François Desriaux commence par remercier les organisations qui ont soutenu cette manifestation (la Fnath, la CGT, la CFDT, la Fédération des Mutuelles de France) et Patrick Roy, le maire de Denain, qui a prêté les deux géants...

Pénal : des dysfonctionnements inacceptables

Il poursuit : « Cela fait trois ans maintenant que la manifestation se termine devant le ministère de la Justice. Les dysfonctionnements de l’instruction des affaires amiante sont inacceptables. Nous avons appris récemment qu’en raison des moyens insuffisants en officiers de police judiciaire attribués au pôle judiciaire de santé publique, il ne fallait pas espérer un terme des enquêtes avant 2013 - 2014.
Cette situation n’est pas acceptable. Les premières plaintes ont été déposées en 1996. Si cette estimation devait s’avérer exacte, cela signifierait que les victimes de l’amiante devraient attendre plus de vingt ans pour espérer voir juger une affaire qui aura fait plus de cent mille morts ! Madame la ministre, est-ce cela la justice ?
Cette insuffisance de moyens crée des tensions vives entre les magistrats et les officiers de police judiciaires au niveau national et nous craignons que ces tensions ne soient préjudiciables à la poursuite d’une instruction de qualité. Au vu des documents portés à notre connaissance, il apparaît que les perquisitions décidées par les magistrats sont discutées par la hiérarchie de la police judiciaire et que la voie pénale elle-même est remise en cause.
Aujourd’hui, nous sommes venus ici pour réclamer un véritable engagement public de la garde des Sceaux à mettre tout en œuvre pour qu’une instruction de qualité de l’affaire de l’amiante soit conduite dans des délais raisonnables. Nous ne voulons plus des promesses mais des actes, c’est-à-dire un renforcement significatif des effectifs d’enquêteurs réellement affectés à l’affaire de l’amiante. Si nous n’obtenons pas cela rapidement, cela signifiera très clairement que ce gouvernement ne veut pas d’un procès pénal de l’amiante, qu’il ne veut pas que les victimes mettent en cause des industriels, des employeurs, des hauts fonctionnaires ou des médecins ; cela voudra dire aussi que le durcissement de la politique pénale prôné par ce gouvernement, c’est bon pour la délinquance dans les cités ou les banlieues, mais pas pour les dirigeants du monde économique.
Notre mobilisation d’aujourd’hui témoigne de notre détermination à obtenir ce procès. Pour l’exemple, pour une société de droit, où la réglementation censée protéger les salariés n’est pas systématiquement bafouée ; pour des sanctions dissuasives qui empêchent des patrons-voyous de nuire en toute impunité ; pour une médecine du travail qui joue véritablement son rôle ; pour un monde du travail plus sûr où nos enfants ne perdront plus leur vie à la gagner !

La pré-retraite amiante n’est pas un privilège

Pour l’Allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, la fameuse Acaata. L’équation est simple. Nous, nous voulons une réforme de l’Acaata pour qu’elle bénéficie à tous les salariés dont l’exposition à l’amiante a réduit l’espérance de vie.
Ce n’est pas le cas aujourd’hui. Certains secteurs comme le bâtiment où des milliers de travailleurs ont été massivement exposés, n’ont pas accès au dispositif. Ce n’est pas équitable, ce n’est pas juste.
De son coté, le gouvernement n’a qu’une idée en tête, une idée que lui a soufflé le Medef : les victimes de l’amiante coûtent trop cher, le Fonds pour les préretraites amiante n’est pas supportable par les entreprises.
Alors, Monsieur le ministre du Travail, au nom de la revalorisation du travail que vous appelez de vos vœux, est-il illégitime que ceux qui meurent plus tôt partent aussi en retraite plus tôt ? Est-il illégitime que ceux qui ont tout donné à leur travail, au point d’en perdre la santé, puissent cesser de travailler plus tôt pour profiter quand même un peu de leur retraite ?
La préretraite amiante, ce n’est pas un privilège comme tente de le faire croire le patronat, c’est un droit !

Pour le respect du délai d’indemnisation par le Fiva

Nous apporterons également au cabinet de Xavier Bertrand 15 000 pétitions en faveur du respect des délais d’indemnisation par le Fiva.
Le Fiva n’indemnise plus dans les délais prévus par la loi. Même pour des malades atteints de maladies graves, il faut attendre parfois plus d’un an pour percevoir l’indemnisation.
Là non plus, la situation n’est pas acceptable. Elle est due au manque de personnel chronique au sein du Fonds, ainsi qu’à l’allongement souvent injustifié et inutile des procédures. Il y a malheureusement de plus en plus de victimes de l’amiante et donc de malades à indemniser.
Nous avons alerté les pouvoirs publics à plusieurs reprises. Nous savons qu’un rapport de l’Igas, qui n’a pas encore été rendu public, critique sévèrement ces retards et la gestion du Fiva.
Nous exigeons donc des pouvoirs publics, lesquels détiennent la majorité des sièges au Conseil d’administration du Fonds, de procéder aux embauches nécessaires et suffisantes pour que le Fonds respecte les délais d’indemnisation prévus par la loi.
Les victimes de l’amiante ne sont pas responsables d’être trop nombreuses ! C’est au Fiva de s’adapter à ce nombre grandissant, ce n’est pas aux victimes d’en faire les frais !

La politique canadienne : un véritable crime contre l’humanité

Nous allons aussi devoir faire face aux attaques du Canada contre l’Andeva.
Vous savez que ce pays est le premier exportateur d’amiante au monde. Nous avons dénoncé ce scandale et nous sommes maintenant poursuivis pour diffamation.
Comment un pays évolué comme le Canada peut-il encore oser prétendre que certaines variétés d’amiante ne seraient pas dangereuses pour continuer de vendre ce poison aux pays en voie de développement ?
Il est important que le jour du procès, nous soyons encore plus nombreux qu’aujourd’hui pour protester contre ce qui s’apparente à un véritable crime contre l’humanité et exiger l’interdiction mondiale de l’amiante.


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°28 (janvier 2009)