Un projet de loi du Sénat dépoussière le Code pénal

Le projet de loi sur les délits environnementaux a été voté à une majorité plus large que la majorité gouvernementale (165 voix contre 49 et 8 abstentions).

Le projet introduit cinq nouveaux délits dans le code pénal italien :

- pollution environnementale,

- catastrophe environnementale,

- atteinte volontaire à l’environnement,

- trafic de substances radioactives

- empêchement des contrôles

Un durcissement des peines encourues

Les peines prévues ont été aggravées. Il n’y aura plus d’impunité, si des mesures de dépollution ont été prises, mais seulement la possibilité d’une réduction de peine.

Une peine de prison de un à quatre ans et une amende de 20 000 à
80 000 euros est prévue pour quiconque ne remet pas en état les lieux, alors que la justice ou l’administration lui a ordonné de le faire.

Les profits ou les instruments du délit seront confisqués, sauf s’ils appartiennent à une personne qui n’est pas l’auteur du délit.

Dans le dossier Eternit, le verdict de la Cour de cassation avait considéré que les faits étaient prescrits avant  même le début de l’instruction !

Les sénateurs ont allongé les délais de prescription pour les délits environnementaux. Ils ont aussi voté la suspension du délai de prescription, dès lors que le juge, sur demande de l’accusé, suspend le procès.

Le ministre de la justice Andrea Orlando a salué ce texte, en disant que - s’il avait existé plus tôt - les choses se seraient passées autrement dans le procès Eternit.

Le texte doit maintenant être examiné par la chambre des députés.

Le président du Sénat, Pietro Grasso, a demandé que ce projet de loi soit adopté par les députés sans aucune modification.

 


Comment juger les catastrophes ?

Deux scandales de Santé publique ont marqué l’opinion publique italienne :

- le déversement illégal et le brûlage de 10 millions de tonnes déchets toxiques organisé par la Mafia dans les « terres de feu » du Sud de l’Italie, causant une épidémie de cancers et une contamination durable du milieu naturel,

- La production d’amiante-ciment dans quatre usines Eternit, causant la mort de plusieurs milliers  d’ouvriers et d’habitants et saccageant leur cadre de vie.

Ces deux grandes catastrophes  - qui continueront à tuer pendant plusieurs décennies -  ont révélé un immense décalage entre la gravité de ces crimes industriels et l’archaïsme du Code pénal censé les sanctionner.

La Cour d’appel de Turin avait infligé 18 ans de prison au PDG d’Eternit, jugé responsable d’une « catastrophe environnementale permanente avec intention frauduleuse  ».   Mais la Cour de cassation, jugeant les faits prescrits, a rendu un non-lieu qui a provoqué une vague d’indignation dans tout le pays.

Un procès Eternit-bis pour «  homicide volontaire » va bientôt commencer. Cette qualification permettra de lever l’obstacle de la prescription pour une partie des victimes.

Le projet de loi du Sénat vise à répondre à cette difficulté en introduisant de nouveaux délits environnementaux et en modifiant les règles de prescription.

Souhaitons maintenant qu’il soit adopté par les députés.

 


Un procès « Eternit-bis » va bientôt commencer à Turin

« Il y aura 258 plaignants dans le procès « Eternit-bis»  , explique Bruno Pesce, coordonnateur de l’Afeva. La majorité sont des victimes environnementales.  Les audiences préliminaires devraient commencer avant les vacances d’été et les audiences sur le fond avant la fin de l’année.

« L’état doit être aux côtés des victimes »

Nous demandons à l’état italien de jouer un rôle actif pour coordonner toutes les institutions qui réclament des indemnités, dans les procédures civiles et pénales.

Stephan Schmidheiny, même s’il est condamné, fera tout pour ne rien payer.  Or les victimes n’ont pas les moyens d’engager de longues et coûteuses procédures internationales de recouvrement des sommes dues.

L’état italien a le devoir de les aider à faire appliquer des décisions de justice prises au nom du peuple italien. Il ne peut laisser les victimes abandonnées à elles-mêmes.

Après l’arrêt de la Cour de cassation du  19 novembre,  nous devons reprendre notre combat judiciaire à zéro. C’est très dur pour nous tous. Mais nous n’avons pas d’autre choix. Nous ne pouvons pas accepter que les responsables de tant de morts échappent à la justice.

« Notre lutte entre dans une nouvelle phase. »

Nous devons nous organiser pour une lutte de longue haleine dans des conditions difficiles.

L’Afeva et les organisations syndicales se porteront partie civile dans le procès Eternit bis.

Nous étudierons avec nos avocats les recours possibles contre l’arrêt de la  Cour de cassation, dont nous venons d’avoir les attendus.

Nous demandons que le délai de prescription soit revu.  La Cour soutient que la catastrophe était prescrite avant le début de l’instruction ! C’est inacceptable. Un projet de loi du Sénat étend le délai de prescription.

Nous continuons à demander des moyens pour dépolluer notre ville. Casale Monferrato a obtenu de l’Etat 65 millions d’euros pour trois ans afin de poursuivre les travaux.

Il faut continuer la lutte, quelles que soient les difficultés. Merci à l’Andeva et aux associations de victimes du monde entier pour leur soutien.

 


Désamiantage, assainissement

L’Etat débloque 65 millions d’euros pour Casale

L’état a accordé 65 millions d’euros à la ville de Casale Monferrato, 10 millions à celle de Bagnoli et une vingtaine de millions pour d’autres sites classés comme nationalement prioritaires.

Cette subvention a été débloquée dans le cadre d’un plan  de lutte national contre le risque amiante afin d’accélérer les travaux de retrait et d’assainissement.

Gian Luca Galletti, le ministre de l’environnement, a indiqué que ces subventions étaient « le signe d’une solidarité concrète à des communes qui ont vécu et continuent à vivre les conséquences d’une pollution importante et dangereuse ».

Il a indiqué que l’Etat entendait prendre toutes ses responsabilités  dans ce domaine.

Il a conclut que « l’éradication complète de l’amiante en Italie sera un travail long et minutieux étant donnée la dissémination des matériaux amiantés, mais nous avons commencé et nous entendons sérieusement continuer.» 


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°48 (avril 2015)