Jean-Claude Barbé est vice-président de l’Aldeva Condé-Flers dans le Calvados. Ancien ouvrier de Ferodo-Valéo, fortement exposé à l’amiante, il passe, depuis près de 20 ans, des examens gratuits de suivi médical post-professionnel (SPP). C’est aux patrons de les financer, pas aux assurés.

« J’ai travaillé pendant 32 ans (de 1968 à 2000) chez Ferodo-Valéo à Condé-sur-Noireau. Valéo fabriquait de plaquettes et des segments de freins pour véhicules de tourisme et poids lourds. Les matériaux de friction étaient en amiante. Dans cette usine, j’ai été très fortement exposé à l’amiante.

Jusqu’ici j’ai eu la chance. On ne m’a jamais détecté de maladie due à l’amiante. Mais je sais bien que nous sommes des « sujets à risques ». Je vis toujours avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Je ressens de l’anxiété, parce que j’ai vu beaucoup de collègues disparaître l’un après l’autre. Ma famille a été touchée : Mon beau-père, une tante et un oncle de mon épouse sont décédés de l’amiante. Je sais qu’une maladie de l’amiante peut se déclarer à tout moment.

Depuis près de 20 ans, je passe des examens réguliers de suivi médical post-professionnel pour surveiller mon état de santé. Jusqu’à présent, les choses s’étaient toujours passées de la même façon. Il fallait demander le formulaire de prise en charge, avec une feuille pour le radiologue et une pour le médecin. Je passais un examen radiologique (auparavant, c’était une radio tous les deux ans, aujourd’hui, un scanner tous les cinq ans). Puis j’allais en consultation chez un médecin du CHU de Caen qui regardait mes scanner et vérifiait mon souffle.

Les choses se sont passées ainsi pendant 20 ans et, aujourd’hui, je me heurte à une difficulté incompréhensible.

Voici les faits.

Le 28 février, j’ai déposé un message sur mon compte Ameli pour demander les formulaires habituels. (J’avais passé mon dernier scanner en le 25 novembre 2014, il y a plus de cinq ans. Il était temps d’en repasser un). Je n’ai pas eu de réponse. Le 28 avril, j’ai déposé un nouveau message pour demander à nouveau des feuilles pour la prise en charge. J’ai reçu une réponse étonnante de la caisse primaire sur ma boîte vocale : on m’a expliqué que je ne recevrais aucun formulaire et que je devais utiliser ma carte Vitale et ma carte de mutuelle. Je n’ai pas accepté cette réponse. J’ai alerté une juriste de la Fnath qui a envoyé un fax à la caisse. Sans résultat.

Finalement, le 2 juin, j’ai envoyé une lettre recommandée avec accusé de réception au directeur de la caisse primaire de l’Orne où j’ai expliqué : « Je refuse catégoriquement d’utiliser ma carte vitale et de mutuelle pour le financement de ce suivi post professionnel. »

J’attends sa réponse.

C’est pour moi une question de principe. Ce suivi médical gratuit est un droit. Tous les examens doivent être à la charge de la branche AT-MP financée par les employeurs et non à celle des assurés. Donner sa carte Vitale et sa carte de Mutuelle, c’est accepter de creuser le déficit de la Sécurité sociale et d’imposer des charges indues à la Mutuelle.

Je ne suis pas du tout d’accord. Je suis décidé à aller jusqu’au bout, avec l’aide de l’Andeva et de la Fnath. »

Jean-Claude Barbé


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°63 (juin 2020)