Le témoignage de Laurent Lhermitte

« J’ai grandi en métropole. Mon père est mort d’un mésothéliome. Je me suis installé en Nouvelle Calédonie où j’ai exercé le métier d’enseignant.
Quand je suis arrivé dans ce lycée de Nouméa, je me suis très vite inquiété. Le plafond et les murs des salles de classes étaient couverts d’une sorte de crépi, sur lequel les enfants gravaient leurs noms ou faisaient des dessins.
Je soupçonnais la présence d’amiante. J’ai fait mon enquête. J’ai appris qu’un enseignant était atteint de plaques pleurales. Il avait déjà alerté l’administration . Elle s’était contentée de faire repeindre le plafond de sa salle de classe, pour le calmer…
J’ai prélevé un échantillon, je l’ai fait parvenir au Laboratoire des Particules inhalées à Paris pour le faire analyser. Madame Billon-Galland a confirmé la présence de particules d’amiante chrysotile.
J’ai appris depuis que les ouvriers mélangeaient l’amiante au ciment à la main, puis projetaient ensuite le crépi à l’aide d’une « tyrolienne ».
J’ai posé le problème lors d’une réunion. L’administration niait tout danger. Elle a fait réaliser des mesures et elle en a conclu qu’il n’y avait « pas de fibres dans l’air »...
C’était extraordinaire : les poussières d’amiante passaient du plafond sur les tables, mais il n’y en avait pas dans l’air !
 
Pourtant, pendant les vacances, les plafonds se désagrégeaient en faisant tomber de la poussière sur les ordinateurs, qu’il fallait recouvrir d’une toile pour les protéger. Au bout d’une semaine de vacances la couche de poussière était bien visible…
Il aura fallu dix ans pour que ce lycée soit désamianté, avec l’aide financière de l’État français.


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°28 (janvier 2009)