Jusqu’ici le Code du travail ne prévoyait un droit d’alerte et de retrait que face à un danger grave et imminent. La loi du 16 avril 2013 y ajoute un droit d’alerte face à un risque pour la santé publique et pour l’environnement. Après les scandales sanitaires du Médiator ou des prothèses mammaires, ce droit vise à protéger à la fois les salariés au travail et la population ainsi que son cadre de vie. Malgré un contexte social difficile, ils donnent aux « lanceurs d’alertes » de nouveaux moyens pour agir et pour se défendre.

CE QUE DIT LE CODE DU TRAVAIL

Une situation de « danger grave et imminent »

Les articles L4131-1 et suivants du Code du travail reconnaissaient déjà un droit d’alerte et de retrait à tout salarié ayant « un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ».

Il peut « se retirer d’une telle situation  » ; l’employeur ne peut lui demander de reprendre son activité « dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent ».

« Aucune sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à l’encontre d’un travailleur ou d’un groupe de travailleurs » ayant exercé ce droit.

S’il constate une situation de danger grave et imminent ou en étant informé par un salarié, un élu au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) alerte l’employeur en écrivant sur un registre spécial.

L’employeur doit alors enquêter avec lui. L’inspecteur du travail et l’ingénieur de la caisse régionale sont informés.

Un risque pour la santé publique et l’environnement

Les articles L4133‑1 et suivants, créés par la loi du 16 avril 2013 sur la « protection des lanceurs d’alerte » étendent le champ d’application ce droit d’alerte.

« Le travailleur alerte immédiatement l’employeur s’il estime, de bonne foi, que les produits ou procédés de fabrication utilisés ou mis en oeuvre par l’établissement font peser un risque grave sur la santé publique ou l’environnement. »

L’arrêté du 11 mars 2014 précise que l’alerte, consignée sur un registre spécial, doit identifier le risque et ses « conséquences potentielles pour la santé publique et l’environnement. »

Le travailleur qui lance une alerte bénéficie de la protection prévue à l’article L.1351-1 du Code de la santé publique (voir ci-dessous).

Si le lanceur d’alerte est un membre du CHSCT, l’employeur « examine la situation conjointement avec le représentant du personnel » et l’informe de la suite donnée à cette alerte.

En cas de divergence avec l’employeur ou de non réponse, le représentant du personnel peut saisir le représentant de l’Etat dans le département.

Le CHSCT est informé des alertes et de leurs suites.

Et l’amiante ?

Les fibres d’amiante ne s’arrêtent pas toujours aux murs d’uneusine ni aux limites chantier de retrait.

Portées par le vent, elles peuvent voyager très loin de leur source d’émission.

Or l’exposition à de faibles doses peut provoquer de graves maladies.

Il est trop tôt pour dire quelle sera la jurisprudence pour ces nouveaux articles du Code du travail.

On peut prévoir un tir de barrage des employeurs et toutes sortes de pressions sur les salariés pour les dissuader d’utiliser ce droit.

Mais il y a là une réflexion syndicale et associative à mener sur la façon de faire de l’utiliser et de le faire vivre.

LE CODE DE LA SANTE PUBLIQUE

Article L.1351-1 : « Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation professionnelle, ni être sanctionnée ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de traitement, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, soit à son employeur, soit aux autorités judiciaires ou administratives de faits relatifs à un risque grave pour la santé publique ou l’environnement dont elle aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions.

Toute disposition ou tout acte contraire est nul de plein droit. »


Articles tirés du Bulletin de l’Andeva N°49 (septembre 2015)