L’Ardeva Sud-Est a mené sa petite enquête. Les résultats de ce périple kafkaïen sont édifiants.

« Nous avions déjà été alertés sur les difficultés des particuliers qui souhaitent se débarrasser de matériaux amiantés, explique Monique Nowak, la présidente de l’Ardeva Sud-Est. Une adhérente de Corse, qui souhaitait remplacer une vieille toiture en fibrociment, nous avait demandé conseil. L’entreprise pressentie lui avait demandé 20 000 euros pour poser la nouvelle toiture et transporter l’ancienne en décharge. Une somme très au-dessus de ses moyens... Nous avons alors décidé d’approfondir la question, et nous avons lancé notre petite enquête pour savoir comment les choses se passaient dans le Var. »

Un membre de l’Ardeva, Gérard Feraud, s’adresse donc à la mairie de Toulon. Les services municipaux répondent qu’ils n’ont pas d’information et le renvoient vers la préfecture.

« Ce n’est pas de notre ressort »

Il téléphone à la cellule environnement de la préfecture. Réponse : « ce n’est pas de notre ressort, adressez-vous à la Direction départementale de l’équipement (DDE) ! »
Sans se décourager, il téléphone à la DDE. Ne sachant comment lui répondre, la personne contactée lui conseille de s’adresser à l’inspecteur du travail…

« Nous ne prenons pas de déchets amiantés »

Les limiers de l’Ardeva sont tenaces. Josette Bassat, trésorière de l’association, lit dans Femme actuelle un article qui conseille aux particuliers de consulter le site Internet du Ministère de la santé : www.sante.gouv.fr.
Elle va sur ce site et apprend que les plaques de fibrociment peuvent être confiées à certaines déchèteries. Pour en avoir le cœur net, Gérard Féraud prend son vélo et se rend aux déchèteries de la Valette et de la Garde, près de Toulon. Réponse : « nous ne prenons pas de déchets amiantés ni de laine de verre ».
Dans un autre magazine, « i comme information » Josette Bassat trouve un article : « amiante à la maison : les bons gestes ».
On y trouve des listes de matériaux et d’entreprises agréées, mais pas de listes de décharges agréées pour l’amiante. Seulement un conseil : « Les maires peuvent fournir l’adresse du centre le plus proche ». Retour à la case départ ! …

« Rappelez-nous demain ! »

Toujours pas découragée, elle contacte le service propreté de la mairie de Toulon. Réponse : « ce n’est pas nous qui nous en occupons. Adressez-vous au SITTOMAT ! C’est un organisme chargé de la récupération des déchets en vue de leur élimination. »
Elle contacte le SITTOMAT. Réponse : « Adressez-vous à ONYX. Cette entreprise, qui amassait les ordures ménagères, n’existe plus. Elle fait maintenant partie du groupe VEOLIA. »
Avec une belle obstination, elle appelle ONYX. On lui recommande de s’adresser à la société AUREDIA.
Josette téléphone donc à AUREDIA. Miracle : cette société accepte les plaques de fibrociment contenant de l’amiante ! Les déchets amiantés doivent être placés sur palette et enveloppés dans du polyane.
- Quels sont les prix ?, demande-t-elle.
- Rappelez-nous demain. Notre commercial est absent pour la journée ! 

Faut-il pleurer, faut-il en rire ?

On peut se poser la question. Quoi qu’il en soit, l’association est décidée à ne pas lâcher le morceau. Elle a écrit à la mairie. Une rencontre avec l’adjoint chargé de la prévention doit avoir lieu. Elle a demandé une rencontre avec la DDE et la DRIRE. Elle avait écrit à la DDASS, qui avait répondu par une lettre cordiale, dont le seul défaut était de ne comporter aucune indication précise sur la conduite à tenir par un particulier qui souhaite éliminer des matériaux amiantés.
On voudrait pousser, sans le dire, les citoyens de bonne volonté, à abandonner nuitamment en catimini leurs déchets sur le bord des routes qu’on ne s’y prendrait pas autrement…
On pourrait en rire, si cette partie de ping pong n’avait pas - une fois de plus - pour conséquence de faire courir des risques parfaitement évitables à des personnes privées d’information et de solution pratique.


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°26 (mai 2008)