pôle de santé publique à Paris.

Hélène BOULOT

Patrice RAVENEAU