La cinquième conférence de la Convention de Rotterdam — dont la mission est de réglementer l’importation et l’exportation des produits dangereux — s’est tenue sous l‘égide de l’ONU du 20 au 24 juin à Genève. Il s’agissait d’inscrire l’amiante chrysotile sur la liste des produits dangereux pour lesquels l’exportation ne peut avoir lieu qu’avec le consentement préalable en connaissance de cause du pays importateur (procédure PIC). La représentation canadienne, porte-parole du lobby des mines d’amiante du Québec, a mis son veto, insultant la morale, la santé publique et les représentants de plus de 130 pays.

« L’attitude scandaleuse de la délégation canadienne
a suscité un tollé général »

En 2004, 2006 et 2008, les représentants du Canada avaient déjà réussi à bloquer l’inscription de l’amiante chrysotile sur la liste des produits dangereux, en invoquant la nécessité d’une position unanime des signataires.

Cette fois-ci, le gouvernement canadien a tenu secrète la position qu’il défendrait auprès de la convention de Rotterdam. Bel exemple de transparence et démocratie. Son veto n’est apparu qu’à la fin de la troisième journée, alors que le consensus pour l’inscription était acquis auprès de toutes les autres délégations.

Réactions indignées de nombreux participants

Les délégations africaines ont annoncé qu’elles allaient être obligées de recourir à une régulation locale ; plus de soixante pays, dont les pays africains et européens, ont signé une déclaration indiquant en substance qu’ils inscrivaient l’amiante chrysotile sur la liste des produits dangereux (ce qui n’a pas d’effet légal).

De son côté, le 24 juin, jour de la fête du Québec, le premier ministre Stephen Harper, accompagné du ministre de l’industrie et des ressources naturelles Christian Paradis, se rendait à un barbecue à … Thetford Mines où il côtoyait Bernard Coulombe, président de la mine Jeffrey .
Il est difficile d’être plus explicite dans le cynisme, la corruption et l’arrogance.


 

Une position cynique et irresponsable

L’attitude de la délégation canadienne, qui n’a pas fourni la moindre justification, a suscité un tollé général dans la presse canadienne et le monde politique.

Elle a bafoué l’avis de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), du Bureau international du Travail (BIT), et même de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC). Elle a méprisé les organisations médicales canadiennes qui avaient demandé à Harper «  d’appuyer l’inscription de l’amiante sur la liste des matières dangereuses ».

Piégée par la règle d’unanimité, la Convention de Rotterdam montre son impuissance à protéger la santé et la vie des populations.

En fait le gouvernement canadien a remporté une victoire à la Pyrrhus : cet épisode sordide met en lumière sa responsabilité dans l’hécatombe mondiale. Il s’isole sur la scène internationale. Des voix s’élèvent pour réclamer des sanctions contre lui. Il est dénoncé par la communauté scientifique internationale. Jamais le mouvement de protestation n’a été aussi fort au Canada même. Son action ne vise en fait qu’à retarder la fin du chrysotile canadien qu’il sait inévitable, mais il paie à chaque fois un prix politique plus élevé.

Un communiqué de presse de l’Andeva et du Comité anti– amiante Jussieu dénonce ces « véritables crimes de masse » et appelle les personnes de tous pays respectueuses de la santé et de la vie humaine à lutter pour y mettre fin.


Articles tirés du Bulletin de l’Andeva N°36 (septembre 2011)