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Les dockers, les cheminots, les mineurs ont exercé des métiers notoirement exposés à l’amiante. Ils ont divers dispositifs de cessation anticipée d’activité.
Mais, quand ils demandent la reconnaissance du préjudice d’anxiété, elle leur est refusée au motif que leur établissement n’est pas inscrit sur les listes.

Par un arrêt du 15 mars 2015, la Cour de cassation a restreint la reconnaissance du préjudice d’anxiété aux salariés des établissements inscrits sur les listes ouvrant droit à la cessation anticipée d’activité « amiante ».

C’est le cas des salariés de Renault Trucks : ils ont déposé aux prud’hommes plusieurs centaines de dossiers qui devraient aboutir sans difficulté.

Plusieurs situations particulières n’étaient pas explicitement réglées par cet arrêt :
- celles des dockers dont le droit est à l’Acaata est ouvert s’ils ont travaillé dans un port listé,
- celle des cheminots qui bénéficient d’un départ anticipé propre à la SNCF,
- celle des mineurs de Lorraine, exposés non seulement à l’amiante, mais à de multiples cancérogènes.

Des procédures ont été engagées. Avec des décisions favorables en première instance. Mais plusieurs arrêts défavorables, en appel ou en cassation, ont suscité déception et colère chez les plaignants.

Dockers : une logique absurde

Par un arrêt du 15 décembre 2015, la Cour de Cassation a exclu du préjudice d’anxiété des dockers ayant travaillé dans un port classé « amiante », mais dont la société d’acconage n’est pas inscrite sur les listes car son activité n’implique ni transformation, ni flocage, ni calorifugeage d’amiante.

Un docker qui a déchargé des milliers de sacs d’amiante à dos d’homme a donc le droit de cesser plus tôt son activité professionnelle parce que son espérance de vie est réduite, mais il n’a pas le droit d’être anxieux !

Une logique absurde, totalement déconnectée de la réalité de la manutention portuaire.

Cheminots - pré-retraite : oui, anxiété : non.

Il y a eu 514 décès liés à l’amiante ces dix dernières années et 13 500 personnes bénéficiant d’un suivi médical « amiante » à la SNCF.
Elle a mis en place en 2003 un dispositif maison de départ anticipé à la retraite pour les anciens travailleurs de l’amiante.

Plusieurs procédures pour la reconnaissance du préjudice d’anxiété ont été engagées par des cheminots, fortement exposés, notamment dans les ateliers ferroviaires. Les avocats de la Direction se contentent d’indiquer que que la SNCF « n’est pas sur les listes » et que ce préjudice ne peut donc être reconnu.

En mars 2017, la Cour d’appel de Bordeaux a débouté 48 ex-salariés des ateliers SNCF de Bordeaux dont le préjudice d’anxiété avait été reconnu par les prud’hommes.

En juillet 2017, la SNCF a été condamnée par les prud’hommes de Troyes à verser 60.000 euros à 72 cheminots du technicentre de Romilly-sur-Seine (Aube) au titre de l’anxiété.

D’autres procédures sont en cours, avec des décisions qui sont attendues à l’automne.

Mineurs : multi-exposés mais pas reconnus

Les mineurs de Lorraine ont été exposés aux poussiières de charbon et à l’amiante, mais aussi à de multiples produits cancérogènes dont ils ont fait la liste.

Avec le syndicat CFDT, 834 d’entre eux ont demandé un préjudice d’anxiété spécifique. Le 30 juin 2016, les prud’hommes de Forbach l’ont reconnu. Le 7 juillet 2017, la Cour d’appel de Metz les a déboutés, au motif que Charbonnages de France n’est pas listé.

Et les sous-traitants ?

Pour les sous-traitants exposés à l’amiante, la Cour de cassation souffle le chaud et le froid : alors qu’elle leur ouvre l’accès à l’Acaata, elle leur refuse le préjudice d’anxiété par trois arrêts du 11 janvier 2017 avec le même argument que pour les dockers : «  Un salarié, même s’il est éligible à l’allocation de cessation anticipée des travailleurs de l’amiante ne peut obtenir réparation d’un préjudice spécifique d’anxiété [si l’établissement qui l’emploie n’est pas inscrit sur les listes]. » .
L’amertume est d’autant plus forte parmi les plaignants que plusieurs sont tombés malades et sont morts de l’amiante pendant l’instruction.

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