Les roches amiantifères se retrouvent sur l’ensemble de la Grande-Terre calédonienne. Outre la vallée de la Hienghène, des affleurements ont été répertoriés dans de nombreuses communes de l’archipel.

Ces roches ne constituent pas un danger lorsqu’elles sont recouvertes d’un sol végétalisé. Mais lorsqu’elles affleurent à la surface et sont soumises à l’action de facteurs météorologiques (vent) ou mécaniques (concassage, broyage), il y a émission dans l’air de fibres susceptibles d’être inhalées. L’exposition est donc aussi le fait de travaux d’aménagement (routes, bâtiments) lorsqu’ils se réalisent en terrains amiantifères.

Ces travaux ne sont pas à risque uniquement pour les travailleurs : ils constituent une nuisance sur le long terme pour les populations vivant à proximité. Ainsi dans le village de Ouégoa (commune de Ouégoa), les travaux de percement de la piste d’accès au nouveau collège inauguré en 2001 ont eu pour résultats de créer des remblais contenant de l’amiante(12). (trémolite). Ces mêmes remblais constituent un terrain de jeu pour les enfants du village. La proximité immédiate du dispensaire, des écoles, de la gendarmerie et du logement du médecin fait craindre une exposition aux poussières d’amiante des personnes fréquentant ces établissements.

Pourtant, au-delà même d’une réflexion sur le « quoi faire ? » et « le comment faire ? » la question de l’inaction des pouvoirs publics reste à l’ordre du jour. En Nouvelle-Calédonie, l’exposition environnementale aux poussières d’amiante est évoquée dès 1994, lors d’une mission du Réseau national de santé publique (RNSP). Les experts préconisent la localisation des zones de trémolite (amiante) afin de prendre « en compte l’aspect santé des populations »

En 2004, le débat social est relancé par André Fabre, président de l’Adeva-NC, l’Association de défense des victimes de l’amiante qui accuse notamment la serpentine, roche susceptible d’héberger des minéraux amiantifères, d’être à l’origine de maladies.

Cette appréciation est clairement partagée par la mission d’expertise conjointe BRGM, LEPI et INSERM mandatée par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, en avril 2007 qui affirme : « Il est donc nécessaire de prendre immédiatement des mesures visant à la protection de la population générale et des travailleurs. »

Pourtant, à la fin de l’année 2008, le gouvernement néo-calédonien n’a toujours pas pris la mesure de l’enjeu sanitaire du risque environnemental. Malgré les déclarations dans la presse, malgré les rapports des missions d’expertise, aucune politique d’envergure visant à remédier ou à prévenir le risque n’est proposée.

La démarche actuelle des pouvoirs publics en matière de gestion du risque « amiante environnemental » confirme que la connaissance ne présume en rien de l’action concrète. « Il n’est aucun problème assez urgent en politique qu’une absence de décision ne puisse résoudre » disait en son temps Henri Queuille(13). .

Pourtant, l’absence de prise en compte de l’exposition actuelle aura pour résultat d’appréhender le risque une fois les maladies établies, c’est-à-dire « trop tard ».


BRGM : bureau d’études géologiques et
minières

LEPI : laboratoire d’étude des particules
inhalées

INSERM : Institut national de la santé et de la recherche médicale

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Article paru dans le bulletin de l’Andeva n°30 (septembre 2009)