« Les fins de vie, je les connais, la surdité des chefs de service ? C’est du vécu. Le choix des soins thérapeutiques ou palliatifs, hélas aussi », dit Eric Jonckheere. L’amiante d’Eternit lui a volé quatre êtres chers, tous morts d’un mésothéliome.
Pierre, son père était ingénieur chez Eternit. « Il ne pouvait imaginer que la famille Emsens lui ait à ce point menti sur la dangerosité de l’amiante. »
Françoise, sa mère, fut atteinte par ce cancer, alors qu’elle n’avait jamais travaillé à l’usine. Elle a refusé tout acharnement thérapeutique : « Je veux des soins palliatifs de premier choix afin de garder ma tête au clair pour dénoncer les agissements de ces industriels criminels » et préparer ses petits-enfants à leur séparation.
Eric rend hommage à son courage : « La multinationale lui proposa 42000 euros contre son silence et l’abandon de toute poursuite. Faisant face à ses bourreaux, elle refusa de se faire bâillonner et fonda l’Abeva et initia le premier procès de l’amiante en Belgique. »
Deux frères d’Eric, furent à leur tour frappés. Face au cancer, ils assumèrent leurs choix thérapeutiques : Pierre-Paul choisit l’immunothérapie, Stéphane la chirurgie. « Son épouse et lui forcèrent les équipes médicales à se parler. Grâce à leur entêtement ils obtinrent que le malade soit entendu et écouté. Les médecines parallèles firent leur entrée à hôpital. Un vocabulaire accessible remplaça le charabia médical... »
Eric dénonce le mensonge des industriels et la faillite de l’Etat. Il plaide pour la création de centres experts sur le mésothéliome et pour faire de la recherche sur cette maladie une priorité.
Eric a de l’amiante dans les poumons. Il a dû apprendre « la danse sous une épée de Damoclès ». Bien que durement frappée, sa famille n’est pas rongée par une soif destructrice de vengeance.
« Je vous rassure. Je reste profondément optimiste et gourmand de la vie. »