Sous couvert de « simplification » et de « sécurisation » il annonce un bouleversement complet du dispositif de protection de la santé des travailleurs en France.
Révélé fin août par la revue « Santé et Travail », ce rapport de 174 pages a été élaboré par la députée du Nord LREM Charlotte Lecocq, Bruno Dupuis, consultant en management et Henri Forest, ancien responsable confédéral de la CFDT.
« Simplifier » un système jugé trop complexe
Les auteurs du rapport recommandent la création d’une structure nationale « France Santé au travail ». Ils proposent de rassembler au sein de cette « structure unique de prévention » l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) et l’Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (Oppbtp).
Cette structure nationale serait placée sous la tutelle des ministères de la Santé et du Travail. Son conseil d’administration serait composé de représentants de l’Etat, des employeurs et des organisations syndicales.
Cette structure nationale de droit public s’appuierait sur des structures régionales « de droit privé ayant des missions d’intérêt général » qui regrouperaient les services de santé au travail interentreprises (SSTI) et des acteurs de prévention : agences régionales de l’Anact et de l’Oppbtp, services de prévention des caisses régionales (Carsat).
Ces structures régionales seraient le « guichet unique » auquel s’adresseraient les employeurs en matière de santé au travail. Elles seraient pilotées par les directions régionales du travail (Direccte), en lien avec les agences régionales de santé (Ars). Elles auraient un CA paritaire (employeurs - syndicats) où siègerait l’Etat.
Les contributions financières des employeurs seraient regroupées avec celles des accidents du travail et maladies professionnelle dans une cotisation unique « Santé Travail », directement recouvrée par les Urssaf.
Il s’agit à ce stade de préconisations qui n’engagent que les auteurs du rapport. Mais on peut aisément mesurer l’ampleur des bouleversements qu’elles induiraient.
« Faire confiance » aux employeurs
Les changements annoncés ne concernent pas seulement l’organisation du dispositif santé au travail.
Les auteurs ont écouté les plaintes des employeurs pour qui la santé au travail serait devenue synonyme de « contraintes excessives », de « contrôles » et de « sanctions. »
Ils proposent donc d’alléger certaines obligations « formelles » et « difficilement respectées » du Code du travail sur la prévention des risques professionnels,
Dans les PME, l’évaluation des risques serait ainsi réduite à quelques risques qualifiés de « majeurs ».
Le rapport considère que « l’obligation de sécurité de résultat, poussée à l’extrême, décourage la prévention (sic) ».
Ils donnent la priorité au « conseil » et à « l’accompagnement » en faisant a priori confiance aux chefs d’entreprises. L’excédent de la branche accidents du travail - maladies professionnelles permettant d’arroser financièrement les plus méritants.
Dans cette approche, l’inspection du travail, les Carsat et la médecine du travail, déjà saignées à blanc par les baisses d’effectifs, risquent d’être réduites à la portion congrue. Elles verraient leurs missions de prévention transférées aux structures régionales.
L’inspection du travail et les ingénieurs des Carsat se limiteraient à des missions de « contrôle bienveillant ».
Les médecins du travail n’auraient plus à faire de fiche d’entreprise. Le suivi médical de certains salariés pourrait être réalisé par des généralistes ayant passé une convention avec la structure régionale. La confidentialité des données médicales pourrait être remise en cause par l’utilisation du dossier médical partagé.
Alléger le coût de l’indemnisation
Le rapport pose des jalons vers une révision à la baisse des indemnisations. Il cite en exemple l’Allemagne, « où le régime indemnitaire est beaucoup moins généreux et l’indemnisation du préjudice n’a lieu que si le salarié est atteint par un taux de 20 % ».