Alerté par l’Andeva, le ministre de la Santé justifie l’absence de réaction des pouvoirs publics

Le 5 mars, Jacques Faugeron, président de l’Andeva alertait Olivier Véran : « La présence d’amiante dans le talc utilisé notamment dans certains produits cosmétiques et industriels pose un grave problème de Santé publique ». Il demandait  des contrôles renforcés. Il n’a pas été entendu.

Dans une lettre à Olivier Véran Jacques Faugeron expliquait que
« les personnes qui utilisent du talc ou des produits en contenant, dans leur vie quotidienne ou en milieu professionnel, sont en droit de demander des garanties sur leur provenance et leur composition exacte ».

L’urgence d’un renforcement des contrôles

Il demandait quelles suites avaient été données aux recommandations émises sur ce sujet en 2012 par l’Agence nationale de Sécurité sanitaire (Anses) qui réclamait notamment une cartographie des gisements de talc dans le monde et une traçabilité des talcs depuis leur extraction jusqu’à leur commercialisation en France.

Il demandait qu’avant leur mise sur le marché en France et dans l’Union européenne, tous les produits cosmétiques et industriels importés à base de talc fassent l’objet, d’une analyse préalable en microscopie électronique à transmission analytique (META).

Il n’y a jamais eu « d’enquête spécifique » sur l’amiante dans le talc

Le ministre a répondu le 15 juin « En France, la surveillance du marché des produits cosmétiques est assurée conjointement par l’ANSM (agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) et la DGCCRF (direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes).

La DGCCRF a indiqué ne pas avoir mené d’enquête spécifiquement sur l’amiante dans le talc et n’avoir pas reçu de signalement pour des produits qui en contiendraient, commercialisés sur le territoire national. »

Il indique que les Etats membres de l’U.E. ont « envisagé l’élaboration d’un Guide pour définir les impuretés possibles afin d’évaluer la sécurité des produits cosmétiques » suite à « la détection de fibres d’amiante dans du maquillage commercialisé aux Pays Bas. » qui a fait l’objet d’un signalement par le système alerte européen RAPEX en 2018. La lettre ne dit pas si ce guide a été effectivement réalisé.

Cette autojustification de l’inaction passée est irrecevable. Les 19 400 plaintes au USA et les analyses de la Fédération américaine de défense de l’environnement (FDA) confirmant la présence d’amiante dans la poudre J&J Baby Powder auraient dû être des signaux d’alerte suffisants pour déclencher cette enquête.

Des analyses en microscopie électronique

Sur son action présente et à venir, le ministre  évoque trois mesures :

  1. une étude de 2018 censée répondre aux préconisations de l’Anses (qui ne semble pas avoir été publiée),
  2. un arrêté du 1er octobre 2019 sur l’analyse des matériaux et produits manufacturés contenant de l’amiante.

Cet arrêté prévoit l’utilisation de la microscopie électronique après une mesure en première intention en microscopie optique (MOLP).

  1. une campagne de mesures d’empoussièrement en 2020 pour « acquérir des données sur la caractérisation et l’émissivité des particules contenant des fibres minérales susceptibles d’être inhalées sans tenir compte de leur origine asbestiforme ou non asbestiforme ».

En fait, cette campagne de mesures semble plutôt concerter les chantiers du BTP (granulats, bétons, remblais...) que l’utilisation privée de cosmétiques. Est-il vraiment besoin d’évaluer l’évidente « émissivité » d’une poudre ?

Ces annonces ne sont pas à la hauteur. La première urgence aujourd’hui est de renforcer les contrôles par microscopie électronique sur toutes les variétés de talc arrivant sur les marchés européens, y compris celles qui peuvent être commandées par Internet. Dans ce domaine, la France peut et doit montrer l’exemple.


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°64 (novembre 2020)