Le 22 avril, 200 personnes ont manifesté à Chatellerault pour l’inscription des Fonderies du Poitou sur les listes ouvrant droit à la « pré-retraite amiante ».

Le gouvernement sortant avait dit oui. Puis, sous la pression du Medef il a dit non.

Un recours a été engagé. L’audience au tribunal administratif a eu lieu le 9 mai.

La demande d’inscription avait été déposée fin 2014. L’enquête de la Direccte était favorable. La Commission accidents du travail-maladies professionnelles (CAT-MP) devait émettre un avis. On s’attendait à un classement rapide. Contre toute attente, on eut un report puis un refus.

Mais que s’était-il
donc passé ?

A l’insu des salariés, les représentants du Medef à la CAT-MP avaient alerté les dirigeants des Fonderies sur
les « effets secondaires indésirables » que pourrait avoir pour eux une inscription (actions en faute inexcusable de l’employeur, préjudice d’anxiété...)
Ceux-ci se sont alors réveillés : ils prétendent que l’enquête de la Direccte n’a pas été contradictoire (ce qui est un pur mensonge) et réclament un report de la décision, afin que les deux parties aient le temps de présenter leurs arguments.

Le ministère a soutenu le report, puis a finalement rejeté une demande d’inscription qu’au départ il avait lui-même soutenue.

22 avril :
La colère s’exprime
dans la rue

Ce jour là, ils sont 200, rassemblés place François Mitterrand à Chatelleraut à l’appel de l’Afpa 86. Des délégations de l’Adeva Centre et de l’Andeva sont venues les soutenir. La colère se lit sur les visages et s’entend dans les mots. Ils ne veulent pas se laisser faire.

Sur la place, les interventions au micro se succèdent : Joël Bourdilleau, Eric Lemer et Alain Dubin, de l’AFPA, Bernard Balestri (Andeva-Addeva 93), Patrice Villeret, délégué CGT de l’usine Aluminium, Alain Delaveau, délégué CGT de l’usine Fonte. La députée locale EELV, Véronique Massonneau dénonce les pressions politiques sur la DGT. Tous critiquent l’ahurissante volte-face du ministère.

L’enjeu est très important : près de 300 personnes concernées, dont 150 pourraient partir dès maintenant si l’inscription des Fonderies était entérinée.
La mauvaise foi
du ministère

Le dossier pour l’inscription du site est solide : 169 documents ont été fournis par 250 salariés, tous adhérents de l’AFPA ; des données précises ont été réunies sur l’utilisation de l’amiante par secteur et par époque...

Le rapport de l’inspecteur
du travail indique que plus de la moitié des salariés de cette usine ont été «  exposés  » de façon active à l’amiante.

Cela devrait suffire, mais la mauvaise foi du ministère est sans limite.
Ignorant volontairement la jurisprudence, il explique que 10% du temps de travail total aux fonderies était consacré au calorifugeage.

Or, ce calcul par rapport au temps de travail a été censuré par le Conseil d’Etat dans un arrêt d’octobre 2009, car il mesure non pas la fréquence mais l’intensité !

L’audience
du 9 mai

Ce jour-là, dans la salle d’audience du tribunal administratif, les ouvriers des fonderies sont fidèles au rendez-vous.

L’avocat de l’employeur ne s’est fondé que sur deux pièces hors sujet. L’une des deux est un classement de six salariés des fonderies en exposition forte par le médecin du travail Un chiffre qui en dit long sur ses carences quand on sait que 54 maladies liées à l’amiante ont été recensées dans l’entreprise !
Me Jean-Louis Macouillard reprend une par une les nombreuses pièces du dossier qui démontrent le bien fondé de la demande d’inscription.
Il argumente sur le terrain de la technique et du droit.

La jurisprudence laisse à la souveraineté des juges du fond la liberté de décider si telle ou telle activité relève de la protection thermique (justifiant l’inscription) ou de l’étanchéité (qui ne la justifierait pas).

Mais, dans ce cas d’espèce il n’y a pas le moindre doute possible : la fusion de l’aluminium intervient à 660 degrés, celle de la fonte à 1330 degrés. Il y avait 9 à 10 campagnes de four par an. Chacune durait en moyenne 11,4 jours.
Est-il vraiment besoin d’en dire davantage ?

L’arrêt devrait être rendu une quinzaine de jours après l’audience.