Neuf agents de maintenance  font reconnaître leur préjudice d’anxiété par les Prud’hommes

Le 12 septembre 2018, plus de vingt ans après l’interdiction de l’amiante, neuf salariés découvrent avec inquiétude que les matériaux qu’ils perçent, tronçonnent, ponçent, rainurent, démolissent depuis des années sont chargés d’amiante. Ce sont des agents d’entretien chargés de la maintenance de l’Union Immobilière des organismes de Sécurité sociale (UIOSS) qui gère les locaux des caisses de Sécurité sociale pour la Haute Garonne.

Laissés dans l’ignorance du danger

Ils ont travaillé au contact direct de matériaux cancérogènes en ignorant ce danger et sans protection collective (aspiration des poussières) ni individuelles (équipements de protection respiratoire « spécial amiante »).

Il y a eu aussi un risque potentiel pour le personnel administratif ou pour le personnel de nettoyage susceptibles d’inhaler ces poussières.

L’inspecteur du Travail est appelé.
Il vient sur place et  ordonne l’arrêt immédiat de leurs activités. Il réclame aussi pour ces salariés les mesures de prévention dont ils auraient dû bénéficier dès le début : un suivi médical rigoureux au service des maladies professionnelles et environnementales de l’Hôpital Purpan et une formation spécifique sur la prévention : « Amiante, pas formé pas toucher ! »

Ils sont salariés depuis des dizaines d’années et interviennent dans les locaux de cette caisse primaire. Jamais leur employeur ne leur a donné d’information ni de formation à hauteur du risque encouru. Le choc est grand ; d’autant que certains ont approché intimement les conséquences d’une maladie provoquée par l’amiante pour avoir perdu des parents.

Agir aux Prud’hommes

Avec l’aide du secrétaire du CSE, ils se regroupent puis contactent l’Andeva en 2019. Ils décident d’engager une action devant le conseil de prud’hommes de Toulouse, avec le cabinet TTLA. C’est Elisabeth Leroux qui assure leur défense. Le Conseil condamne l’employeur à indemniser leur préjudice d’anxiété. La CPAM annonce qu’elle ne fera pas appel.

La nouvelle est accueillie avec soulagement par ce collectif. Ils sont aujourd’hui bien décidés à avancer sur cette question et ne pas en rester là.

La première chose à faire sera d’informer leurs collègues des risques encourus. Il faudra leur rappeler que l’amiante provoque des maladies 20 à 40 ans après qu’on ait respiré ses fibres ; leur expliquer que des employées qui ont travaillé dans des bureaux semblables à ceux de la CPAM de Toulouse, se sont fait rattraper par la maladie. Ces expositions dites passives suffisent dans certains cas pour « attraper la maladie de l’amiante ». Il faut que cela se sache. L’Andeva et ses associations peuvent en témoigner.

Depuis que ce combat a été engagé, l’un des 9 salariés a fait reconnaître une maladie professionnelle liée à l’amiante.
Le médecin conseil lui a accordé un taux d’incapacité (IPP)... à 0% !

Des questions ne sauraient rester sans réponse

La bataille judiciaire aux prud’hommes a nécessité un gros travail de recherche et de réflexion. Elle a conduit le « groupe des neuf » à poser des questions qui fâchent :

- Comment une caisse primaire dont la mission première est de conseiller et de protéger les assurés a-t-elle pu mettre des travailleurs en danger, au mépris des règles les plus élémentaires de prévention ?

- Après cette condamnation judiciaire quelles mesures seront-elles prises ?

- Les mêmes problèmes se posent-ils pour les bâtiments de la CAF situés juste à côté, à la même adresse ?

- Quid du suivi médical des 3000 salariés présents dans ces bureaux ?

- Quid des bâtiments où travaillent les agents des CPAM qui traitent les dossiers de maladies professionnelles ?

Ces questions ne sauraient rester sans réponse.


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°69 (octobre 2022)