Le 15 juin 2017, elle a validé le départ en « pré-retraite amiante » d’un salarié d’une entreprise sous-traitante.

L’allocation de cessation anticipée « amiante » n’était jusqu’ici accordée qu’aux salariés liés par un contrat de travail aux établissements figurant sur une liste officielle établie par arrêté ministériel. Les salariés des entreprises sous-traitantes non listées travaillant sur ces sites en étaient exclus.

Une injustice pointée par le Défenseur des droits

Depuis des années, l’Andeva et ses associations locales posaient la question aux pouvoirs publics : comment deux salariés qui ont fait le même travail, respiré les mêmes fibres sur le même site peuvent-ils être traités différemment ?

Le Défenseur des droits lui-même avait exprimé publiquement sa préoccupation face à cette injustice (1).

La Cour de cassation vient pour la deuxième fois de rendre un arrêt jugeant cette exclusion contraire au droit.

Un premier arrêt du 16 juillet 2016 (2)

L’établissement du Haillan de la Société européenne de production (SEP devenue SNECMA) a été inscrit en 2002 sur les listes ouvrant droit à l’Acaata.

Une personne avait travaillé sur ce site de 1981 à 1986 en tant que salarié de CGEE Alsthom (devenu Cegelec), sous-traitant non listé, puis à partir de 1987 en tant que salarié de la SEP (qui l’avait embauché). Il avait demandé à bénéficier de l’Acaata pour les deux périodes. La Carsat d’Aquitaine avait refusé. Par un arrêt du 4 juin 2015, la cour d’appel de Bordeaux avait donné gain de cause au salarié.

La Cour de cassation a fait de même, jugeant que « le critère d’éligibilité au bénéfice de l’ACAATA est non pas le lien de subordination juridique découlant du contrat de travail entre l’entreprise dont un établissement figure sur la liste, mais l’exposition effective qui découle de la seule présence non contestée dans des locaux où les salariés étaient exposés à l’amiante à l’occasion du travail, fait qui est établi par la présence de cet établissement sur la liste ».

La Haute juridiction relève par ailleurs que la Caisse nationale d’assurance maladie elle-même, dans une circulaire du 14 décembre 2010 avait, par souci d’équité, étendu le bénéfice de l’Acaata aux intérimaires, « qui n’ont pas de lien de subordination avec l’entreprise dont un établissement est listé, sous réserve de la production de preuves de leur présence ».

Elle indique que « le rejet notifié par la Carsat aboutit à une discrimination prohibée par l’article 14 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales. »

Un second arrêtdu 15 juin 2017 (3)

Un ancien salarié de la société Secoplast avait demandé à la Carsat de Normandie le bénéfice l’Acaata, pour la période durant laquelle il avait travaillé à Condé-sur-Noireau comme dessinateur en sous-traitance au sein d’un établissement de la société Bendix (devenue Allied Signal), inscrit sur les listes. Il réalisait des missions de mise au point et de modification de mélangeur sur la chaîne de production d’élaboration des matériaux de friction, une zone très polluée de l’usine.

Sa demande ayant été rejetée, il a contesté ce refus.Par un arrêt du 13 mai 2016, la cour d’appel de Caen lui avait donné raison.

La Cour de cassation a rejeté le pouvoi de la Carsat Normandie, en soulignant que « le salarié avait effectivement exercé son activité professionnelle, au cours de la période considérée, au sein non de l’établissement de son employeur, mais d’un établissement figurant sur la liste »

Et maintenant ?

Cette jurisprudence devrait aider les contentieux en cours et surtout modifier les pratiques des caisses.

Interrogée par l’Adevimap la Carsat Sud-Est a répondu le 27 juin 2017 « les intérimaires, comme les sous-traitants des établissements reconnus par arrêté ministériel peuvent prétendre au dispositif Acaata, sous condition de fournir des ordres de mission précisant l’établissement où s’est déroulé la mission et sa durée. ».

Un champ d’activité nouveau et important est ouvert pour les associations de victimes.


1. Lettre du Défenseur des droits N°11, sept.-oct. 2014.
2. Cass. 2è civ. 16 juillet 2016 n° 15-20.628
3. Cass 2e civ 15 juin 2017 n° 16-20 511