Le procès ne doit pas se limiter aux chefs d’établissement
L’affaire de l’amiante ne concerne pas seulement les chefs d’établissements et les industriels de l’amiante, mais aussi les autorités sanitaires qui n’ont pas protégé les salariés et les directions générales d’administrations chargées d’appliquer la réglementation et le contrôle.
C’est la position défendue par l’Andeva depuis l’origine dans la plainte fondamentale au pénal qui fut l’acte de naissance de l’association nationale.
Tous les responsables, pour que nos enfants ne connaissent plus jamais les mêmes drames :
Les industriels de l’amiante qui se sont battus pour rendre les normes les moins contraignantes possible en faisant un chantage à l’emploi et qui ont fait pression sur les pouvoirs publics pour retarder au maximum une interdiction qu’ils savaient inéluctable ;
Les responsables de l’administration et de l’Etat qui ont cédé à leurs pressions et cautionné la fable mensongère de l’usage « contrôlé » de ce matériau cancérogène ;
Les membres du Comité permanent amiante (CPA) qui se sont faits les cautions et les propagandiste de cette mortelle duperie.
Cette approche était partagée par Madame Bertella-Geffroy, la juge d’instruction qui a eu le courage de porter ce dossier pénal pendant dix ans, contre vents et marées, avant d’en être dessaisie, dans des conditions plus que discutables.
Les mises en examen qu’elle avait prononcées contre de hauts responsables se sont heurtées à un extraordinaire tir de barrage de la chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Paris soutenue par le Parquet : elle a prétendu qu’il n’existait « pas d’indices graves et concordants » de la culpabilité des personnes concernées.
Dans le dossier de Condé-sur-Noireau, elle a annulé leurs mises en examen, prétendant que l’influence du CPA sur les pouvoirs publics n’était pas démontrée et que la fable de l’usage « contrôlé » était conforme à la réalité des « connaissances scientifiques de l’époque ».
La Cour de cassation a cassé un premier arrêt de cette chambre en relevant une contradiction de motifs. Mais la Chambre de l’instruction est revenue à la charge avec de nouveaux arguments.
Et la Cour de cassation a fait volte-face, jugeant cette fois-ci que les magistrats de la chambre de l’instruction avaient exercé leur « appréciation souveraine des faits ».
Un coup de poignard dans le dos des habitants de Condé-sur-Noireau (5400 habitants) où l’on compte 700 malades et 115 morts recensés par l’Aldeva. Le nombre réel de victimes approche sans doute les 1500...
Dans les dossiers de Jussieu, Normed et Sollac - des membres du CPA, de la haute administration et de l’Etat restent mis en examen.
L’affaire n’est donc pas jouée. Ces dossiers reviendront devant la Cour de cassation.
Le Comité anti-amiante Jussieu et l’Ardeva Nord-Pas-de-Calais ont dit leur volonté d’aller jusqu’au bout - quelles que soient les difficultés - dans le combat pour que tous les responsables soient jugés et de se donner tous les moyens nécessaires pour tenter de le gagner.