« NOUS SAVONS QU’IL FAUT RESTER VIGILANTS »

« Je n’ai plus les moyens pour enquêter. Si l’on ne me donne pas des moyens conséquents. Il n’y aura pas de dossier solide ». C’était le cri d’alarme lancé il y a quelques mois par Madame Bertella-Geoffroy, juge d’instruction au pôle de Santé publique, après plusieurs départs non remplacés dans ses services.
« Cette alerte nous a fait réagir, dit Pierre Pluta, président de l’Ardeva 59-62 et vice-président de l’Andeva. Le conseil d’administration de notre association avait décidé que les marches de veuves et des victimes de l’amiante reprendraient à Dunkerque, si le gouvernement ne prenait pas très rapidement des mesures pour assainir la situation.
Nous avions d’ailleurs annoncé publiquement que nous prendrions notre décision à l’assemblée générale de l’Ardeva, le samedi 1er mars. Le matin même de l’AG, Monsieur Jean-David Cavaillé, du ministère de la Justice m’informait des mesures prises
 :

- Effectif enquêteurs : 11 depuis le mois de janvier. Il est prévu de fusionner les deux cellules d’enquêteurs et de faire progresser l’effectif à 14.
- Effectif assistants spécialisés : 3.
- Effectif assistants de justice : Les chefs de Cour de Paris sont saisis de la question pour renforcer la cellule.

« Au vu de ces informations nous avons décidés de ne pas reprendre les marches pour le moment, mais nous savons qu’il faut rester vigilants »

 


L’INSTRUCTION SUIT SON COURS

Le procès pénal de l’amiante est d’une ampleur sans précédent : les victimes se comptent par dizaines de milliers, les responsables par centaines, les contaminations ont eu dans toutes les régions de l’hexagone pendant plusieurs décennies...
A la demande des juges du Pôle de Santé publique, plusieurs centaines de victimes ont été auditionnées par des gendarmes spécialisés.
Pour chaque procédure, les magistrats ont décidé d’interroger toutes les victimes connues et pas seulement celles qui avaient déposé plainte.
Certaines sont convoquées, d’autres reçoivent des questionnaires.
Le but des juges est d’évaluer l’ampleur de la contamination, au-delà des cas particuliers des plaignants.
L’analyse des innombrables documents saisis lors de perquisitions dans les entreprises et les administrations est en cours. Certains doivent être désamiantés avant d’être examinés…
Hier, la juge Bertella-Geoffroy tirait le signal d’alarme sur l’inquiétante pénurie de moyens mis à sa disposition pour l’instruction. « La situation s’est un peu améliorée, explique Michel Ledoux. Chez les victimes qui attendent depuis 12 ans, renaît l’espoir de voir la procédure aboutir. Mais la route est longue, semée d’embûches. »

 


LES ARCHIVES D’ÉTERNIT DÉSAMIANTÉES !

L’examen des documents saisis par les gendarmes pose un problème inédit : certains d’entre eux sont couverts de poussières d’amiante et doivent être décontaminés avant d’être lus par les magistrats.
C’est le cas des archives d’Eternit, auxquelles les gendarmes n’ont pas voulu toucher, tant qu’elles ne seraient pas décontaminées. Elles ont donc été transférées en Normandie pour un désamiantage complet, qui est en passe de se terminer (l’information est révélée par le Bulletin des retraités de la gendarmerie d’avril 2008).
Autre question inédite : qui doit payer ce désamiantage ? Un accord a finalement été trouvé sur un partage des frais 50-50 entre Eternit et les juges chargés de l’instruction.


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°26 (mai 2008)