Où en est la recherche sur le mésothéliome ?

Du 21 au 24 octobre, le 12ème congrès de l’IMIG (International Mesothelioma Interest Group « Groupe international d’étude sur le mésothéliome ») s’est déroulé dans la ville du Cap en Afrique du Sud.

Ce congrès a lieu plus ou moins tous les deux ans. Il est l’occasion de faire le point sur les protocoles de thérapies, les essais thérapeutiques, les progrès et les axes de recherche.

L’Andeva s’intéresse bien sûr de près à cette question et a démarré une collaboration avec l’équipe du professeur Scherpereel (Lille).

Depuis quelques temps les espoirs se tournent vers une collaboration internationale.

Parmi les présentations remarquables, on citera les travaux australiens, européens et américains ; parmi celles présentées par des français, les conférences de A. Scherpereel et M-C. Jaurand.

Il y a deux façons de résumer l’apport de ces travaux : une pessimiste - on ne sait toujours pas guérir le mésothéliome - et une optimiste - les progrès sont réels même s’ils sont modestes et la conjugaison des efforts et la collaboration très actives entre trois continents commencent à porter leurs fruits.

L’IMIG comportait également une importante session d’épidémiologie et une partie dédiée aux problèmes sociaux.

De nombreux exposés passionnants ont été faits sur la situation en Afrique du Sud, notamment la présentation de Sophia Kisting.


 LES CONGRÈS DE L’IMIG

1991 Paris, 1993, San Francisco (USA),

1995 Paris (Créteil), 1997 Philadelphia (USA),

1999 Grantham (Angleterre), 2002 Perth (Australie),

2004 Brescia (Italie), 2006 Chicago (USA),

2008 Amsterdam (Pays-Bas), 2010 Kyoto (Japon),

2012 Boston (USA), 2014 Le Cap (Afrique du Sud).

Le prochain congrès aura lieu en 2016 à Birmingham.


LES PARTICIPANTS

Parmi le bureau de l’IMIG, citons Jim te WaterNaude (organisateur principal, Afrique du Sud), Bruce Robinson (Australie), Marie-Claude Jaurand (France), Takashi Nakano (Japon), Walter Weder (Suisse), Rabab Gaafar (Egypte), Steve Albelda (USA).

 


DU CÔTÉ DES FABRICANTS DE MÉSOTHÉLIOMES

On remarquera que les principaux producteurs d’amiante et donc fabricants de mésothéliomes – la Russie, la Chine, le Kazakhstan et le Brésil – sont quasiment absents : on a pu recenser seulement une communication concernant une trentaine de cas de mésothéliomes féminins en Chine.

Le Canada est également peu présent au niveau de la recherche.

Parmi les gros consommateurs d’amiante, on a pu remarquer une présentation sur un centre de soins palliatifs en Inde et une étude épidémiologique sur les mésothéliomes au Vietnam, coordonnée par des chercheurs australiens.


 L’AMIANTE EN AFRIQUE DU SUD

L’Afrique du Sud a été jadis le troisième producteur mondial d’amiante, environ 10 % de l’amiante en France a été importé d’Afrique du Sud. L’Afrique du Sud présente la particularité d’avoir produit les trois variétés d’amiante : chrysotile (amiante blanc), amosite (amiante brun) et crocidolite (amiante bleu). Après avoir entamé en 2004 une sortie de l’amiante, l’Afrique du Sud a interdit l’amiante en 2008, devenant, après l’Italie, le second gros producteur à interdire la fibre mortelle. L’Afrique du Sud tente aujourd’hui de faire face au lourd tribut de maladies, elle doit aussi affronter une effroyable pollution environnementale autour des anciennes mines.


PRÉVENTION, THÉRAPIES ET RECHERCHE MÉDICALE

Comme l’a opportunément martelé et rappelé l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la manière la plus efficace d’éliminer les maladies dues à l’amiante est de cesser d’utiliser l’amiante et prendre des mesures de protection efficaces pour protéger les populations vis-à-vis de l’amiante en place, notamment dans le bâtiments. Il est frappant de voir que ce sont les pays ayant adopté de telles mesures qui sont également à la pointe de la recherche médicale (pays européens dont la France, Etats-Unis et Australie)


CORRUPTION, AMIANTE ET SCIENCE, DEUX EXEMPLES DIFFÉRENTS

Un singulier participant au congrès IMIG a présenté discrètement un poster : Daniel Bernstein, grand manipulateur de rats et de données scientifiques, jadis « expert » préféré de l’Institut du chrysotile canadien. Aujourd’hui il gagne (beaucoup) grâce aux clones brésilien et russe de l’Institut du chrysotile et aux compagnies américaines ayant utilisé de l’amiante et noyées dans des procès en indemnisation. Bernstein présentait un article où il avait exposé des rats à de la poussière de freins en amiante et concluait que les freins en amiante chrysotile ne déclenchait pas de réponse pathologique [N.B. chez le rat !].

J.C. Wagner est un médecin britannique, surtout connu pour son travail célèbre, publié en 1960, révélant un nombre très élevé d’un cancer rare – le mésothéliome – parmi les mineurs d’Afrique du Sud et leur entourage. L’étude est souvent citée comme la découverte du lien amiante-mésothéliome et du risque environnemental. Effectivement Wagner a consacré une bonne partie de sa vie à produire des recherches très importantes sur le mésothéliome et l’amiante.

Mais Jock McCulloch, historien co-auteur de Defending the Indefensible (« défendre l’indéfendable») , un historique des stratégies des industriels de l’amiante, a révélé lors du congrès au Cap un dernier épisode dramatique et moins glorieux : à la fin de sa carrière, Wagner a tenu en deux occasions des positions contredisant l’ensemble de ses travaux en déclarant que le chrysotile ne causait pas de mésothéliome. Explication : McCulloch a montré des copies des chèques que Wagner avait reçu de l’industrie !

POUR SE CONNECTER SUR LE SITE DE L’IMIG

 http://imig2014.org/     (les pages sont en anglais)


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°48 (avril 2015)