JEAN VIT DEPUIS 7 ANS SOUS OXYGENE

« Je suis resté 26 ans chez Villeroy et Bosch à la fabrication de carreaux de faïence, explique Jean. On travaillait en 3 x 8. Les carreaux cuisaient dans un four dont le dessus était recouvert de plaques d’amiante pour garder la chaleur.  Les carreaux arrivaient jusqu’au four par wagons. Le four faisait près de 300 mètres de long (j’en faisais le tour en vélo !). Quand la cuisson était terminée, un gars rentrait dans le four pour nettoyer. Il y avait de la poussière partout.

En 1996, j’ai commencé à avoir des problèmes pulmonaires. J’ai été en longue maladie pendant deux ans. Puis on m’a proposé un départ en retraite...

Aujourd’hui, pour m’aider à respirer, j’ai un tuyau d’oxygène dans le nez. La nuit pour
dormir avec l’oxygène, je porte un masque. Si je veux quitter la maison, je dois emporter une bouteille d’oxygène. Je tousse beaucoup. Je marche avec difficulté. Je me fatigue très vite. »

Jean perd le souffle. Il interrompt son récit  et c’est Sidonie, son épouse, qui prend le relai : « Mon mari a deux maladies professionnelles : une silicose reconnue à 5% et une asbestose reconnue à 35%.  Il a déposé un dossier au FIVA. Le 23 janvier 2015, il a reçu une lettre lui annonçant une expertise médicale pour évaluer son état de santé. Trois jours plus tard, il était convoqué par un pneumologue de la clinique Chenieux... à Limoges ! Nous habitons Béziers à 450 kilomètres de là !

En voiture, pour aller de Béziers à Limoges, il y a plus de 4 heures de route, avec une bouteille d’oxygène qui n’a que 4 heures d’autonomie... Sans compter la fatigue.

Quand j’ai lu ce courrier, j’ai pensé qu’ils se moquaient du monde. J’ai alerté Christine Preschner à l’Andeva. Elle est intervenue aussitôt. Le Fiva a annulé l’expertise, en disant qu’elle n’était en fait pas nécessaire, car la maladie avait été reconnue et les pièces médicales jugées suffisantes par le service médical.

L’expertise n’aura pas lieu, mais cette maladie nous fait vivre dans une inquiétude permanente.

Certains jours, il m’arrive de pleurer toute seule en pensant à l’avenir.

Quand une maladie grave vous tombe dessus, on se sent abandonné. Il est important d’être aidé et réconforté.

Plusieurs collègues de mon mari sont décédés sans être accompagnés ni informés sur leurs droits.

Il y a 7 ans, nous avons eu la chance de tomber sur un pneumologue formidable qui a dit à mon mari qu’il ne pouvait pas rester comme ça : il l’a mis sous oxygène et lui a expliqué les démarches pour être indemnisé de ses dommages.

Les administrations ne se rendent pas compte de la situation que nous vivons. Nous allons être obligés de vendre notre maison pour nous rapprocher de notre fils, car nous ne pourrons plus rester seuls. Mais quand mon mari a demandé l’APL, on lui a répondu qu’il gagnait trop...

Il a travaillé toute sa vie comme un forçat. Nous pensions qu’à la retraite nous allions pouvoir vivre tranquilles dans notre maison. Et cela ne sera pas possible. »

[Les représentants de l’Andeva au CA du Fiva ont fait part de ce problème à la directrice. C’est un cas extrême, mais d’autres victimes ont aussi été convoquées loin de leur domicile. Nous espérons que ce problème sera rapidement résolu. Les délais de traitement des dossiers se sont améliorés, mais  pour les expertises, il est impératif que le Fiva tienne compte des distances et de l’état de santé du demandeur]