L’arrêté du 2 juillet 2018 sur la certification des opérateurs de repérage est paru sans la signature de la direction du Travail, sans avis préalable du Conseil d’orientation des conditions de travail (COCT) et sans référence au Code du Travail. Il prévoit dans certains cas une certification renforcée (« avec mention »), mais permet que la majorité des repérages soient confiés à des opérateurs « sans mention » formés en trois jours.

L’importance du repérage

La réglementation prévoit divers diagnostics : dossier technique amiante, diagnostic avant vente, diagnostic des parties privatives, diagnostic avant travaux, diagnostic avant démolition...

Ils doivent indiquer où est l’amiante, sous quelle forme, dans quel état et faire des préconisations sur les mesures à prendre.

Ce repérage est la base de l’évaluation des risques qui incombe à l’employeur.
Il ne se limite pas à un contrôle visuel. Il implique des prélèvements. Certains nécessitent des « investigations approfondies », qui peuvent être « non destructives » (soulever des dalles de faux plafond amiantées) ou « destructives » (casser une gaine maçonnée, percer une porte coupe-feu).

Ces interventions présentent un risque non seulement pour l’opérateur, mais aussi pour les occupants des locaux.

L’omission de matériaux amiantés dans son rapport peut exposer l’opérateur à des poursuites pour mise en danger d’autrui.

Le « maillon faible » du désamiantage

Depuis dix ans, les pouvoirs publics ont été régulièrement alertés sur la médiocre qualité des rapports de repérage.

En 2014, le Comité de suivi « amiante » du Sénat, présidé par la sénatrice Aline Archimbaud, avait considéré le repérage était le « maillon faible » du désamiantage. Il avait noté l’arrivée massive d’opérateurs « non issus du bâtiment », formés en trois jours et dépourvus « initialement de compétences techniques et juridiques ». Les sénateurs avaient demandé au gouvernement de « renforcer drastiquement les compétences des diagnostiqueurs. »

Pourquoi mettre une barre à 300 ?

Deux arrêtés tardifs sont censés renforcer les compétences des diagnostiqueurs : celui du 25 juillet 2016 et celui du 2 juillet 2018 qui l’annule et le remplace.
La principale nouveauté est la création d’une certification renforcée («  avec mention ») délivrée à l’issue d’une formation de cinq jours, avec le pré-requis d’un niveau bac + 2 et d’une expérience professionnelle dans le bâtiment..

Malheureusement cette certification « avec mention » (en vigueur depuis le 1er juillet 2017) n’est exigée que pour « les établissements recevant du public, les immeubles de grande hauteur, les immeubles de travail hébergeant plus de 300 salariés et les établissements industriels ».

S’agissant d’amiante, le seuil de 300 salariés ou la limitation aux immeubles de grande hauteur n’ont aucune justification. On ne doit pas accepter que le diagnostic d’une HLM ou celui d’un ensemble de bureaux soit réalisé par un opérateur « sans mention », formé en trois jours et sans expérience professionnelle du bâtiment préalable.

Sept ans, c’est trop long

Autre problème : l’arrêté du 2 juillet allonge la durée de validité de toutes les certifications de cinq à sept ans. D’où un risque que les connaissances acquises deviennent obsolètes, vu l’évolution rapide des techniques et de la réglementation.
Ces questions n’ont pas été discutées. Il faut revoir la copie et la méthode, pour remettre la réglementation sur de bons rails.


LE TRAVAIL MIS SUR LA TOUCHE

Le repérage de l’amiante dans les bâtiments et la certification des opérateurs relèvent de la compétence de trois ministères : l’urbanisme, la santé et le travail.

Les occupants peuvent être en effet des locataires de HLM ou des salariés en activité dans des « immeubles de travail » ou des « bâtiments industriels ».

Or l’arrêté du 2 juillet n’a pas été signé par le directeur du travail ni soumis pour avis au Conseil d’orientation des conditions de travail (COCT). Il ne mentionne pas les articles du Code du travail sur le repérage.

Ses signataires ont outrepassé leurs compétences. L’Andeva a engagé un recours en conseil d’Etat pour excès de pouvoir.