Les juges d’instruction et le parquet ont pris deux claques : Le 20 janvier par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris et le 8 mars par le Président de la chambre criminelle de la Cour de cassation.

Pendant dix ans, Marie-Odile Bertella-Geffroy, juge d’instruction au Pôle de Santé publique a instruit les dossiers du procès pénal de l’amiante, avant d’être poussée contre son gré vers la sortie.

Elle a eu le courage de viser haut dans la recherche des responsables, mettant en examen pour « homicide et blessures involontaires » des décideurs économiques et politiques dont beaucoup ont été membres du Comité Permanent Amiante (CPA), structure de lobyying créée par les industriels pour retarder l’interdiction.

Après son départ forcé, ses successeurs, se sont appliqués à détricoter tout le travail accompli, avec le soutien sans faille du parquet de Paris, Ils ont annulé les mises en examen de tous les responsables nationaux (hauts fonctionnaires, industriels, membres du CPA) dans les dossiers d’Eternit, Jussieu, Condé, Normed, Sollac, Amisol... Ils ont réécrit l’Histoire en tentant de réhabiliter le Comité permanent amiante.

En juin 2017, ils ont annoncé  qu’ils allaient clore tous les dossiers par des non-lieux. S’appuyant sur une interprétation grossièrement erronée d’une expertise scientifique, ils ont prétendu que l’impossibilité de fixer une date de contamination par l’amiante rendait par nature impossible d’en attribuer la responsabilité à quiconque.

L’année suivante, Mediapart révélait les pressions intolérables exercées par les juges d’instruction sur les experts chargés d’évaluer l’activité du sieur Raffaelli, médecin du travail de Condé-sur-Noireau et membre du CPA, mis en examen à juste titre pour non assistance à personnes en danger.

Devant tant de partialité, l’Andeva a demandé la récusation de ces magistrats mais ne l’a pas obtenue. Résultat : le  docteur Raffaelli n’est plus mis en examen.
Il est devenu simple témoin assisté.

Mais, le 20 janvier dernier, la chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Paris a refusé de clore l’instruction par des non-lieux, infligeant un désaveu cinglant à ces magistrats. Peu après, le président de la chambre criminelle de la Cour de cassation a refusé d’examiner le pourvoi formé par le Parquet contre cette décision.

La tentative de clore l’instruction de tous les dossiers par des non-lieux a donc échoué pour le moment.
Un verrou a sauté. Mais la partie est loin d’être gagnée.La bataille pour la tenue rapide du procès pénal de l’amiante doit continuer.


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°66 (septembre 2021)