Le 26 septembre 2019, vers 2h40 du matin, un énorme incendie s’est déclaré dans une aire de stockage de l’usine Lubrizol de Rouen. 9 000 tonnes de produits chimiques ont brûlé. Une toiture de 8000 mètres carrés en amiante-ciment a explosé. Une colonne de fumée de 22 km de long, chargée de cocktails chimiques toxiques et de milliards de fibres d’amiante a voyagé jusqu’en Belgique. Des dizaines de tonnes de productions agricoles ou laitières ont dû être jetées. Plus de 200 pompiers ont été mobilisés.

Un an après, à l’appel du collectif unitaire qui réunit syndicats, associations de victimes et de défense de l’environnement, agriculteurs et partis de gauche, une imposante manifestation a défilé le samedi 26 septembre dans les rues de Rouen pour exiger « vérité et justice » et des mesures de prévention pour éviter d’autres catastrophes.

Le 24 septembre, deux jours avant la manifestation, Gérald Darmanin et Barbara Pompili, les ministres de l’Intérieur et de l’écologie, sont venus à Rouen dire qu’ils avaient tiré les leçons de la catastrophe et annoncer des mesures telles que :

- la mise en place de dispositifs d’alerte par téléphones portable,

- des exercices de sécurité plus fréquents,

- la création d’un bureau d’enquête accidents (BEA)

- une augmentation de 50% de la fréquence des contrôles,

- l’inspection des installations voisines des sites Seveso,

- un accès du public aux résultats des contrôles réalisés sur ces sites par les Installations classées

 Un risque accru d’accidents industriels

En fait, les questions posées à Lubrizol se retrouvent sur beaucoup d’autres sites. Il y a en France un demi-million d’Installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) qui présentent des risques d’incendie, d’explosion ou de pollution, dont 1300 sites classés Seveso (à hauts risques) et 127 installations nucléaires de base.

Le risque d’accidents majeurs y a été aggravé par l’affaiblissement des institutions de contrôles, la faiblesse des sanctions et les effets du dérèglement climatique.

Entre 2009 et 2018 les contrôles des sites classés ont chuté de 29 000 à 19 000. Dans le même temps, le nombre d’accidents industriels a augmenté de 34% !

Des mesures efficaces sont nécessaires

Dans ce contexte, les annonces ministérielles sont insuffisantes pour répondre à la gravité de la situation. Plusieurs demandes émergent :

- une forte augmentation du nombre d’inspecteurs des Installations classées (sans laquelle le renforcement des contrôles sera un voeu pieux).

- l’interdiction de la sous-traitance sur les sites Seveso (un rapport de Cidecos signale qu’elle a « fragilisé la sécurité sur le site de Lubrizol »),

- la prise en charge intégrale des dégâts matériels et humains par Lubrizol (principe « pollueur-payeur »).

- le retrait rapide des toitures en amiante-ciment de tous les sites classés,

- le durcissement des sanctions pénales, (réclamé par la mission d’information de l’Assemblée nationale) ainsi que l’introduction de la notion de « crime industriel » dans le code pénal,

- la création d’un comité de suivi des effets sanitaires de l’incendie dans les prochaines décennies (cancers, malformations à la naissance...), comme le propose un rapport du Sénat.

 

L’Andeva, l’Adeva 76 et l’Addeva Rouen Métropole sont dans le collectif unitaire et ont engagé une action au pénal pour mise en danger d’autrui contre Lubrizol .


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°64 (novembre 2020)