Il existe des similitudes frappantes entre les fibroses dues aux fibres d’amiante et les fibroses dues aux poussières de charbon. Pourtant, les mineurs malades du travail sont beaucoup moins bien indemnisés que les victimes de l’amiante. Et aucun tribunal des affaires de Sécurité sociale n’a encore voulu reconnaître la faute inexcusable des Houillères pour n’avoir pas fourni aux mineurs des moyens efficaces pour se protéger


UNE INJUSTICE

La silicose provoquée par la poussière de silice cristalline est connue depuis l’antiquité. Avec les maladies associées, pneumoconiose du houilleur, BPCO, emphysème, cancer du poumon, elle a causé près de 100 000 morts pour les seules mines de charbon depuis 1945.

Etrange paradoxe : aux Charbonnages de France (CdF) la faute inexcusable de l’employeur a été reconnue des centaines de fois pour des mineurs atteints d’une maladie de l’amiante ; dans d’autres entreprises, des salariés silicosés ont fait condamner leur employeur. Mais jamais, à notre connaissance, la faute inexcusable de CdF n’a été reconnue pour une silicose.

La direction de CdF, qui admet avoir une parfaite connaissance du risque, a convaincu les magistrats de la plupart des TASS et de toutes les cours d’appel qu’elle a fait ce qui était humainement possible pour préserver la santé des mineurs.

Les victimes de la silicose et les syndicats qui sont à leurs côtés (CGT-CFDT) savent que derrière l’avalanche de documents produits par Cdf pour se justifier, il y avait mensonges et infractions ; il y avait des salariés exposés à des empoussiérages tels que la maladie, la souffrance et la mort étaient inéluctables.

Les avancées obtenues par les victimes de l’amiante doivent être étendues aux victimes de la mine. Leurs combats se rejoignent : des maladies très voisines, des souffrances identiques et une même exigence de Justice.

Les victimes de la mine n’ont pas réussi à ce jour à convaincre les juges. Elles sont bien décidées à continuer.
Pour reprendre leur propre expression, « Aussi sûr que le soleil se lève chaque jour, la faute inexcusable "silicose" de CdF sera reconnue »..

 


SILICOSE - « AMIANTOSE » : Une histoire commune, des indemnisations très différentes

 

La silicose et ce qu’on nommait l’amiantose (1) ont une histoire commune.

Ces familles de maladies respiratoires sont provoquées par l’inhalation de poussières minérales.

Elles sont connues depuis l’antiquité, mais le patronat français a bloqué leur reconnaissance jusqu’en 1945, alors qu’elles étaient pourtant reconnues dans la plupart des pays industrialisés dès les années 20.

Aujourd’hui ; ces maladies sont toujours régies par des règles communes, la législation sur les pneumoconioses (2).

Pourtant, malgré ces points communs, elles sont indemnisées de manière très différente.

Silicose : une indemnisation au rabais

Pour l’indemnisation d’une silicose reconnue en maladie professionnelle par la caisse de Sécurité sociale et pour celle d’une pathologie due à l’amiante, la réglementation applicable est la même.

Les pathologies de l’amiante sont indemnisées sur les tableaux de maladies professionnelles 30 et 30 bis, les pathologies dues au charbon sur les tableaux 25, 44, 44bis, 91 et 94.

Mais - à la différence des victimes de l’amiante - les mineurs silicosés n’ont droit à aucune indemnisation complémentaire :

- Il n’existe pas de fonds d’indemnisation comparable au FIVA,

- Il n’y a pas à ce jour de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur pour l’immense majorité des anciens salariés des mines.

L’indemnisation versée par la Sécurité sociale répare la réduction de leur capacité de travail, comme pour les victimes de l’amiante, mais ni leur souffrance physique et morale, ni leur perte de qualité de vie (préjudice d’agrément), ni leur préjudice esthétique ne sont pris en compte.

 


Deux poids, deux mesures

Comme les mineurs sont également atteints par les maladies de l’amiante (l’une ne protégeant pas de l’autre), ils peuvent comparer :

Un mineur atteint d’une silicose avec un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) de 5 % reçoit une indemnité en capital de 1.828 euros (3). Il ne percevra aucune autre indemnisation

Un mineur atteint d’une asbestose avec le même taux d’IPP de 5 % est indemnisé, lui aussi, par un capital de 1 828 euros.

Il peut ensuite demander une indemnisation complémentaire au FIVA et en faute inexcusable de l’employeur.

Cela lui permet d’obtenir la réparation des préjudices qui n’ont pas été indemnisés par la Sécurité sociale et la condamnation de ses anciens employeurs responsables de sa maladie.

Il peut aussi contester devant une cour d’appel le montant de l’offre du Fiva et obtenir des majorations conséquentes (4).

A taux d’incapacité égal, le montant de l’indemnisation peut varier de 1 à 10.

 


Ce que demandent les victimes de la mine

Les organisations syndicales CGT et CFDT poursuivent leur action pour faire reconnaître la faute inexcusable des entreprises.

D’autre part, dans le cadre des négociations nationales sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, elles ont demandé la création d’un fonds d’indemnisation équivalent au FIVA pour toutes les victimes de maladies professionnelles respiratoires.

Les victimes de la mine sont, d’autre part, confrontées à des blocages législatifs. En effet, l’article 40 de la loi de financement de la Sécurité sociale, bien connu des victimes de l’amiante, qui permet la levée de la prescription pour tous les anciens dossiers de l’amiante, ne s’applique pas aux maladies des tableaux 25, 44, 44bis, 91 et 94, ni à aucune autre maladie professionnelle.

Les syndicats de mineurs (CGT – CFDT) ont demandé, à de très nombreuses reprises, l’extension des "mesures amiante" à toutes les maladies respiratoires d’origine professionnelle.
A ce jour, sans résultat..


(1) « Amiantose », c’est le terme qui désignait les maladies de l’amiante et en particulier l’asbestose jusqu’à la parution du tableau 30 en 1950. Jusque là, la silicose et l’amiantose étaient dans le tableau 25.

(2) La législation spéciale sur les pneumoconioses a été profondément modifiée en 1999, mais garde des spécificités codifiées dans les articles D 461-5 à D 461-24 du code de la sécurité sociale.

(3) Valeur du capital au 31 mars 2010.

(4) Suivant les barèmes propres à chaque Cour d’Appel.


Article paru dans le bulletin de l’andeva n°32 (mars 2010)