Des documents saisis pendant l’instruction montrent qu’en 1992 les autorités publiques ont combattu l’interdiction de l’amiante en Europe, en dépit des mises en garde du Quai d’Orsay.

En 1991, l’Allemagne, l’Italie, le Danemark et les Pays-Bas, obtiennent de Bruxelles la promesse d’interdire l’amliante dès l’année suivante.

L’Association des industriels de l’amiante (AFA) et le Comité permanent amiante (CPA), créé à leur initiative en 1982, réagissent. Au CPA, comité « informel », financé par Eternit et Saint-Gobain, se retrouvent des représentants des ministères, des scientifiques et des organisations syndicales.

Renaud Peirani qui est alors expert auprès de la Commission européenne en est membre. Il milite contre l’interdiction et défend « l’usage contrôlé » de ces fibres cancérogènes. Dominique Straus-Kahn est alors ministre de l’industrie.

Mais le ministère des Affaires étrangères, lui, défend l’interdiction. Le sous-directeur des affaires communautaires du Quai d’Orsay critique le « combat d’arrière-garde de la France » qui soutient que « l’amiante doit pouvoir continuer à être fabriqué et vendu quels que soient les dangers que présente son utilisation ».

Il est catégorique : « L’amiante provoque des maladies mortelles et a déjà fait suffisamment de victimes. Tout argument ne prenant pas en compte cet impératif de santé publique est inacceptable. »

Jean-Pierre Falque, conseiller technique du ministère de l’industrie propose alors de « préparer (avec les professionnels) une contre-note argumentée » et de « mobiliser les administrations participant au CPA ».

Le ministère de l’Industrie écrit au Premier ministre qui rendra peu après son arbitrage : pas question d’interdiction !

Il faudra attendre 1997 pour que l’amiante soit interdit en France. Quinze années auront été perdues. Combien de morts auraient pu être évitées ?