Incroyable, mais vrai ! Durant la semaine du 27 au 31 octobre 2008, les 126 pays membres de la Convention de Rotterdam réunis à Rome ont renoncé à inscrire l’amiante sur la liste des produits dangereux !


En 2004, puis de nouveau en 2006 le Canada avait opposé brutalement son veto à l’inscription de l’amiante chrysotile, qui représente environ 95% de la production mondiale. (Le chrysotile est aussi la variété d’amiante qui est produite par les mines du Québec).

La convention de Rotterdam 2008

Lors de la dernière réunion internationale à Rome, les manoeuvres des représentants canadiens ont été à peine plus subtiles : dans un premier temps ils se sont opposés de façon véhémente à ce que les décisions soient prises à la majorité qualifiée et ont exigé que la règle de l’unanimité soit maintenue ; puis, dans un deuxième temps, ils ont constaté qu’il n’y avait pas consensus sur l’amiante chrysotile….
En effet, parmi les 126 pays représentés, certains ont accepté de défendre les intérêts commerciaux des producteurs d’amiante, notamment l’Inde qui est le plus gros consommateur d’amiante canadien.

Pourquoi les représentants canadiens commettent-ils ces actes ignobles ?

Le but du gouvernement canadien est simple : il s’agit de protéger l’industrie des mines d’amiante du Québec (environ 500 emplois) au détriment de la santé publique et tout simplement de la morale.
En totale connivence avec l’Institut de l’amiante (rebaptisé en 2003 « Institut du chrysotile », cousin du tristement célèbre « comité permanent amiante » français et tout comme lui organe de lobbying et de désinformation des industriels, épaulé par le gouvernement), le gouvernement canadien, non content de forcer les pays en voie de développement à consommer de l’amiante, veut ainsi empêcher l’information sur les risques et la prévention, qui risquerait de nuire au commerce.

Rappelons que le gouvernement canadien était allé jusqu’à déposer une plainte devant l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) contre la décision d’interdiction de l’amiante en France. Cette plainte avait été rejetée en septembre 2000 et en appel en mars 2001.
Dans les deux instances le point essentiel invoqué dans la décision était un article des accords GATT qui affirme autoriser les restrictions commerciales imposées par un pays à condition que le pays puisse prouver qu’elles sont « nécessaires à la protection de la santé et de la vie des personnes ».

L’OMC concluait que tel était bien le cas pour le décret d’interdiction de l’amiante en France (1997).

Cela n’a pas empêché le gouvernement canadien de menacer en 2006 l’Afrique du Sud, qui s’apprêtait à interdire l’amiante de représailles commerciales affirmant « qu’il n’est pas nécessaire d’interdire le chrysotile pour réaliser l’objectif de protection de la santé humaine » et d’invoquer les règles de l’OMC qui demande aux pays d’adopter la politique « la moins restrictive possible pour le commerce. »
Le gouvernement sud-africain n’a pas cédé et l’amiante est aujourd’hui interdit dans ce pays qui a été dans le passé un grand producteur d’amiante.

Mensonges et Secrets

Les représentants du Canada ont de plus en plus de mal à faire avaler cette politique, ils recourent donc de plus en plus souvent à la politique du secret, attitude indigne d’un pays démocratique. Ainsi la délégation canadienne a maintenu secrète sa position lors de la conférence de Rome cette année. Le député canadien Pat Martin, présent à Rome, n’a pu obtenir de communication gouvernementale sur la position que le Canada allait défendre concernant l’inclusion ou non de l’amiante chrysotile sur les liste des produits dangereux ; il est vrai que Pat Martin, qui a travaillé dans les mines d’amiante du Canada, est un militant de l’interdiction de l’amiante et pouvait donc être suspecté d’anti-patriotisme. On serait curieux de savoir si Clément Godbout – le directeur de l’Institut du chrysotile - lui aussi présent à Rome, était ou non dans le secret des officiels canadiens.

Par ailleurs, le gouvernement canadien maintient secret depuis plusieurs mois un rapport sur l’amiante chrysotile qu’il a lui-même commandé. On devine aisément que ce rapport scientifique ne doit pas exactement être favorable à la doctrine de l’État et des industriels de l’amante canadiens…



Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°28 (janvier 2009)